Un chemin vers la guérison forge un héros

Après le 11 septembre, Chris Meek s'est efforcé d'accomplir de petits actes de bienveillance. Au fil du temps, il a eu un impact considérable sur la vie d’autrui

Par Walker Larson
28 juillet 2025 12:14 Mis à jour: 29 juillet 2025 02:34

Quelque chose ressemblant à des confettis tombait par la fenêtre de l’immeuble de bureaux de Chris Meek, au 111 Broadway, dans le centre de Manhattan.

« Je ne savais pas qu’on avait une ticker-tape parade aujourd’hui », avait commenté l’un de ses collègues.

Mais les fragments et les taches grisâtres flottants n’étaient pas des confettis : c’étaient les braises de l’impact d’un avion de ligne sur la tour nord du World Trade Center. La détonation de quelques minutes auparavant n’était pas celle d’un camion-poubelle heurtant un nid-de-poule dans la rue en contrebas, comme M. Meek l’avait supposé. C’était une explosion qui marquait le début de l’attaque la plus meurtrière sur le sol américain depuis Pearl Harbor. Et il était sur le point de vivre cette expérience, sur place à Ground Zero.

M. Meek et les autres participants à la réunion ont alors compris que quelque chose clochait. Lorsque le deuxième avion a percuté la deuxième tour, ils ont senti les secousses parcourir le bâtiment et ont entendu le grondement de l’explosion. Ils ont écouté les nouvelles pour tenter de comprendre ce qui se passait et ont découvert les images célèbres, désormais gravées à jamais dans l’histoire et l’esprit des Américains et des gens dans le monde entier.

Après avoir vu les images cauchemardesques de l’impact qu’il avait ressenti dans son propre corps, il a appelé son équipe du New York Board of Trade, situé au 4 World Trade Center, et leur a demandé d’évacuer immédiatement. Il était soulagé d’apprendre qu’ils avaient déjà été évacués.

M. Meek gérait les opérations de négociation en salle pour Hull Trading à la Bourse de New York. À ce titre, il était responsable de 27 personnes, réparties sur quatre places boursières différentes, et dont la vie était potentiellement en danger. Sa prochaine mission consistait à localiser un groupe de 14 collègues travaillant à l’American Stock Exchange, dans un bâtiment séparé. Il devait les faire sortir rapidement.

Il a essayé les ascenseurs, sans succès. Heureusement, M. Meek et trois autres personnes ont trouvé une issue de secours et ont descendu 19 étages jusqu’à la rue. Dehors, il a aperçu pour la première fois l’état pitoyable des tours jumelles en flammes. Il a regardé, stupéfait, une femme sauter à sa mort d’une des tours. Les pompiers l’ont dépassé en accourant vers le brasier. Chris Meek s’est précipité vers l’American Stock Exchange.

Le visage de la philanthropie

Ce jour-là, il a réussi à sortir toute son équipe saine et sauve. Mais il y avait des choses qu’il n’a pas pu sauver du chaos, de l’incendie et des débris de Ground Zero le 11 septembre 2001. La vie ne serait plus jamais la même. Il ne pouvait plus retrouver la paix qu’il avait connue. L’inquiétude s’est emparée de sa vie après cette expérience traumatisante.

Chris Meek a écrit dans son livre Next Steps Forward : Beyond Remembering. The Power of Action (Prochaines étapes : au-delà du souvenir. Le pouvoir de l’Action. ) :

« En repensant à cette soirée et aux premiers jours qui ont suivi, j’ai ressenti le besoin d’avancer pour les autres. Je ne savais pas à quoi ressembleraient ces étapes, ni comment je les franchirais, mais je savais que ma vocation allait changer. »

Quand il s’est finalement assis à la maison à la fin de la journée, il a regardé ses chaussures couvertes de cendres et une pensée l’a frappé :

« La poussière et les cendres qui les recouvraient n’étaient pas seulement des particules provenant des décombres. Dans cette poussière et ces cendres se trouvaient les restes d’hommes, de femmes et d’enfants assassinés sans discrimination. […] À mon réveil le 12 septembre 2001, mes chaussures étaient là où je les avais laissées, encore couvertes de l’histoire que j’avais traversée la veille. […] Des jours et des jours, des semaines et des semaines, plus de vingt ans plus tard, je n’ai toujours pas nettoyé ces chaussures. Je ne les nettoierai jamais. Je les regarde chaque jour et je me souviens des morts du 11 septembre, ainsi que de ceux qui ont donné leur vie pour défendre notre pays depuis. Je le fais pour me rappeler que les pas que je fais sont pour eux. »

Les chaussures cendrées de Chris Meek l’ont mené vers une vie d’innovation et de philanthropie au service d’autrui, en particulier de ceux qui ont sacrifié leur propre sécurité pour nous tous. Des flammes et de la fumée du 11 septembre, M. Meek est apparu comme un homme déterminé à donner en retour, à extraire un sens et un but des braises ardentes de la tragédie.

