Les accords de libre-échange ont fait l’objet de nombreuses critiques lors de la mobilisation des agriculteurs en France. Ils sont régulièrement pointés du doigt pour leur responsabilité dans la concurrence déloyale qui s’instaure entre les différentes parties signataires des traités. Pour autant, l’Union européenne n’a pas l’intention de changer de cap et continue d’en signer avec d’autres États. En janvier, les députés européens validaient un nouvel accord de libre-échange entre l’UE et le Chili. Que contient exactement ce nouveau traité ?
Un renforcement des liens UE-Chili
Le 24 janvier 2024, les députés européens ont voté massivement en faveur de la ratification d’un nouveau traité avec le Chili. Ce vote intervient plus d’un mois après les décisions adoptées par le Conseil et la signature de l’accord entre l’exécutif européen et l’État d’Amérique latine.
Ce traité, visant à moderniser celui déjà en vigueur depuis 2003 et à « renforcer les relations politiques et économiques entre les deux pays » est en réalité divisé en deux parties : un accord cadre-avancé, couvrant, selon le Conseil de l’UE, la « coopération dans des domaines tels que la santé, l’environnement, le changement climatique, la gouvernance des océans, l’énergie, la fiscalité, l’éducation et la culture, le travail, l’emploi et les affaires sociales, les sciences et la technologie et les transports » mais également « la coopération juridique » ; et un accord commercial intérimaire, qui a pour but de supprimer les droits de douanes pour « environ 99,9 % des exportations de l’UE » et d’augmenter « les exportations européennes vers le Chili d’environ 4,5 milliards d’euros ». Cette nouvelle étape de la coopération entre Bruxelles et Santiago de Chile arrive dans un contexte de « boom » des échanges entre l’Europe et le Chili, qui ont augmenté de 163 % depuis 2002.
Des métaux pour la transition énergétique européenne ?
Derrière ce nouvel accord et le « renforcement » des liens entre l’UE et le pays d’Amérique du Sud se cache également une autre réalité, liée à la transition énergétique européenne. En février 2023, le Parlement européen se prononçait en faveur de la fin des moteurs thermiques sur le vieux continent d’ici à 2035 pour les remplacer par des moteurs électriques, poussant ainsi Bruxelles à devoir chercher des solutions d’approvisionnement en métaux nécessaires à la fabrication de batteries de véhicules électriques, à savoir le cuivre et le lithium.
Il se trouve que le Chili est le deuxième producteur mondial de lithium avec 39 000 tonnes produites en 2022 et que l’Europe entend en tirer profit. D’ailleurs, la désormais ex-présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne l’avait précisé dans un communiqué de presse publié le 4 décembre. « L’accord permettra un meilleur accès aux matières premières et aux combustibles propres comme le lithium, le cuivre et l’hydrogène, qui sont essentiels pour la transition vers une économie verte », était-il précisé.
Un accord pouvant impacter le monde agricole
Ce partenariat commercial pourrait se faire au détriment de l’agriculture européenne et surtout de l’agriculture française avec un « deal » d’exportations de métaux rares contre des achats de produits agricoles chiliens. En marge du vote des parlementaires européens le 24 janvier au sein de la Commission du commerce international (INTA) en faveur de ce nouvel accord de libre-échange, le député Identité et Démocratie Thierry Mariani expliquait que « 95 % des échanges avec le Chili se feront sans droits de douanes », avant d’ajouter « qu’en matière agricole c’est 18.000 tonnes de volailles en plus, 9.000 tonnes de viande porcine en plus, 4.000 tonnes pour la viande bovine, sans compter l’huile d’olive, les œufs, les dérivés de l’amidon etc. ».
Les paysans français, qui ont manifesté pendant des semaines contre certains traités de libre-échange, en particulier ceux signés avec les pays du Mercosur et la Nouvelle-Zélande ne vont très certainement pas être satisfaits par celui en cours de préparation avec le Chili.
« Avec ce nouvel accord, on est toujours dans ce même créneau qui consiste à utiliser l’agriculture comme une monnaie d’échange pour des intérêts stratégiques, énergétiques ou autres qui n’ont rien à voir avec l’agriculture. Je voudrais aussi souligner qu’il y a un énorme projet dans le département de l’Allier, la plus grosse ressource européennes de métaux rares pour fabriquer des batteries électriques. L’État français devrait accélérer les procédures administratives au lieu d’aller chercher ces métaux à 20 000 km », s’indigne Jean-Guillaume Hannequin, président de la FDSEA de la Meuse et agriculteur contacté par Epoch Times.
La France a récemment dit non à l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur pour essayer d’apaiser la colère des agriculteurs, mais ne s’est toujours pas prononcée sur le traité UE-Chili, et nombre de paysans français voient en cet accord un nouveau Mercosur, bien que le pays actuellement dirigé par Gabriel Boric ne fait pas partie de l’alliance économique sud-américaine.
« Tout ça, c’est du petit Mercosur en catimini qui rend bien service à monsieur Macron qui a décidé de nous faire tous rouler en voiture électrique, alors qu’à peine 20 % des Français peuvent s’acheter ce genre de véhicules », ajoute l’agriculteur de la Meuse.
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