L’École normale supérieure (ENS) est l’une des institutions universitaires les plus prestigieuses et les plus sélectives de France. Voulu par Napoléon pour former à l’art d’enseigner les lettres et les sciences, ce « pensionnat normal » perd cependant de sa superbe à mesure que les dérives woke se multipliant en son sein éclatent au grand jour. Écriture inclusive, colloques en non-mixité, spectacles de drag queen, terreur idéologique… L’ENS s’est transformé en véritable camp d’endoctrinement à la merci d’une minorité active d’étudiants d’extrême gauche et d’une administration complaisante. De quoi inquiéter : hauts fonctionnaires, chercheurs ou encore professeurs, de cet établissement sortent les élites françaises de demain.
« Ces gens sont formés par et pour l’État, mais ils lui crachent dessus »
Dernier évènement en date à avoir fait parler de lui : une déconcertante « Woke Party » organisée par les associations LGBTQ+, féministes et écolos sur le campus de Paris-Saclay pour lancer la rentrée de septembre 2023. « Ils ont projeté sur les murs des symboles anarchistes, inscrit sur des pancartes des slogans tels que : « Macron décapitation », « Si tu es contre l’abaya, tu es raciste ». On a entendu de joyeux drilles répéter: « Tout le monde déteste la police ! »», rapporte un étudiant, Adrien, au Figaro, qui ne masque pas son exaspération : « C’était quelque peu inattendu dans une institution comme l’ENS, supposée former de futurs serviteurs de l’État, garants des valeurs républicaines et de la laïcité. On a atteint, là, le comble du ridicule : ces gens sont formés par et pour l’État, mais ils le piétinent, le méprisent et lui crachent dessus ».
Rappelons que tout au long de leur scolarité, les étudiants bénéficient d’un statut de fonctionnaires stagiaires et touchent un salaire de près de 1300 euros nets.
Issu d’une famille favorisée, Adrien a rejoint la prestigieuse école avec la volonté d’œuvrer au service du bien public, mais il se retrouve à côtoyer des élèves bien loin de cet état d’esprit. Venant « de milieux très privilégiés », « ces gens sont surtout obnubilés par eux-mêmes » et « se passionnent pour Jean-Luc Mélenchon qui exècre pourtant ce qu’ils sont » : « Je m’interroge sur la mission des hauts fonctionnaires qu’ils seront demain », s’inquiète-t-il.
Également confrontée au quotidien à ses camarades woke, Julia, inscrite à l’ENS et interrogée par Le Figaro, a l’impression d’avoir en face d’elle des « membres de politbureau » qui « décrètent, interdisent, jugent et décident pour les autres ce qui est bien ou mal, interdit ou toléré ». Lors de la Woke Party, un de ses amis a été agressé physiquement après avoir fait part de son intérêt pour la campagne d’Éric Zemmour. Une autre fois, en cours, des professeurs ont été pris à partie car ils ont osé appeler une élève « mademoiselle ». L’année dernière, une association d’élèves a même tenté de faire interdire certains couloirs de l’école aux hommes « cisgenres » – comprenez, aux hommes « qui se sentent hommes », l’épithète de « cisgenre » étant, dans le langage woke, accolée au mot « homme », qui ne renseigne plus suffisamment sur l’identité de la personne dont on parle.
Au programme donc, le retour de la non-mixité pour préserver les femmes, et les minorités, dites vulnérables, de potentielles violences sexistes… « Il ne faut pas exclure la possibilité que tous les hommes soient des violeurs », affirmait alors, tout en nuances, une étudiante, quand une autre martelait que « l’ENS, en tant qu’institution, a le devoir de donner à ceux qui le souhaitent une chambre en non-mixité ». Finalement, la mesure de séparation a été rejetée par 66% des élèves.
Ces dérives choquent-elles la direction de l’établissement ? Pas vraiment. « Notre école cultive la liberté de parole et l’inclusivité, qui ne tolère aucune forme de violence. La présidence est informée de la vie étudiante et des activités du BDE, qui s’inscrivent dans le respect des valeurs de l’ENS. Toute dérive individuelle est immédiatement traitée », répond-elle, laconiquement, au Figaro.
« Si on n’est pas à l’aise avec les drags show, ou le fait de dire “iel“ à tout le monde, on est vite mal à l’aise nulle part »
Le campus de Paris-Saclay n’est pas seul en proie à ces inquiétantes bizarreries progressistes. Auprès de Valeurs Actuelles, Léa, une étudiante inscrite à l’ENS Lyon de 2018 à 2022, décrit un climat idéologique « oppressant au quotidien ».
Dès le jour de l’inscription, l’accueil des étudiants était pris en charge par une personne habillée… en drag queen. À peine trois semaines après avoir démarré son cursus, la jeune femme a rapidement compris que la vie de l’école serait « invivable » : « Si on n’est pas à l’aise avec les drags show, ou le fait de dire “iel“ à tout le monde, on est vite mal à l’aise nulle part […] Il faut s’extraire de la vie de l’école. On a besoin d’aller respirer ailleurs car c’est tellement oppressant au quotidien », relate-t-elle.