Depuis le 11 septembre, M. Meek a fait preuve d’une telle détermination et d’une telle réussite qu’il a été surnommé « Visage de la philanthropie » par The Chronicle of Philanthropy. Cependant, Chris Meek n’a jamais recherché ce genre de reconnaissance. Il trouve cela presque amusant. « Je considère les Rockefeller comme des philanthropes, pas Chris Meek », a-t-il dit au magazine American Essence. « Je n’avais aucune intention de faire du philanthropisme. C’est simplement ce chemin qui a évolué au fil des ans. »

M. Meek est allé à Ground Zero au printemps 2025. C’était la première fois depuis le 11 septembre. (Crédit photo Adhiraj Chakrabarti pour American Essence)

Commencer petit

Comme la plupart des bonnes choses, le parcours de Chris Meek vers une vie de philanthropie a commencé modestement. On peut dire qu’il a commencé à son retour à Ground Zero dans les jours qui ont suivi le 11 septembre pour reconstruire l’infrastructure de son entreprise. Chaque jour, il franchissait les points de contrôle de sécurité de la Garde nationale. Sans y penser, il leur apportait de l’eau et de la limonade chaque jour tandis qu’ils se tenaient debout dans l’air vicié. Ce petit geste préfigurait ce qui allait suivre ; c’était le présage d’un changement dans la vie de M. Meek.

M. Meek a commencé à payer les notes des premiers intervenants au bar. « Tant que je suis là, ils ne paient pas », avait-t-il dit au barman. Puis, pendant la crise économique de 2008, il a lancé une association à but non lucratif appelée « START Now ! » pour apprendre aux gens à gérer leurs prêts hypothécaires et à conserver leur maison.

Après le 11 septembre, une phrase que sa mère lui avait dite des années auparavant lui est revenue en mémoire, résonnant avec une intensité renouvelée :

« Je ne peux peut-être pas changer le monde entier aujourd’hui, mais je peux changer le monde qui m’entoure. » Ce principe est devenu le fil conducteur de l’action caritative de M. Meek. Commencer petit. Commencer local. Commencer simple. Avoir confiance que de grandes choses peuvent en découler. Il a décrit sa démarche ainsi : « Penser globalement, agir localement. On a une vision globale, on l’applique à son écosystème, et on résout le problème à partir de là. »

À l’instar des pompiers du 11 septembre ou des soldats déployés après les attentats, Chris Meek n’avait pas peur de faire preuve de créativité et de faire ce que d’autres ne voulaient pas ou ne pouvaient pas faire ; il était prêt à résoudre les problèmes de front. À l’instar des militaires et des secouristes qu’il souhaitait servir, M. Meek s’est attaqué aux problèmes. Son indépendance d’esprit et son attitude positive se sont rapidement traduites par une campagne visant à aider directement les troupes américaines combattant en Afghanistan.

Tout a commencé modestement, avec des chaussettes. Malgré toute leur technologie et leur équipement de dernière génération, certaines troupes déployées à l’étranger manquaient d’articles de première nécessité comme des chaussettes et des lingettes pour bébé. Lorsque M. Meek en a entendu parler, il a commencé à collecter des dons de produits de première nécessité pour les expédier aux troupes. Lui et d’autres bénévoles ont rassemblé des produits et les ont rangés dans son garage jusqu’à leur acheminement vers le front par l’escadron logistique de l’aviation maritime 49. Cette initiative a rapidement pris de l’ampleur, devenant SoldierSocks, la prochaine association à but non lucratif de M. Meek. En 2014, SoldierSocks avait livré 34.000 kg de matériel à 73 unités déployées en Afghanistan et en Irak.

