New York – Les civilisations se succèdent au fil des millénaires sur les ruines du passé. Puis la nature reprend ses droits. La végétation pousse entre les morceaux éparses, réminiscences de cultures oubliées. C’est le thème que le dessinateur et peintre Anthony Baus a choisi pour son travail. Au premier coup d’œil, ses œuvres à l’encre et au lavis évoquent les images de la Grèce antique ou de Rome, ou quelque chose d’une œuvre de Tiepolo, éclatante de solennité et de drames. Mais en y regardant de plus près, on remarque soudain un gratte-ciel de Manhattan, ou la Fontaine de Bethesda de Central Park, ou un vélo dans une scène qui semble pourtant d’un temps antérieur à son invention. De son travail émane quelque chose d’ancien, mais pas nécessairement nostalgique.
« On peut se demander : à quoi ressemble un dessin d’aujourd’hui ? », questionne Blaus dans son studio du Grand Central Atelier (GCA), où il enseigne le dessin et la perspective. « Je ne veux pas faire quelque chose qui a déjà été fait, ou qui est typique d’une certaine période, mais je trouve important d’explorer le langage existant de l’art », a-t-il ajouté.
Pourtant le style artistique de Baus est révolutionnairement traditionnel. Mis à part les nombreuses œuvres de maîtres qu’il a copiées durant son entraînement, il semble savoir intuitivement que nous ne pouvons pas échapper au temps dans lequel nous vivons, pas plus que nous ne pouvons sortir de notre propre peau.
Baus a grandi dans l’État du Wisconsin. Il a montré un intérêt pour l’art dès le plus jeune âge, dessinant constamment des cartoons et d’autres sujets qui attisaient son intérêt. Il a obtenu le BFA (idiplôme des beaux-arts) de l’université du Wisconsin-Milwaukee, où il n’y avait pas de cursus des arts classiques et réalistes. Ce n’est que plus tard, de façon contournée, qu’il a commencé à répondre à l’appel artistique.
Pendant environ trois ans, il a travaillé pour une société de sauvetage, Urban Remains (Restes Urbains), avec Eric Nordstrum, qui a également fondé le musée BLDG 51 à Chicago. À cette époque, Baus observait les ruines, se rendant sur des sites d’immeubles sur le point d’être démolis. Il sauvait les artefacts d’ornementations architecturales, les antiquités et autres restes artistiques présents dans les vieilles maisons, commerces, anciens théâtres et cinémas du début du 20e siècle.
Ces artefacts ont finis par attiser sa curiosité pour l’histoire de l’art. « Je ne pouvais pas vous dire avant qui avait peint la Chapelle Sixtine », a-t-il dit. « Je connaissais quelques noms célèbres, comme Michel-Ange, Raphaël, mais je n’aurais pas pu vous dire ce qu’ils avaient fait. »
Par la suite, alors qu’il étudiait au GCA, il a été influencé par trois de ses collègues – Victor Chong, Abigail Tulis et David Troncoso. « Ils lisaient des livres sur des peintres de la Renaissance que j’ai trouvé fascinants. Je regardais toujours par dessus leur épaule », explique Baus.
J’utilise mon imagination, mais également les conventions.
— Anthony Baus
Il a commencé ses recherches de racines profondes pour trouver du sens et des réponses au travers de son art. Comme dans une machine à voyager dans le temps, plus il étudiait le passé, plus il essayait de découvrir l’influence d’artistes antérieurs.
« Il y a quelque chose que l’on peut obtenir en contemplant une ancienne pièce de maître – en s’asseyant devant, en la fixant et en y revenant plus tard. Je ne l’ai pas encore trouvé exactement, mais il y a toujours un sens caché, une narration ou un aspect technique que je veux étudier », explique Baus.
Des ancres pour l’imagination
Baus s’est mis graduellement à assembler les pièces ensemble, « un peu comme un scientifique fou », dit-il. C’est un procédé vivant de création d’indices visuels et narratifs – un théâtre entier de son monde intérieur, reflétant ses découvertes aux lignes fluides et aux contours sans efforts. Il faut un niveau de compétences plus élevé pour inventer une scène et la dessiner ou la peindre de façon réaliste.
« J’utilise mon imagination, mais j’utilise aussi les conventions », dit Baus. « C’est toujours utile de pouvoir créer un espace hautement crédible où les objets ont un poids et subissent la gravité. En connaissant la perspective, vous avez accès à une grande malléabilité… Cela vous donne plus de liberté parce qu’alors vous n’êtes plus contraints de représenter les choses telles que vous les voyez. »
Il compose son répertoire en peignant directement à partir de modèles vivants au GCA, en copiant les chefs d’œuvres anciens ou en dessinant ou peignant à partir de moulages réalisés au 19e siècle de pièces de l’antiquité, à l’Institut d’architecture classique et des arts de Midtown.
