Frédéric Dardel, ancien président de l’Université Paris-Descartes, a été mis en examen dans l’enquête sur le scandale du Centre du don des corps, ouvrant la voie à la mise en cause d’autres hauts responsables après celles d’employés.
M. Dardel, président de l’Université entre début 2012 et 2019, a été mis en examen le 4 juin pour « atteinte à l’intégrité d’un cadavre », selon une source proche du dossier, confirmée par une source judiciaire.
« Sur les sept années qu’aura duré son mandat », commencé début 2012, « Frédéric Dardel n’a été mis en examen en sa qualité de président que sur une période de deux ans », a relevé son avocate, Me Marie-Alix Canu-Bernard. « Pourtant il n’a eu de cesse de solliciter l’octroi de crédits… Notamment pour la réfection du Centre du don des corps, en vain, ce qui démontre comme pour d’autres services publics essentiels l’incurie manifeste de l’État », a-t-elle ajouté.
Le « temple de l’anatomie française »
Locaux vétustes, dépouilles putréfiées et rongées par les souris, soupçon de marchandisation des corps... Dans un article publié fin novembre 2019, l’hebdomadaire L’Express avait dénoncé les « conditions indécentes » de conservation de dépouilles de « milliers de personnes ayant fait don de leur corps à la science ».
Ces révélations avaient conduit la ministre de la Recherche Frédérique Vidal à ordonner la fermeture du « temple de l’anatomie française », fondé en 1953 et qui accueillait chaque année plusieurs centaines de corps. Après cette fermeture, M. Dardel est devenu en septembre 2019 « conseiller spécial » au cabinet de la ministre, puis depuis septembre 2020, directeur d’une unité de recherche du CNRS.
Deux préparateurs en examen
Dans un premier temps, l’information judiciaire ouverte en juillet 2020 s’est orientée sur les employés du centre, les « préparateurs », chargés de la gestion quotidienne des dépouilles avant leur utilisation pour des expérimentations.
En juin 2020, une enquête administrative de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale de l’éducation du sport et de la recherche (Igésr) avait en effet évoqué une « perte de repères (…) tant chez les préparateurs que chez les intervenants » sur les corps et s’interrogeait sur une « volonté de nuire ou de porter atteinte aux cadavres » de « certains préparateurs ».
Au moins deux d’entre eux ont été mis en examen, Maurice A. en décembre et Jean-Rémy H. en avril. Le premier, employé du centre jusqu’au début des années 2010, a été mis en cause notamment après la découverte à son domicile de « divers ossements » et des bijoux. Le second, décrit comme un personnage controversé dans des mails internes auxquels l’agence France Presse (AFP) a eu accès, a été la tête de l’équipe des préparateurs au moins jusqu’à début 2018.
Mais l’enquête, comme le demandaient les plus de 170 plaignants, issus des familles des personnes ayant fait don de leur corps, cible désormais des responsables.
L’Université de Paris mis en examen depuis le 15 avril
Le rapport administratif a en effet indiqué que l’Université Paris-Descartes était responsable de « graves manquements éthiques » : « L’importance et la répétition » des alertes, « à différents niveaux et selon différents vecteurs, tranchent avec l’absence de réaction à la hauteur de la gravité des faits signalés jusqu’en 2018 ».
L’Université de Paris, nouvelle entité issue de la fusion en janvier 2020 de Paris-Descartes et Paris-Diderot, a ainsi été mise en examen le 15 avril pour « atteinte à l’intégrité d’un cadavre ». Dans un premier temps, l’Université avait tenté de se constituer partie civile.
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