De la base au sommet

Mais il est vite devenu évident que si les militaires américains avaient besoin de soutien à l’étranger, ils auraient besoin d’un soutien encore plus grand aux États-Unis, pour soigner les blessures à vie – certaines tangibles, d’autres non – infligées par la guerre. En 2013, M. Meek a rencontré le sergent Dan Rose, un vétéran paralysé de la poitrine jusqu’aux pieds suite à des blessures causées par un engin explosif improvisé. En entendant l’histoire de Dan Rose, M. Meek a été convaincu que SoldierSocks devait ajuster sa mission.

Au cours des années suivantes, SoldierSocks s’est transformé en SoldierStrong : une association à but non lucratif avant-gardiste pour les anciens combattants, qui leur propose des technologies révolutionnaires à travers tout le pays pour soigner les blessures dues aux combats.

Le premier objectif de SoldierStrong était ambitieux : permettre aux anciens combattants blessés de marcher à nouveau. Chris Meek a déniché une entreprise technologique qui, selon lui, pourrait avoir la solution : Ekso Bionics, une entreprise qui fabrique des exosquelettes robotisés permettant aux personnes paralysées de se relever et de marcher à nouveau. Dans son livre Next Steps Forward, M. Meek a écrit :

« Lorsque j’ai enfin visité Ekso Bionics, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à la franchise James Bond : des jambes et des robots s’agitaient partout, et tout cela m’a rappelé l’endroit où 007 se procure les dernières technologies d’espionnage. Avant de quitter les lieux, je me suis engagé à financer dix combinaisons Ekso. »

M. Meek a commencé à faire don de ces combinaisons, désormais baptisées « SoldierSuits », à des anciens combattants et à des établissements médicaux pour anciens combattants. À ce jour, son organisation a offert 30 combinaisons à travers les États-Unis et permis à quelque 35.000 anciens combattants paralysés ou blessés d’accéder à des traitements potentiellement transformateurs.

La transformation de SoldierSocks en SoldierStrong a entrainé celle de la vie des anciens combattants. Des hommes et des femmes qui pensaient passer le reste de leur vie enchaînés à un fauteuil roulant ont retrouvé une certaine indépendance et ont pu à nouveau regarder leurs proches dans les yeux. Un ancien combattant a accompagné sa fille jusqu’à l’autel lors de son mariage grâce à la SoldierSuit.

Les résultats de la SoldierSuit étaient presque miraculeux. Mais un monstre bien plus grand que la paralysie hantait la communauté des anciens combattants, un ennemi plus grand – que M. Meek et son équipe devaient combattre : le suicide.

Le sergent Dan Rose lance la première balle lors d’un match des Diamondbacks de l’Arizona en 2017. Suite à une rupture complète de la colonne vertébrale, il a été le premier à recevoir la tenue SoldierSuit. (Crédit photo Chris Meek)
Laura Cowen, ancienne combattante de la marine américaine (au c.), présente la SoldierSuit à l’automne 2023. (Crédit photo Chris Meek)

L’entrée du médecin

« Skip, il faut que tu voies ça. »

« Qu’est-ce que c’est ? »

« Ça s’appelle un Game Boy. »

Le Dr Albert « Skip » Rizzo a regardé par-dessus l’épaule de son patient, un homme de 22 ans victime d’un accident de voiture et souffrant d’une lésion du lobe frontal. Il l’a regardé avec stupéfaction pendant 20 minutes, assis, collé à un Game Boy, jouant à Tetris. C’était au début des années 1990, et ce petit incident a marqué pour le Dr Rizzo le début de son exploration des frontières du traitement de la santé mentale et de son interaction avec la technologie, et plus particulièrement avec les jeux vidéo.

Le Dr Rizzo était surpris par la capacité de son patient à jouer à Tetris car, comme il l’a confié à American Essence Magazine: « Il était comme un chef de guerre de Tetris, […] un jeune homme dont je n’aurais jamais imaginé qu’il puisse avoir cette capacité de planification spatiale visuelle inhérente à Tetris. Et là, il était rivé à son écran. »

Sans craindre une approche non conventionnelle, le Dr Rizzo a commencé à expérimenter l’utilisation d’un autre jeu vidéo, SimCity, en milieu clinique. Il s’agissait de « l’activité multitâche par excellence pour les fonctions [cérébrales] exécutives », a-t-il dit. Comparé aux exercices papier-crayon, ce jeu offrait aux patients un moyen bien plus agréable d’améliorer les fonctions cérébrales, souvent altérées par les accidents ou les traumatismes crâniens.

