Il visait une passe de cinq inédite. Après 80 jours en mer, le skipper Arnaud Boissières (La Mie Câline) a démâté à 2.500 milles de la ligne d’arrivée du Vendée Globe avant d’annoncer son abandon lundi non sans avoir « tout essayé » pour continuer.
En direction des Antilles, le seul marin à avoir terminé quatre tours du monde à la suite (7e en 2009, 8e en 2013, 10e en 2017, 15e en 2021) est revenu mercredi auprès de l’AFP sur cette fin de périple qui lui laisse « un sacré goût d’inachevé ».
QUESTION : Vous avec mis plusieurs jours à officialiser votre abandon. À quel moment avez-vous compris que poursuivre n’était plus une option ?
Arnaud Boissières : « Ce n’est jamais un truc évident à dire… cela s’est fait en plusieurs temps. Il y a d’abord eu le démâtage (jeudi 30 janvier, ndlr), mais je gardais espoir d’avancer. Je me suis libéré de ce qui pouvait être dangereux sur le bateau et j’ai ensuite installé une aile de kite pour continuer d’avancer car il n’y a rien de pire qu’un bateau balloté. Cela m’a donné le temps d’établir un gréement de fortune. J’ai notamment taillé dans un morceau de voile qui me restait. Je voulais continuer à faire du nord. Mais cela n’a pas marché, il me fallait un peu plus de taille de mât…. j’ai tout essayé pour y arriver ».
Vous avez encore une bonne semaine de navigation avant d’arriver aux Antilles, quel est votre état d’esprit actuellement ?
« J’ai du mal à encaisser. Je suis un peu rassuré au niveau du danger car j’ai pu mettre une antenne en haut de mon gréement de fortune et avoir un contact avec un cargo à proximité. C’est super important : j’ai eu la confirmation que j’étais visible, je ne voulais absolument pas être un risque pour autrui. Sur le plan émotionnel, j’ai forcément pleuré au moment de déclarer l’abandon. J’en avais fait quatre et j’en avais fini quatre. La je n’étais pas loin d’arriver, j’avais fait 80% du chemin. J’ai beaucoup d’amertume et un sacré goût d’inachevé ».
Vous tirez tout de même des enseignements de ce 5e tour du monde qui ne se termine pas comme vous l’auriez souhaité ?
« Que rien n’est jamais acquis en mer. Cela valorise les quatre Vendée Globe d’avant, tout ce parcours où j’ai réussi à enchaîner. Les avaries n’arrivent pas qu’aux autres. Même avec la meilleure préparation possible, on peut subir un coup du sort. Je ne sais toujours pas pourquoi j’ai démâté. C’est d’autant plus difficile à encaisser que mes proches et mes partenaires commençaient à arriver aux Sables-d’Olonne pour l’arrivée, je commençais à me projeter. C’est une grosse piqûre de rappel ».
Quelle est la suite pour vous à ce stade ?
« Mon premier défi est d’arriver aux Antilles dans de bonnes conditions car j’ai encore du chemin. J’ai les alizés qui me portent actuellement et l’océan qui me console dans ma peine. Mon équipe technique prépare tout pour réarmer le bateau rapidement là-bas et qu’il soit de nouveau navigable en compétition. Ce qui est certain c’est que je serai sur la Transat Jacques Vabre (en novembre prochain, ndlr). Pour un 6e Vendée, je ne suis pas seul décisionnaire. En tout cas j’y réfléchissais déjà avant de partir et avec ce goût d’inachevé, forcément j’y pense. Mais je tiens d’abord à retrouver ma famille, mes partenaires et mes proches pour décider. Cette grosse avarie est un traumatisme pour tout le monde ».
Propos recueillis par François d’Astier.
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