Ce mercredi 23 mars, les talibans ont ordonné la fermeture des collèges et lycées pour les filles en Afghanistan, quelques heures seulement après leur réouverture, une volte-face qui a provoqué la confusion et la déception des élèves.
« Oui c’est vrai », a déclaré sans autre commentaire Inamullah Samangani, porte-parole des talibans, en confirmant des informations selon lesquelles les filles avaient été priées de retourner chez elles. Aucun responsable taliban n’était immédiatement joignable pour expliquer la raison de cette décision.
« Nous n’avons pas le droit de faire de commentaires », a simplement répondu le porte-parole du ministère de l’éducation, Ahmad Aziz Rayan.
« J’ai vu mes élèves pleurer »
Une équipe de l’AFP-TV filmait mercredi matin un cours dans une classe du lycée Zarghona pour filles, dans la capitale Kaboul, lorsqu’un enseignant est entré et a ordonné aux élèves de rentrer chez elles.
Ces dernières, qui se réjouissaient de leur retour à l’école pour la première fois depuis la prise de pouvoir en août dernier des fondamentalistes islamistes, ont fermé leurs livres, emballé leurs affaires, et quitté en larmes la classe.
« J’ai vu mes élèves pleurer et hésiter à quitter le cours. C’est très douloureux de voir vos élèves pleurer », se désolait Palwasha, enseignante à l’école de filles Omara Khan, aussi dans la capitale.
La représentante spéciale de l’Organisation des nations unies (ONU) pour l’Afghanistan, Deborah Lyons, a qualifié d’« inquiétantes » les informations faisant état de la fermeture des écoles. « Si c’est vrai, quelle pourrait en être la raison », s’est-elle interrogée sur twitter.
La communauté internationale a fait du droit à l’éducation pour tous une pierre d’achoppement dans les négociations sur l’aide et la reconnaissance du régime des islamistes fondamentalistes. Plusieurs pays et des organisations ont proposé de rémunérer les enseignants.
Une éducation conforme selon les principes islamistes
Le ministère de l’Éducation avait pourtant annoncé la reprise des cours mercredi pour les filles dans plusieurs provinces, sauf celles de Kandahar (Sud), berceau des talibans, qui devait rouvrir le mois prochain.
« Nous ne rouvrons pas les écoles pour faire plaisir à la communauté internationale, ni pour gagner la reconnaissance du monde », avait assuré le porte-parole Aziz Ahmad Rayan. « Nous le faisons dans le cadre de notre responsabilité de fournir une éducation et des structures éducatives à nos élèves », a-t-il ajouté.
Les talibans avaient insisté sur le fait qu’ils voulaient prendre le temps afin de s’assurer que les filles âgées de 12 à 19 ans seraient bien séparées des garçons, et que les établissements fonctionneraient selon les principes islamiques.
Des filles « heureuses » de retrouver l’école
Avant la volte-face des Taliban, des filles interrogées par l’agence France Presse (AFP) à l’ouverture des écoles se disaient « heureuses » de revenir en classe et remerciaient même les autorités.
Vers 07H00 (02H30 GMT), plusieurs centaines d’élèves se pressaient à l’entrée du lycée Zarghona pour filles, l’un des plus grands établissements de ce type de la capitale.
Vêtues d’abayas noires ou colorées — un large vêtement couvrant tout le corps — ou de longs manteaux, avec un foulard souvent blanc couvrant leur tête, le bas du visage caché par un masque sanitaire, les adolescentes franchissaient la grande porte bleue du lycée.
Des écoles dans d’autres provinces avaient ont aussi ouvert dans la matinée, comme dans le Panchir (Nord-est), à Kunduz (Nord) ou Hérat (Sud-Ouest), avant de refermer leurs portes.
Cette rentrée des filles dans le secondaire suivait celle des garçons, et des filles mais uniquement dans le primaire, qui avaient eux été autorisés à reprendre les cours deux mois après la prise de Kaboul par les talibans, en août dernier.
En sept mois de gouvernance, les talibans ont imposé une multitude de restrictions aux femmes. Elles sont exclues de nombreux emplois publics, contrôlées sur la façon de s’habiller et interdites de voyager seules en dehors de leur ville.
Les islamistes ont aussi arrêté et détenu plusieurs militantes qui avaient manifesté pour les droits des femmes.
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