Puis, un jour, le Dr Rizzo a entendu un reportage sur la réalité virtuelle (RV) à la radio et s’est dit : « C’est parfait pour la rééducation cognitive. On peut créer des mondes, des simulations qui testent ou entraînent les gens dans leurs activités quotidiennes, mais aussi les rendre ludiques. On peut y intégrer un facteur motivationnel et donner du feedback sur les performances. »

En quelques années, le Dr Rizzo s’est retrouvé confiné dans un laboratoire de l’Université de Californie du Sud, travaillant à la création d’un programme de RV susceptible d’améliorer les capacités cognitives. Au début du projet, il allait du centre Alzheimer où il travaillait au département d’informatique et a commencé à poser des questions.

Dr Albert « Skip » Rizzo, pionnier de la thérapie par exposition à la réalité virtuelle. (Crédit photo Chris Meek)

« J’allais sur place pour embêter les gens, faire du démarchage téléphonique, frapper aux portes et leur dire : “J’ai des idées pour utiliser la réalité virtuelle en clinique dans la rééducation des personnes atteintes de lésions cérébrales.” Finalement, l’un d’eux m’a dit : “J’adore. J’ai le matériel et je peux vous trouver un étudiant diplômé pour programmer ce que vous voulez.” Et c’est à partir de là que tout a commencé. »

Les premières études sur le programme de réalité virtuelle étaient prometteuses. Elles ont montré qu’il pourrait améliorer l’interaction spatiale visuelle et d’autres capacités cognitives. Mais la véritable application révolutionnaire a été le traitement du syndrome de stress post-traumatique (SSPT) par la thérapie par exposition à la réalité virtuelle. La thérapie par exposition est une technique de thérapie comportementale qui consiste à faire revivre à plusieurs reprises une expérience traumatisante, sous la direction d’un clinicien, afin de la retraiter de manière saine et de s’en désensibiliser.

Le Dr Rizzo prépare le simulateur pour un ancien combattant se préparant à une démonstration d’immersion en réalité virtuelle. (Crédit photo Skip Rizzo)

En 2003, alors que les guerres en Irak et en Afghanistan faisaient rage, le Dr Rizzo a commencé à soupçonner que le traumatisme subi par les soldats était similaire à celui des anciens combattants du Vietnam. Il a émis l’hypothèse que la réalité virtuelle pourrait contribuer à la thérapie par exposition en offrant aux patients une expérience sensorielle réaliste, similaire à l’épisode traumatique qu’ils devaient traiter.

L’Institut des technologies créatives de l’USC (University of Southern California) s’est intéressé à l’idée du Dr Rizzo d’utiliser la réalité virtuelle pour le traitement du SSPT, et il a commencé à y développer un système appelé Full Spectrum Warrior. Différentes versions ont suivi, aboutissant finalement à un financement du Département de la Défense pour le projet. Malgré cela, le financement était insuffisant et, en 2019, Full Spectrum Warrior n’était pas encore accessible à l’ensemble de la communauté des anciens combattants.

C’est là qu’est intervenu Chris Meek.

Les patients suivent généralement une dizaine de séances de thérapie par exposition à la réalité virtuelle. (Crédit photo Chris Meek)

« Une médecine rigoureuse pour un problème complexe »

Sachant qu’à l’époque, environ 22 anciens combattants se suicidaient chaque jour, principalement à cause du syndrome de stress post-traumatique (SSPT), M. Meek était déterminé à trouver un moyen de guérir les blessures psychologiques de la guerre, tout comme il avait œuvré pour guérir les blessures physiques grâce aux SoldierSuits. M. Meek a découvert par hasard les travaux du Dr Rizzo et, en 2019, ils se sont rencontrés en personne dans ses locaux à l’USC. Un partenariat a été noué et SoldierStrong a fourni au Dr Rizzo le financement final nécessaire à la mise en service complète du système de réalité virtuelle. SoldierStrong a ensuite servi d’intermédiaire pour que le système de réalité virtuelle, désormais appelé « BraveMind », soit mis à la disposition du Département des Anciens combattants (Department of Veterans Affairs : VA) et, surtout, des anciens combattants qui en avaient le plus besoin.

