WASHINGTON – Des enfants sont loués, achetés, exploités ou enlevés afin que des adultes célibataires, pour la plupart des hommes d’Amérique centrale, puissent être rapidement libérés aux États-Unis après avoir franchi illégalement la frontière.
Le coût de la « location » d’un enfant varie de cas en cas. « Nous avons eu des indications… cela pourrait coûter entre quelques centaines – voire même, dans certains cas, moins de 90 € – jusqu’à 900 € ou plus », a déclaré Kevin McAleenan, secrétaire par intérim du département de la Sécurité intérieure, lors d’une audience du Congrès, le 18 juillet.
M. McAleenan a présenté le cas d’un étranger clandestin de 51 ans qui avait acheté un bébé de 6 mois pour 72 € (80 $) au Guatemala afin qu’il puisse facilement entrer aux États-Unis. L’homme, un ressortissant hondurien, a avoué les faits devant les agents frontaliers lorsqu’il a été confronté au résultat du test ADN.
« Nous avons découvert toutes sortes d’organisations de contrebande expliquant à leurs clients potentiels, qui traversent la frontière, comment faire pour amener un enfant avec eux pour être autorisés à rester aux États-Unis », a expliqué M. McAleenan. « Ces gens font de la publicité ouvertement sur Facebook et à la radio en Amérique centrale. »
Homeland Security Investigations (HSI), une division de l’ICE, agence fédérale de la police aux frontières des États-Unis a envoyé 400 agents dans la région du Rio Grande au Texas, à la mi-avril pour interroger des familles soupçonnées d’être fausses. Au cours des huit dernières semaines, les agents spéciaux du HSI ont identifié 5 500 « fausses familles ».
M. McAleenan a indiqué que les agents ont découvert 921 faux papiers et que 615 personnes avaient déjà été poursuivies pour traite ou trafic d’enfants.
« Cela me porte à croire que nous ne faisons qu’effleurer le problème, et que le nombre d’enfants en danger pourrait être encore plus élevé », a-t-il révélé.
“Tout le monde sait que s’ils amènent un enfant, ils seront autorisés à rester aux États-Unis – ils appellent cela un ‘passeport pour la migration’. J’ai entendu cela directement d’un homme de Huehuetenango, la province la plus occidentale du Guatemala. »
Il a dit que presque tous les rapports des cas qu’il a vus mentionnent la même chose : « L’inculpé déclare qu’il a fait cette tentative car il a entendu dans sa ville natale que toute personne se rendant aux États-Unis avec un enfant serait laissée en liberté. »
La frontière sud des États-Unis est tellement submergée que la plupart des migrants clandestins ne présentent même plus de raisons crédibles pour demander l’asile, sachant qu’ils seront de toute façon laissés rapidement en liberté aux États-Unis – surtout s’ils ont un enfant avec eux.
À Yuma, en Arizona, moins de 10 % des migrants clandestins déposent une demande d’asile, a déclaré le chef de ce secteur, Anthony Porvaznik, le 17 avril.
300 000 enfants
Depuis le 1er octobre 2018, plus de 300 000 enfants ont franchi la frontière sud des États-Unis, selon M. McAleenan. La plupart d’entre eux sont entrés en tant qu’ « unité familiale », mais 67 000 sont également entrés en tant que mineurs non accompagnés. En comparant les recensements des neuf premiers mois des années 2018 et 2019, le nombre d’ « unités familiales » a augmenté de 469 %.
Le vide juridique alimentant cette forte augmentation du nombre d’ « unités familiales » a été créé en 2015 lorsqu’un juge californien a modifié le Flores Settlement Agreement afin d’interdire la détention de familles pendant plus de 20 jours. Auparavant, la règle des 20 jours ne s’appliquait qu’aux mineurs non accompagnés.
Une affaire d’immigration ne peut pas être jugée dans les 20 jours. Les familles qui traversent illégalement la frontière sont maintenant libérées par la Patrouille frontalière dans les jours qui suivent, avec la date de leur futur procès, qui n’est souvent pas respectée.
L’une des statistiques les plus révélatrices est celle des hommes qui traversent la frontière avec un enfant. En 2014, avant la modification du Flores Settlement Agreement, moins de 1 % de tous les hommes appréhendés par la Patrouille des frontières dans le secteur de la vallée du Rio Grande avaient un enfant avec eux. Selon Rodolfo Karisch, agent principal de la Patrouille des frontières pour ce secteur, ce chiffre s’élève maintenant à 50 %.
En outre, M. McAleenan a expliqué que les contrebandiers créeraient des duos formés d’un adulte et d’un enfant. « S’ils ont une personne qui veut aller aux États-Unis et que quelqu’un d’autre a un enfant avec lequel il peut faire de l’argent en le louant, ou s’ils veulent que l’enfant soit livré à un parent aux États-Unis, ils achètent de faux papiers et ensuite [les migrants] passent clandestinement la frontière. »
« Il y a tout un commerce illégal de faux papiers dans les trois pays », a martelé M. McAleenan, faisant référence au Guatemala, au Honduras et au Salvador.
« Les vulnérabilités de notre cadre juridique incitent les passeurs et les familles à mettre des enfants en danger. Le problème du ‘recyclage’ est peut-être la pire manifestation de ce phénomène », a-t-il avoué. Le « recyclage » fait référence au fait qu’un enfant est utilisé par un adulte pour franchir facilement la frontière en tant qu’ « unité familiale », puis l’enfant est renvoyé pour être utilisé par un autre adulte.
