Le pionnier suédois des batteries électriques Northvolt s’est déclaré en faillite le 12 mars, jetant un froid sur le secteur européen des accumulateurs pour voitures électriques.
Ce fournisseur de Volvo et Volkswagen, qui constituait la plus grande initiative européenne dans ce secteur stratégique, était en difficulté à cause de retards dans sa production mais aussi du ralentissement du marché des voitures électriques en Europe.
Les coûts de production en Europe sont environ 50 % plus élevés qu’en Chine du fait du prix de l’énergie et des réglementations. La chaîne d’approvisionnement liée aux batteries reste aussi relativement faible et le secteur manque de salariés qualifiés, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Dans l’objectif de la neutralité carbone en 2050 et de la fin des voitures thermiques en 2035, l’Europe, qui ne représente que 3 % de la production mondiale de cellules de batterie, visait 25 % du marché d’ici la fin de la décennie.
La faillite du fabricant suédois de batteries Northvolt
Le fabricant suédois de batteries électriques Northvolt s’est déclaré en faillite le 12 mars. Cela sonne un échec retentissant pour l’industrie européenne des batteries très dépendante de l’Asie. Le groupe suédois employait encore quelque 5000 salariés.
Les deux principaux actionnaires étaient le constructeur automobile allemand Volkswagen, lui-même en difficulté financière, et la banque d’affaires américaine Goldman Sachs.
Northvolt s’était placé en novembre sous la protection de la loi américaine sur les faillites pour tenter de trouver de nouveaux investisseurs. « Tout au long de ces quatre derniers mois […], nous avons mené des efforts considérables pour restructurer financièrement l’entreprise, notamment en sollicitant un large éventail d’investisseurs potentiels, dans l’objectif de garantir un avenir stable à l’entreprise », a déclaré Tom Johnstone, le président par intérim du conseil d’administration de Northvolt, lors d’un point presse.
La faillite de l’entreprise est l’une des plus grosses de l’histoire contemporaine de la Suède. « Cette décision représente la seule issue réaliste », a ajouté le président par intérim. « Nous sommes désolés » que ce soit la fin, a-t-il dit à l’adresse des employés.
« Comme de nombreuses entreprises du secteur des batteries, Northvolt a été confronté ces derniers mois à une série de défis cumulés qui ont affaibli sa situation financière, notamment la hausse des coûts du capital, l’instabilité géopolitique, des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement et les évolutions de la demande du marché », a expliqué la société.
« Il reste essentiel que l’Europe dispose d’une industrie des batteries, mais la construction d’une telle industrie est un marathon. Elle nécessite de la patience et un engagement à long terme de la part de toutes les parties prenantes », a expliqué Tom Johnstone.
Un vent glacial souffle sur la batterie européenne
Fondé en 2016, Northvolt était considéré comme l’un des grands espoirs européens en matière de batteries, au moment où l’Europe cherche à rattraper son retard face aux géants asiatiques, chinois (CATL, BYD) et coréen (LG).
Alors que plusieurs dizaines d’usines de batteries sont en projet à travers l’Europe, d’autres fabricants revoient leurs ambitions à la baisse. La rentabilité de ces projets pharaoniques reste incertaine, note l’AIE.
« La faillite de Northvolt souligne les difficultés de la concurrence avec les producteurs asiatiques, les plus petits fabricants peinant à augmenter la production et à atteindre des rendements suffisants », expliquait l’organisation internationale dans un rapport début mars.
La demande des consommateurs européens pour les voitures électriques complique aussi les choix des industriels : les ventes de ces véhicules décollent moins vite que prévu et ne représentent encore que 15 % du marché européen.
Cette baisse des ventes de voitures électriques est notamment due à la baisse des subventions publiques dans certains pays, à des infrastructures de recharge insuffisantes, mais aussi à la venue de normes plus sévères d’émissions de CO2, attendues en 2025. La récente annonce d’un assouplissement des règles n’aura pas suffit pour sauver le groupe suédois.
Des dizaines de projets d’usines ont été annoncés en Europe, mais plusieurs ont déjà été annulés.