M. Meek a pu constater de près l’impact de BraveMind sur les anciens combattants grâce au témoignage du Marine Chris Merkle. Après 14 ans de service dans le Corps des Marines, y compris au combat, M. Merkle souffrait de syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Il était aux prises avec de graves problèmes de colère et s’éloignait de sa famille et de ses amis. Il avait de plus en plus de mal à se concentrer et à voir les choses clairement. Sa famille avait compris qu’il était incapable de passer à autre chose après la guerre et l’avait finalement convaincu de suivre une thérapie.

M. Merkle a essayé la thérapie traditionnelle par la parole, par intermittence, pendant plusieurs mois, sans grand progrès. Finalement, son thérapeute lui a suggéré de participer à un essai du programme de thérapie par exposition à la réalité virtuelle du Dr Rizzo, et M. Merkle a accepté. Dans une conversation avec American Essence, M. Merkle a cité le Dr Rizzo : « La thérapie par la réalité virtuelle est une médecine rigoureuse pour des problèmes complexes. »

« [Le traitement] par l’exposition prolongée [consiste à] prendre une expérience [de votre passé, l’] explorer de fond en comble et vous la représenter », a expliqué M. Merkle. La réalité virtuelle ajoute une dimension supplémentaire. […] On pouvait choisir l’Irak ou l’Afghanistan avec leurs champs de bataille. On pouvait choisir de marcher, d’être dans un véhicule. […] Même à bord, choisir où vous êtes assis dans un véhicule, il existe toutes sortes de [variations]. »

Lors de sa première utilisation de la réalité virtuelle, M. Merkle a revécu sa première grande bataille en Irak. « Mon esprit visualise l’Irak. Je parle de l’Irak. Je suis assis sur une chaise qui gronde. J’ai un pistolet bleu, qui a la forme d’un fusil, mais il est bleu par sécurité, donc physiquement tactile, j’ai une arme. Et pendant que je parle, je pointe, je vise. Bon, maintenant nous traversons l’Euphrate. C’est bon. Maintenant, nous sommes touchés par des tirs d’armes légères. » L’expérience était si viscérale que M. Merkle a ressenti physiquement une grande partie du stress d’une situation de combat réelle. L’intensité de revivre ce moment a ouvert en lui des vannes depuis longtemps fermées. Comme le dit M. Merkle : « J’ai littéralement eu l’impression que quelque chose de noir sortait de moi. » Par la suite, il a parlé avec le clinicien d’expériences de guerre dont il n’avait jamais parlé à personne auparavant.

Chris Merkle, défenseur des anciens combattants, a essayé la thérapie par la réalité virtuelle après avoir servi comme Marine en Irak et en Afghanistan. (Crédit photo Chris Merkle)

Le Dr Rizzo a expliqué la science derrière BraveMind : « L’approche consiste à amener progressivement la personne à affronter et à traiter à nouveau ces souvenirs émotionnels difficiles à un rythme qu’elle peut gérer. […] En termes scientifiques, on parle d’apprentissage par extinction. Vous essayez d’éradiquer une structure de peur apprise à l’excès ou suractivée dans le cerveau. »

Les patients suivent généralement une dizaine de séances de thérapie par exposition par la réalité virtuelle, revivant l’événement à plusieurs reprises jusqu’à ce qu’il ne les affecte plus aussi fortement. Cela a été le cas pour M. Merkle. Ses traitements par la réalité virtuelle, associés à une thérapie par la parole et à un traitement connexe appelé EMDR (désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires), lui ont permis de guérir de son SSPT. Il a ensuite obtenu un doctorat en psychologie clinique et travaille aujourd’hui comme thérapeute auprès d’anciens combattants comme lui, notamment ceux qui présentent des idées suicidaires.

Sachant que, selon une étude de 2021, les militaires et anciens combattants ont quatre fois plus de risques de se suicider que de mourir au combat, le travail de M. Meek, M. Merkle et le Dr Rizzo pour lutter contre le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est crucial, voire salvateur. Plusieurs anciens combattants trouvent la thérapie par réalité virtuelle plus attrayante que la thérapie par la parole traditionnelle. Comme le dit M. Meek : « Ils ne veulent pas rester allongés sur le canapé à parler à leur psychiatre. Ils vont aller au bar, se saouler et oublier. Mais comme la génération post-11 septembre est avant tout une génération de joueurs, la réalité virtuelle contribue à réduire cette stigmatisation, et on constate donc une augmentation de son utilisation d’environ 35 à 40 %, je crois. »

Le partenariat entre le Dr Rizzo et Chris Meek s’apparente à une collaboration entre Tony Stark et Thomas Wayne, associant innovation technologique et vaste dispositif caritatif. Il a considérablement accru l’influence positive de SoldierStrong sur la communauté des anciens combattants. SoldierStrong a été une force motrice dans la mise à jour et la modernisation du ministère des Anciens Combattants afin de répondre aux besoins des anciens combattants du 21e siècle, avec leur ensemble de défis particuliers, en utilisant des solutions novatrices qui n’étaient pas disponibles il y a seulement 20 ans.