Son comportement d’ordinaire calme laisse la place à des conversations animées quand il explique le sens de ses dessins. L’un deux, intitulé « The Allegory of Nature and Artifice », montre un personnage sur le côté droit, tirant un rideau pour révéler un paysage qui rappelle à l’artiste, dos au paysage, de se tourner vers la nature pour son inspiration. Alors que l’artiste commence à regarder la nature, le personnage tout à gauche, représentant les artifices, allongé sur le sol et appuyé sur une camera oscura, « commence à perdre de sa vigueur, comme s’il n’avait pas mangé depuis des jours, il est comme délaissé là, dans le coin », explique Anthonu Baus.
« Mon parti pris sur l’histoire peut sembler évident. Je me range avec ces deux-là ici », dit-il en montrant les personnages représentant l’art et la nature.
Anthony Baus a ensuite révélé ses recherches d’encre et de lavis pour un projet de peinture plus grande, dépeignant deux versions différentes de la rencontre du peintre du 13e siècle Giotto avec son professeur, Cimabue.
« J’aime bien penser à Giotto comme à un ancêtre. Si je suis peintre, je devrais savoir ce que les peintres avant moi ont fait et pourquoi ils l’ont fait», a-t-il expliqué. « Beaucoup de gens de connaissent pas Giotto, seulement à travers les personnes célèbres qui sont arrivés après lui dans la Renaissance. » Baus a pensé que ce serait un exemple parfait de quelque chose qu’il pourrait représenter pour enseigner à son public, pour montrer le premier artiste qui a travaillé à la transition vers le tout début de la Renaissance.
Une version montre une histoire directe de Giotto en jeune berger, dessinant son mouton sur un rocher, alors que Cimabue passant par inadvertance, découve son futur apprenti qui bientôt le surpasserait. Dans la seconde version, Baus montre Giotto également en train de peintre sur un rocher, mais assis sur un nuage, suspendu dans les airs par quelques chérubins. En comparant les deux versions, Baus trouve que celle avec les angelots est plus drôle et stimulante. Il demande souvent l’avis de ses collègues ou de ses étudiants au GCA pour décider auxquelles de ses œuvres il se consacrera pour des agrandissements.
L’histoire dicte la composition. « Elle me donne une raison d’associer ces choses ensemble ; c’est une façon de m’éduquer et le moyen de partager ces histoires avec d’autres personnes, quand elles regardent mes dessins ou mes peintures. C’est là que mon travail est vraiment achevé… c’est ça la véritable expérience », confie Baus.
Il y a toujours un sens caché, une narration ou un aspect technique que je veux étudier.
— Anthony Baus
Il a poursuivit en expliquant les détails élaborés pour embellir un dessins qu’il a commencé à Rome durant l’été, de Santa Maria Maggiore (connue auparavant comme « Notre-Dame des Neiges »), qu’il finissait dans son studio. Cela inclus quatre chandeliers, pour rappeler que l’église a été construite au quatrième siècle, un cinquième pour lui rappeler qu’elle a brûlée et été reconstruite au cinquième siècle, des personnages ressemblant à des bandits, des pièces de bois de la crèche de Jésus, quelques dévots, un cadavre que l’on apporte dans l’église et une série d’autres détails qui forment ensemble une collection d’anecdotes légendaires – le tout sur un seul morceau de papier. Ils entraînent nos yeux à se déplacer, réveillant notre curiosité et notre imagination.
Trouver des histoires populaires
À un certain moment de l’histoire, quand tout se passe dans le monde de l’art, un des plus gros défi de Baus est de décider du sujet et de l’histoire qu’il veut raconter. Dans le passé, quand l’art religieux prévalait, les artistes avaient déjà un répertoire prédéterminé sur lequel se concentrer, représentant par exemple, la sainte famille en Occident, les Bouddhas, les Taos et les Divinités en Orient.
Aujourd’hui il est plus difficile de trouver un thème qui parlera à différent types de personnes. Baus s’est demandé : « Quelles sont les histoires auxquelles la majorité des gens va s’identifier et qu’elle va apprécier ?… Ce serait bien de pouvoir toucher plus de personnes », a-t-il dit sur un ton songeur.
L’une des plus ancienne pièce de maître qu’il a découverte était la fresque de Raphaël, « L’école d’Athènes » parce que « c’est l’un des ‘‘plus grands tubes’’ de la peinture », a-t-il dit.
Il veux faire plus de d’oeuvres publiques et a commencé ses réflexions sur ce sujet – peut-être quelque chose dans le genre des grandes fresques de Raphaël ou quelque chose comme un plafond de Tiepolo, qui étaient très populaire au temps de la Renaissance, mais qui soit pertinent aujourd’hui.
« J’ai réfléchi sur la place de la peinture dans l’architecture et où trouve-t-on cette relation entre ces deux arts aujourd’hui », confie-t-il. Quand il va au Met ou à la Bibliothèque de New York sur la Cinquième avenue, il voit un grand potentiel sur les espaces muraux dans le design architectural qui seraient adaptés pour des grandes fresques, pour un public large. Il a aussi laissé entendre que cela demanderait beaucoup plus de travail et de patience de réaliser le projet de ses rêves d’une grande peinture dans un espace public.
Version anglaise : Artist Anthony Baus Time Travels to the Source
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