Au Royaume-Uni, la société Britishvolt avait fait faillite début 2023 avant de parvenir à lancer son énorme usine de batteries, faute d’avoir levé suffisamment de fonds.
Début 2024, le fabricant chinois Svolt a également annoncé qu’il renonçait à sa deuxième usine européenne en Allemagne à cause d’oppositions locales et après le retrait d’une commande importante.
Fort recul du marché européen des voitures électriques
Après quelques années de progression, les ventes de voitures électriques ont subi un fort recul en 2024. Les immatriculations ont reculé en Allemagne, en France, en Espagne, en Italie et en Suède. Le leader du secteur, Tesla, a vu ses ventes reculer de 43,2 % sur un an.
Sur ce marché en repli, les voitures hybrides (avec un moteur électrique, mais que l’on ne doit pas brancher pour les recharger) sont les seules à progresser en août (+6,6 %), à plus de 200.000 unités. Elles représentent désormais presque un tiers du marché (31,3 %), contre 24 % en août 2023. Les modèles hybrides rechargeables (avec une batterie électrique qu’il faut brancher) ont aussi reculé (-22,3 %) sur la plupart de leurs marchés et représentent 7,1 % des immatriculations.
Les voitures à essence ont baissé de 17,1 % sur un an, mais dominent toujours le marché de quelques calandres, avec 33,1 % des immatriculations. Les ventes de modèles diesel sont en chute libre sur la plupart des marchés européens (-26,4 %) et représentent 11,2 % du marché.
Un temps pionnier de l’électrique, le groupe Renault affiche maintenant un faible taux de véhicules à batterie dans ses ventes. Le numéro 1 européen, l’allemand Volkswagen a, de son côté, enchaîné les déboires avec ses modèles électriques, et a annoncé fin 2024 un plan d’économies drastique.
Selon le groupe de réflexion T&E (Transport et Environnement), au moins 100 gigawattheures de capacité de production de batteries prévus en Europe ont été annulés en 2024 « en raison des difficultés des producteurs européens à lutter contre la concurrence mondiale, contre les subventions accordées ailleurs et contre l’absence de règles équitables ».
Une question stratégique sur laquelle l’Europe est en retard
Il s’agit pourtant d’une question stratégique pour l’UE, qui veut briser le quasi-monopole asiatique (Chine, Corée du Sud, Japon) sur la fabrication de batteries électriques.
La Chine, premier marché mondial de la voiture électrique, produit actuellement plus des trois quarts des batteries vendues dans le monde. Et les prix y ont chuté de plus de 30 % au cours de la seule année 2024, précipitant aussi à la baisse les tarifs de fabrication des voitures électriques.
En France, le fabricant ACC (coentreprise de Stellantis, Mercedes et TotalEnergies) a ouvert sa première usine de batteries en mai 2023 à Douvrin (nord). Mais deux autres usines prévues à Termoli en Italie et Kaiserslautern en Allemagne ont été mises en pause. L’usine de Douvrin produit actuellement des batteries lithium-ion NMC (nickel-manganèse-cobalt) qui équipent notamment les SUV Peugeot 3008.
Stellantis a choisi de lancer la construction en Espagne d’une usine de batteries LFP détenue à 50/50 avec le géant chinois du secteur, CATL. L’usine de Termoli en Italie, de son côté, a annoncé qu’elle allait se tourner pour le moment vers la production de transmissions pour voitures hybrides.
Pour profiter du savoir-faire asiatique, la plupart des projets européens de gigafactories ont été conçus avec l’aide d’entreprises chinoises et coréennes.
Dans un plan pour l’industrie automobile annoncé début mars, la Commission a déclaré qu’elle étudiait la possibilité de soutenir financièrement la production de batteries dans l’UE et d’introduire des obligations de contenu local. « Mais c’est trop peu et trop tard », selon T&E.
Pour l’AIE, si elle veut réussir, l’Europe doit d’abord s’assurer d’une forte demande pour les batteries électriques (et donc pour les voitures) « pour donner aux fabricants le temps de perfectionner les processus de production et de développer des écosystèmes industriels régionaux solides ».
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