« L’ICE a découvert des cas importants concernant plusieurs villes du pays, où de petits groupes d’enfants ont été identifiés – disons cinq à huit enfants – qui sont utilisés par des dizaines d’adultes pour traverser la frontière et être laissés en liberté aux États-Unis. »
Les adultes soupçonnés de former de « fausses familles » sont poursuivis par le ministère de la Justice pour des crimes fédéraux, notamment des crimes liés à l’immigration, l’usurpation d’identité et fraude sociale, la trafic d’étrangers, la traite de personnes et l’exploitation d’enfants.
Changer le Flores Settlement Agreement
M. McAleenan a déclaré que le Congrès pourrait avoir le plus grand impact – « non seulement sur le flux, mais aussi sur la protection des enfants » – en apportant un changement au Flores Settlement Agreement.
Il a dit qu’avant la modification du Flores Settlement Agreement en 2015, l’administration Obama avait commencé à détenir les familles ensemble pour la durée de leur dossier d’immigration, environ 45 jours. Le flux d’immigrants illégaux s’est réduit en conséquence, car les personnes dont la demande d’asile était sans fondement ont été expulsées.
« Si les gens ne réussissent pas à être libérés, même en venant avec un enfant, et qu’ils obtiennent en fait une décision d’un juge de l’immigration qui entraîne le rapatriement de la grande majorité d’entre eux, cela signifie que d’autres n’essaieront pas de venir », a précisé M. McAleenan.
Bien que près de 90 % de ceux qui affirment avoir des raisons crédibles en se présentant à la frontière passent le filtrage initial, moins de 20 % se voient accorder l’asile par un juge de l’immigration. Pour les Centraméricains, ce chiffre est inférieur à 10 %.
La députée démocrate de Californie, Katie Hill, a répondu à M. McAleenan lors de l’audience que la Chambre des représentants du Congrès américain contrôlée par les démocrates ne modifiera pas le Flores Settlement Agreement et ne fournira pas de fonds pour augmenter le nombre de lits dans les centres d’hébergement des migrants.
M. McAleenan a répliqué qu’il ne pouvait pas concevoir qu’un système qui fonctionnait bien sous l’administration Obama, il y a cinq ans, ne soit pas accepté par le Congrès aujourd’hui. Il a dit qu’à l’époque, les familles étaient gardées ensemble pendant 40 à 50 jours dans des campus, avec un accès à l’éducation, des loisirs, des soins médicaux et des salles d’audience.
« Nous ne voyons pas de résultats positifs dans les affaires d’immigration lorsque n’importe qui est mis en liberté au lieu d’être détenu, surtout s’il s’agit de familles – leurs membres sont plus susceptibles de couper leurs bracelets [de surveillance] ; ils sont moins susceptibles de se présenter aux audiences ; ils sont moins susceptibles de se soumettre à l’ordonnance finale de renvoi », a insisté M. McAleenan. « Pouvoir régler ce problème à la frontière d’une manière rapide et correcte, en suivant la procédure appropriée, est donc une bien meilleure solution que ce que nous faisons actuellement. »
Il précise qu’il avait déjà discuté des solutions possibles avec le Comité judiciaire du Sénat, mais qu’il aimerait entamer une discussion tout d’abord avec la Chambre des représentants.
67 000 personnes mineures non accompagnées
M. McAleenan est également préoccupé par le nombre croissant de mineurs non accompagnés qui traversent la frontière et par les lacunes juridiques qui les empêchent d’être renvoyés chez eux.
La Trafficking Victims Protection Reauthorization Act est active depuis des années pour aider les victimes de traite ; cependant, une lacune juridique empêche les États-Unis de renvoyer les enfants dans leur pays d’origine à moins qu’ils ne proviennent du Canada ou du Mexique (pays frontaliers).
M. McAleenan soutient que même si les pays d’Amérique centrale veulent récupérer leurs enfants, la loi américaine l’interdit.
« Les trois ambassadeurs des pays du Triangle du Nord [le Salvador, le Guatemala et le Honduras] ont affirmé que ces gouvernements devraient avoir leur mot à dire sur ce qui arrive à cet enfant non accompagné. »
Au lieu de cela, un enfant non accompagné est transféré à la Patrouille des frontières et ensuite au département de la Santé et des Services sociaux, qui lui trouve alors une famille d’accueil aux États Unis.
Actuellement, environ 11 000 mineurs non accompagnés sont pris en charge par le département de la Santé et des Services sociaux, ce qui alimente un système de placement familial. La grande majorité d’entre eux (88 %) sont originaires des pays d’Amérique centrale, comme le Guatemala, le Honduras et le Salvador. La plupart ont entre 15 et 17 ans.
« Le nombre de mineurs non accompagnés qui sont entrés aux États-Unis au cours de cette année fiscale a atteint des niveaux jamais vus auparavant », a déclaré Jonathan Hayes, devant le Comité judiciaire de la Chambre des représentants le 25 juillet. M. Hayes est responsable, au sein du département de réinsertion des réfugiés, du programme concernant les mineurs non accompagnés.
J. Hayes a dit qu’en juin, la durée moyenne du séjour d’un enfant sous la garde des Services sociaux était d’environ 42 jours – une « diminution spectaculaire » par rapport à la fin novembre 2018, où la durée moyenne était de 90 jours.
M. McAleenan a alors expliqué que c’est souvent un parent, se trouvant déjà illégalement aux États-Unis depuis un certain temps, qui paie un passeur pour amener son enfant à la frontière.
« Je ne pense pas que les gens se rendent compte que la plupart de ces enfants non accompagnés sont rendus à leurs parents ou proches aux États-Unis, qui sont aussi ici illégalement et fort probablement sans permis de travail », affirme M. McAleenan.
De nouvelles restrictions, imposées par le Congrès, comprennent une disposition selon laquelle les ménages comprenant des migrants clandestins avec un mineur non accompagné seront désormais exempt d’expulsion.
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