Un ancien espion soviétique a déclaré ne pas avoir de regrets, après avoir finalement admis avoir été un agent soviétique pendant 30 ans, comme le révèlent des documents nouvellement déclassifiés.
Des transcriptions et d’autres documents datant des années 1960 détaillent comment Harold « Kim » Philby, décédé en Union soviétique en 1988, a avoué sa trahison à son ami et collègue des renseignements britanniques, le MI6, Nicholas Elliott.
Une partie des documents rendus publics mardi est constituée de transcriptions des conversations entre les deux hommes, enregistrées secrètement à l’époque par le MI6.
Pendant des années, M. Philby fut un membre haut placé du Secret Intelligence Service (SIS ou MI6) et était pressenti pour en devenir le futur chef.
Mais dans un appartement appartenant au MI6 à Beyrouth, au Liban, le 9 janvier 1963, l’homme de 51 ans a confié à M. Elliott qu’il était prêt à avouer qu’il travaillait comme agent pour l’URSS depuis les années 1930.
M. Philby avait dit à M. Elliott qu’il n’aurait probablement parlé à personne d’autre, « et lorsque vous m’avez dit vous-même que vous croyiez aux preuves retenues contre moi, ça a été un déclic. Voilà le scoop, en quelque sorte ».
L’espion ajoute dans cet enregistrement qu’il « avait ce moment précis en tête depuis presque 28 ans, à savoir que des preuves concluantes allaient finir par être apportées ».
M. Philby a confié à M. Elliott : « J’ai vraiment ressenti une immense loyauté envers le MI6, j’y ai été très, très bien traité et je m’y suis fait des amis vraiment merveilleux. Mais l’inspiration dominante était de l’autre côté ».
Dans son rapport, M. Elliott a noté à propos de M. Philby : « S’il pouvait vivre sa vie à nouveau, il se comporterait probablement de la même manière ».
S’il a finalement admis être un agent double, ses aveux étaient truffés de mensonges et de faux-fuyants, indiquent les documents déclassifiés, notamment qu’il avait cessé d’espionner pour le KGB en 1946, alors qu’en réalité il avait toujours travaillé pour eux.
Les cinq de Cambridge
Deux jours après leur conversation, M. Philby a de nouveau rencontré M. Elliott et lui a remis un compte rendu dactylographié de six pages détaillant son recrutement par les communistes et son travail avec eux. Peu après, celui-ci s’enfuit à bord d’un bateau à vapeur russe et fit défection à Moscou.
Les transcriptions font partie d’un groupe de dossiers auparavant très secrets du MI5 remis aux Archives nationales, couvrant les premières années du service de sécurité, d’avant la Première Guerre mondiale jusqu’aux années 1970.
M. Philby était membre du réseau d’espionnage de Cambridge, ou des Cinq de Cambridge, avec Donald Maclean, Guy Burgess, Sir Anthony Blunt et John Cairncross.
Ils ont été appelés ainsi parce qu’ils avaient tous été recrutés par des agents soviétiques pendant ou après leurs études à l’université de Cambridge.
Dans les années qui ont suivi, les cinq hommes ont pu accéder à des postes importants à Whitehall, dans les services de renseignement britanniques et au Foreign Office.
Le réseau d’espionnage a été actif entre les années 1930 et 1950, pendant la Seconde Guerre mondiale et le début de la Guerre froide.
Les deux premiers à être découverts sont MM. Maclean et Burgess, qui ont tous deux fui en Russie en 1951 pour éviter d’être démasqués en tant qu’espions ; les décrypteurs américains étaient sur le point de décoder les messages secrets que M. Maclean avait envoyés alors qu’il était en poste à Washington pendant la Seconde Guerre mondiale.
En conséquence, des soupçons pesaient sur M. Philby, qui fut contraint de quitter le MI6. Plus tard, M. Philby déclara à M. Elliott qu’il avait prévenu M. Maclean qu’il était sur le point d’être arrêté.
L’énigme Philby
Cependant, le service de sécurité, le MI5, n’a pas pu prouver sa culpabilité et il a été discrètement réadmis au MI6 en 1956, et envoyé à Beyrouth pour opérer comme correspondant au Moyen-Orient pour The Observer.
Fin 1962, de nouvelles preuves sont apparues et le chef du MI6, Sir Dick White, a envoyé M. Elliott pour confronter M. Philby au Liban.
D’autres documents montrent que les enquêteurs du MI5 ont été déconcertés par M. Philby, les interrogateurs étant convaincus de sa culpabilité, sans pouvoir produire de preuves concluantes.
Finalement, le principal interrogateur du MI5, Jim Skardon, s’entretint avec Philby mais déclara qu’il le trouvait « plus énigmatique que jamais ».
Selon les documents déclassifiés, M. Skardon a fait part de sa perplexité quant au fait que M. Philby n’était pas plus contrarié d’être accusé d’espionnage. Il a ensuite expliqué que sa formation au SIS avait donné à M. Philby la capacité de garder un visage impassible.
Les agents du MI5 ont donc admis à l’époque qu’ils n’avaient rien pour corroborer leurs soupçons, écrivant qu’ils continueraient à surveiller les activités de M. Philby.
Sir Anthony Blunt, qui est devenu l’arpenteur des tableaux de la Reine et un éminent critique d’art, a fini par admettre sa trahison en 1963. Il a coopéré avec les autorités en échange de son immunité, ce qui lui a permis de continuer à exercer ses fonctions jusqu’à sa retraite en 1972.
En 1964, John Cairncross a admis avoir fait de l’espionnage mais n’a pas été poursuivi. Il n’a pas été publiquement identifié comme le cinquième homme du réseau d’espionnage jusqu’à ce qu’il soit cité dans deux livres écrits par d’anciens agents du KGB en 1990 et 1995.
Avec PA Media
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