Le 14 juin 2023 a eu lieu la traditionnelle épreuve de philosophie du baccalauréat, au cours de laquelle plus de 500.000 élèves ont eu quatre heures pour plancher sur la dissertation ou le commentaire de texte.
« Plancher » n’est d’ailleurs peut-être pas le verbe approprié pour un nombre non négligeable d’entre eux, qui, de leur propre aveu, n’attribuent guère d’importance à ce qu’ils voient de plus en plus comme une simple formalité. Peut-être par désintérêt pour la matière, parfois jugée (à tort) déconnectée du monde réel et de l’actualité. Peut-être aussi du fait de sa relative marginalisation au regard d’autres épreuves – les deux épreuves de spécialité se voient chacune attribuer le coefficient 16, et le grand oral le coefficient 10, contre 8 pour l’épreuve de philo.
Le Figaro Étudiant vient de faire paraître à cet égard un témoignage édifiant : il n’est pas rare que des candidats, qui connaissent déjà les résultats des épreuves de spécialité, se disent qu’ils n’ont besoin que d’une note minimale en philo pour obtenir leur bac. « Je me sens plutôt en vacances », avoue l’un d’entre eux ; « J’aurai mon bac, peu importe cette note », confie un autre… Du reste, ces propos sont moins étonnants lorsqu’on connaît les taux de réussite au baccalauréat encore atteints ces dernières années. Respectivement 96% et 90,4% de reçus pour les voies générale et technologique en 2022 !
Or, plutôt que de reléguer la philo en arrière-plan comme il semble que ce soit de plus en plus le cas aujourd’hui, celle-ci ne devrait-elle pas au contraire bénéficier d’une énergique revalorisation, à une époque où le monde se complexifie comme jamais et où l’indépendance d’esprit et le jugement réellement personnel (qui conditionnent le bon fonctionnement de la démocratie libérale) paraissent se raréfier dangereusement ?
À l’ère du triomphe sans partage des foules moutonnières (relisons sur ce point notamment Gustave Le Bon), dont la servilité envers les réseaux sociaux n’a fait qu’exciter l’appétit de conformisme, il serait urgent de redonner à une discipline comme la philosophie toute la place qu’elle mérite. D’autant que la philosophie, c’est aussi l’histoire de la philosophie, qui doit être replacée dans le cadre plus général de l’histoire de la pensée : l’étudier est donc une formidable occasion pour comprendre d’où nous venons, l’évolution de la réflexion de l’humanité depuis l’advenue du « miracle grec » voilà 2500 ans. Insistons toutefois sur ce point : il est vain et naïf de croire que les élèves pourront penser par eux-mêmes sans qu’ils fassent l’effort de se familiariser avec la pensée des grands auteurs de la tradition.
Penser par soi-même, c’est aussi savoir ce que les autres avant vous ont pensé, et se montrer capable de « discuter » avec eux. Avec la philosophie, c’est donc la transmission du goût personnel pour la lecture de première main des classiques qu’il faut revaloriser.
Article écrit par Matthieu Creson. Publié avec l’aimable autorisation de l’IREF.
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