Les pêcheurs ont dénoncé jeudi la « trahison » du gouvernement après la fin annoncée de l’aide au gazole, qualifiée de « cataclysme » pour une filière qui « joue sa survie », à l’ouverture de leurs assises à Nice.
« Cette filière est au bout du bout. Le soutien n’est pas à la hauteur », a martelé à la tribune le président du comité national des pêches, Olivier Le Nezet, appelant le secrétaire d’État à la Mer Hervé Berville à « assumer un cataclysme qui sera la fin de la filière halieutique française ».
M. Berville est attendu vendredi matin à Nice. Samedi dernier, il avait confirmé que les aides à la trésorerie de 20 centimes (hors taxe) par litre de gazole cesseraient le 15 octobre. Les mesures, reconduites à plusieurs reprises pour un montant total de 75 millions d’euros, avaient été prises en mars 2022 pour aider les pêcheurs à faire face à la flambée du prix du gazole après l’invasion russe de l’Ukraine.
Mercredi, les principales organisations représentant le secteur de la pêche ont dénoncé le « désengagement » de l’État, rappelant la succession de crises subies par les pêcheurs, du Covid-19 à cette flambée des coûts de l’énergie, en passant par le Brexit. « On est en train de rayer d’un revers de main l’identité maritime de la France. On est là pour nourrir la population. Il faut arrêter de se foutre de la gueule du monde », a tempêté le président du comité national. « En agriculture, on est capable quand il y a une crise du porc de mettre 270 millions d’euros sur la table. Et on n’est pas capable de mettre 50 ou 60 millions sur l’ensemble d’une filière (pêche) ? », a-t-il maugréé.
La cause des pêcheurs n’a pas été suffisamment plaidée à Bruxelles
Pourtant, « il y a des solutions », a assuré Olivier Le Nezet, jugeant qu’il revenait à l’État de « prendre ses responsabilités ». Le président du comité reproche au gouvernement de ne pas avoir suffisamment plaidé la cause des pêcheurs à Bruxelles, notamment pour obtenir le relèvement du plafond des aides au carburant. M. Berville avait expliqué mercredi ne plus pouvoir les prolonger « car le régime européen qui permettait ces aides s’arrête cette année ».
« Ce n’est pas à l’État de se substituer tout le temps à la responsabilité de tous les acteurs de la filière », avait-il également estimé dans un entretien à Ouest-France et TV-Rennes. Une déclaration perçue comme « une provocation » par les professionnels. « On est pris en étau entre le cours du gazole et le cours du poisson, qui est très bas », a témoigné auprès de l’AFP Christophe Collin, directeur de l’Armement bigouden au Guilvinec (Finistère).
La semaine dernière, l’un de ses neuf navires est revenu au port avec 43.000 euros de poissons pour une dépense exorbitante de 23.000 euros de gazole, a-t-il affirmé. En inaugurant les assises, le maire de Nice, Christian Estrosi, a estimé que « subventionner les pêcheurs », notamment par ces aides au gazole, revenait à « protéger » la place de la France sur les marchés à l’exportation sous les applaudissements de la salle.
Définir des solutions pérennes
La flotte française, troisième de l’Union européenne derrière l’Espagne et le Danemark avec quelque 6500 navires, a diminué de plus d’un quart en 20 ans. Ses armements sont vieillissants, comme ses marins, dont près de la moitié partiront à la retraite d’ici à cinq à 10 ans. La succession de crises l’a encore fragilisée : 90 navires (dont 45 en Bretagne) devraient partir à la casse dans le cadre d’un « plan d’accompagnement individuel » post-Brexit, destiné aux pêcheurs n’ayant plus accès aux eaux britanniques.
À ceci, s’ajoute la question sociale. La rémunération des marins se réduit à mesure que le prix du gazole augmente. « Cette impasse crée une pression sociale insupportable pour les marins et leurs familles », souligne le comité. « Depuis deux ans, l’État a répondu à l’urgence, mais sans définir les conditions d’une solution pérenne pour le secteur ni afficher d’ambition concrète pour la pêche française pour les 20 prochaines années », a-t-il déploré.
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