Nous nous souvenons

Les expériences de Chris Meek le 11 septembre l’ont placé sur une voie qui a amélioré la vie de milliers de personnes. Il garde ses chaussures sales pour se souvenir de ce jour et des sacrifices consentis par les héros américains ce jour-là et par la suite. Il ne veut pas que d’autres oublient ces sacrifices non plus.

M. Meek conserve les chaussures qu’il portait le 11 septembre en souvenir de ceux qui sont morts ce jour-là, ainsi que des sacrifices consentis par ceux qui servent leur pays. (Crédit photo Chris Meek)

Ne se reposant jamais sur ses lauriers, M. Meek prépare actuellement la 25e commémoration annuelle des attentats du 11 septembre en réalisant un documentaire et en créant la 9/11 Legacy Foundation, une organisation vouée à préserver le souvenir de tout l’héroïsme associé à cette journée. Lancée en mars 2025, sa mission est de commémorer les disparus et de sensibiliser le public à l’importance de cet événement et à son influence durable sur la nation. Son slogan est « Nous nous souvenons », et son comité d’organisation comprend des personnalités importantes ayant participé à la réponse aux attentats, comme Andrew Card, ancien chef de cabinet du président George W. Bush ; Joe Allbaugh, ancien directeur de la FEMA (Agence fédérale de gestion des situations d’urgence) ; et l’ancien secrétaire à la Défense Leon Panetta, qui dirigeait la CIA lors de la chute de Ben Laden.

M. Meek espère que grâce à des initiatives comme la 9/11 Legacy Foundation et ses autres projets, il pourra contribuer à aplanir certaines divisions au sein de la société américaine. « J’essaie de contribuer à maintenir la cohésion et à apporter une lumière positive à la société américaine et non à la diviser », a-t-il souligné.

L’œuvre de M. Meek a débuté modestement. « Rien de tout cela n’était planifié. C’était une idée potentiellement mauvaise autour d’un cocktail ou d’une bière, et puis on s’est dit : ‘Ouais, tu sais quoi ? Pourquoi pas ?’ »

Mais c’est ce que font les Américains : nous considérons les crises comme des opportunités et nous réagissons avec spontanéité, créativité et courage. Le 11 septembre a été une tragédie qui a changé la vie de Chris Meek, mais ce changement a, à son tour, changé celle d’innombrables autres personnes. Même la tragédie peut se transformer en triomphe.

Dans l’un de ses livres, Everyday Triumph, qui explore les histoires de personnes ayant accompli des exploits extraordinaires, M. Meek commente ce thème :

« Combien de fois avons-nous entendu dire que les Américains adorent les actions de seconde intention ? Nous souvenons-nous du coureur qui tombe, se relève et termine deuxième ? Non. Nous encourageons plutôt le concurrent tombé qui se relève et dépasse tous les autres coureurs pour remporter la course. »

D’une certaine manière, ce n’est pas une mauvaise description de ce que M. Meek a fait après le 11 septembre. Il a transformé une expérience traumatisante en moteur de charité et de compassion envers autrui.

« Je ne sais pas quelle est la véritable définition d’un héros », a dit M. Meek à American Essence. « C’est quelqu’un qui se surpasse. Il fait quelque chose qui n’est pas dans ses habitudes, et cela peut être aussi simple qu’apporter un déjeuner à un enfant à l’école qui n’a rien à manger. » Ou, pourrions-nous ajouter, tendre une limonade bien fraîche à un garde national qui montait la garde sur le lieu d’une tragédie nationale, comme l’a fait M. Meek.

Le chemin vers l’héroïsme, comme celui vers la guérison, commence par un seul et simple pas. Selon les propres mots de Chris Meek : « Les petits gestes de gentillesse mènent à de grands résultats. » L’histoire de M. Meek prouve la véracité de ses propos.

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.