Campagnes de sensibilisation à la violence des LGBTQ+ en permanence, diabolisation du capitalisme, organisation de drag shows dans les locaux de l’école, réhabilitation de la figure de la sorcière par l’association féministe de l’école… « une pression idéologique permanente, une forme de marteau thérapie pour rentrer dans les cases ».
La direction se mêle également des choix intimes de ses étudiants. Une jeune femme qui devait se marier a demandé à décaler sa date de début de stage, qui a été fixée à la dernière minute, pour des raisons administratives, le jour de son mariage prévu depuis un long moment. Convoquée dans le bureau de la direction, cette dernière a reçu une fin de non-recevoir : « On lui a expliqué qu’on ne s’était pas battu pour le droit des femmes pour qu’elle se marie à 23 ans et qu’ils feraient en sorte que ça ne se produise pas », raconte Léa.
Normale sup accusée de « préférence islamique »
En 2020, l’ENS Lyon a banni l’aumônerie catholique et, « au moment de cette interdiction, des élèves ont eu de grosses pressions à cause des positions de l’Église sur l’avortement et se sont retrouvés dans le bureau de la direction ». Ironiquement, l’établissement a toutefois accueilli en son sein une association religieuse islamique, l’association musulmane de l’ENS Lyon (AMENS), à la rentrée de septembre 2022. Si bien que des élus de la région Auvergne Rhône-Alpes avait dénoncé une « préférence islamique ».
À Paris, une figure de la vie intellectuelle française a fait les frais de cette conquête idéologique woke. Titulaire de la chaire Moyen-Orient Méditerranée à l’École Normale Supérieure, Gilles Kepel, islamologue de renom, a brusquement été mis à la porte en décembre dernier sans autre forme d’explication que la suppression pure et simple de son master. « Depuis plusieurs années, je suis confronté à la déferlante de la religion woke à l’Université. C’est au nom de cette idéologie que je suis poussé dehors. Mon enseignement devait initialement se poursuivre deux ans encore, jusqu’à ma retraite, mais les autorités universitaires ont décidé de précipiter les choses : le master a été subrepticement fermé, et ma chaire cesse d’être financée à Noël », raconte-t-il au JDD.
Pour Xavier-Laurent Salvador, universitaire et cofondateur de l’Observatoire du décolonialisme, cet épisode traduit la volonté des progressistes infiltrés au sein des institutions pour imposer leur vision du monde. « Gilles Kepel avait une chaire en islamologie qui sera probablement remplacée par une autre en études décoloniales », ironise-t-il auprès du Figaro.
« Evergreenisation » du monde universitaire occidental
Ces dérives ne sont évidemment pas sans rappeler le cas cauchemardesque de l’université américaine Evergreen, dans l’État de Washington. Pour s’être opposé à l’organisation d’un «Jour d’absence» dans son établissement, où les «Blancs» de l’université étaient invités à rester chez eux pour laisser les «personnes de couleur» seules sur le campus, Bret Weinstein, juif démocrate, supporteur de Bernie Sanders et du mouvement Occupy Wall Street, se définissant comme «profondément progressiste», avait fait l’objet d’une chasse aux sorcières surréaliste par une bande d’étudiants hurlant leur indignation : « Hey Hey Ho Ho, Bret Weinstein has to go» (« Bret Weinstein doit démissionner»). Le professeur de biologie avait été contraint de démissionner après que le chef d’établissement, prenant le parti des étudiants, lui eut affirmé qu’il ne pouvait plus assurer sa sécurité. « Ma femme et moi avons vécu une véritable tornade personnelle qui était annonciatrice de la tornade qui a balayé tout le pays. Evergreen est maintenant partout », confiait-t-il trois ans plus tard. Jusqu’en France.
C’est ce qui avait poussé en 2020 le député Les Républicains Julien Aubert et le président du groupe LR à l’Assemblée nationale Damien Abad à demander la création d’une mission d’information sur les dérives idéologiques dans l’enseignement supérieur, s’inquiétant « des courants islamo-gauchistes puissants à l’université » et pointant du doigt les mouvements de cancel culture importés des États-Unis, « pour détruire l’université ». Sans surprise, plusieurs professeurs d’université les avaient aussitôt accusés de « fascisme et de maccarthysme ». Cette mission parlementaire n’a finalement jamais vu le jour sur décision du président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand.
En 2021, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, avait annoncé à l’Assemblée nationale lancer une enquête sur « l’ensemble des courants de recherche » dans les universités en lien avec l’islamo-gauchisme en vue de « distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme et de l’opinion ». En réalité, selon un document ministériel en date du 17 mars 2023, ce projet n’a jamais pris forme, restant au stade de l’effet d’annonce. Il faut dire que Mme Vidal avait subi un désaveu cinglant d’Emmanuel Macron. Depuis, aucune autre initiative visant à se pencher sur les dérives de l’extrême gauche dans le milieu universitaire n’a été proposée. Les wokes peuvent donc dormir tranquille.
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