Selon un nouvel article du Wall Street Journal (WSJ), la Chine est très impliquée dans le système international de blanchiment d’argent iranien.
Le WSJ a « analysé les transactions financières effectuées pour un grand nombre de sociétés mandataires iraniennes sur 61 comptes dans 28 banques étrangères en Chine, à Hong Kong, à Singapour, en Turquie et dans les Émirats arabes unis, pour un total de plusieurs centaines de millions de dollars », selon l’article exclusif publié le 18 mars.
« Les responsables des services de renseignement occidentaux affirment qu’il existe des preuves que des dizaines de milliards de dollars de transactions de ce type ont été effectuées », indique l’article.
Tous les pays mentionnés, sans oublier le territoire de Hong Kong, entretiennent des liens étroits avec Pékin. Hong Kong est sous le contrôle total du Parti communiste chinois (PCC), qui a définitivement abrogé ses libertés et son indépendance en 2017.
Le magazine Foreign Policy a qualifié la Turquie d’« État client chinois ».
Le public singapourien est une exception mondiale dans son soutien à la Chine, avec 64 % d’opinions positives sur le pays totalitaire, contre une médiane de 27 % dans tous les pays étudiés par le Pew Research Center en 2021.
Les Émirats arabes unis (EAU) sont également proches de Pékin, au point d’accueillir prétendument un centre de détention secret chinois et d’extrader des Ouïghours vers la Chine pour le seul « crime » d’être musulman.
Un article de Bloomberg publié en décembre a révélé que les Émirats arabes unis achetaient du pétrole iranien en violation des sanctions et facilitaient le commerce du pétrole iranien via des institutions financières basées sur leur territoire.
La Chine a également intensifié ses achats de pétrole iranien. L’administration Biden a fait valoir qu’une approche diplomatique était à privilégier au lieu de confronter Pékin sur son soutien à l’Iran. L’administration a nié avoir assoupli les sanctions de l’ère Trump.
Le régime iranien a confirmé une grande partie des informations les plus importantes du nouvel article du WSJ, se prévalant publiquement de sa capacité à mener des opérations commerciales mondiales, malgré les sanctions occidentales contre ses programmes d’armes nucléaires.
En 2018, le président de l’époque, Donald Trump, a abandonné l’accord sur le nucléaire iranien, conclu en 2015 et connu sous le nom de Plan d’action global conjoint (JCPOA). Trump a réimposé des sanctions à l’Iran, que le président Joe Biden prétend avoir maintenues. Mais en réponse, l’Iran a reconstruit son programme nucléaire, désormais proche du point de non‑retour. Tandis que l’Iran est en passe d’acquérir la bombe nucléaire, les exigences de Téhéran s’intensifient au point que tout nouvel accord du JCPOA tournera à son avantage.
Le secrétaire d’État de l’époque, Mike Pompeo, a tenté de réimposer les sanctions des Nations unies contre l’Iran en 2020, mais il a été éconduit par le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. L’administration Biden a annulé la tentative de Pompeo de réimposer des sanctions de l’ONU en 2021, mais les mesures unilatérales des États‑Unis sont toujours en place. Afin de tenter de relancer les négociations nucléaires avec Téhéran, qui sont dans l’impasse, l’administration Biden a décidé de durcir les sanctions au mois de décembre, mais sans effet notable.
Ian Talley, l’auteur de l’article du WSJ écrit que « l’Iran a mis en place un système bancaire et financier clandestin pour gérer des dizaines de milliards de dollars d’échanges annuels interdits par les sanctions imposées par les États‑Unis, ce qui a permis à Téhéran de supporter le siège économique et lui a donné un moyen de pression dans les négociations nucléaires multilatérales, selon des diplomates occidentaux, des responsables du renseignement et des documents. »
Le réseau iranien est composé de comptes bancaires commerciaux étrangers, de sociétés mandataires enregistrées au niveau international, de sociétés régulières qui coordonnent le commerce illégal et d’une « chambre de compensation des transactions établie en Iran ».
Le succès du réseau iranien a certainement dû servir d’exemple au président russe Vladimir Poutine lorsqu’il a envahi l’Ukraine, comme un moyen, rendu possible par Pékin, de maintenir le commerce international tout en étant soumis à des sanctions et des embargos. L’Iran est proche de la Russie, tous deux font partie de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) créée par la Chine, ce qui se rapproche le plus, pour Pékin, d’une alliance internationale telle que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). La Turquie est un « partenaire de dialogue » de l’OCS.
L’Iran cherche à devenir membre de l’OCS depuis 15 ans et a finalement été pleinement admis dans l’organisation en septembre. L’OCS est un groupe peu structuré d’États voyous toujours plus véreux qui dépendent de la Chine sur le plan commercial en raison de leur statut de paria sur la scène internationale.
La Birmanie, sanctionnée pour son coup d’État sanglant de 2021, ostracisée du fait de son génocide contre les Rohingyas, pourrait également utiliser les réseaux internationaux de blanchiment d’argent facilités par Pékin. L’ambassadeur de Birmanie en Chine a rencontré le secrétaire général de l’OCS en février et s’est engagé à soutenir pleinement l’organisation.
En 2021, l’Iran a signé un « accord stratégique » sur 25 ans avec la Chine pour une coopération économique et militaire. Cet accord est entré en phase de mise en œuvre en janvier. Au cours des trois dernières années, la Chine a bravé les sanctions pour acheter du pétrole iranien à un prix inférieur aux prix du marché mondial. Le président iranien Ebrahim Raisi a mis l’accent sur sa politique étrangère « centrée sur l’Asie » qui profite à la Chine.
Cependant, Pékin n’a pas besoin d’être aussi dévoué à Téhéran, principalement en raison de la puissance économique de la Chine, des réseaux commerciaux mondiaux massifs et de la dépendance du monde aux chaînes d’approvisionnement qui s’étendent jusqu’à la lointaine base de fabrication industrielle et technologique chinoise. Comme l’a noté William Figueroa dans The Diplomat, « l’Iran est peut‑être contraint de ‘regarder vers l’Est’ à la suite du retrait des États‑Unis du JCPOA, mais le gouvernement chinois continue de regarder dans plusieurs directions à la fois ».
L’Occident ne cesse d’essayer de convaincre la Chine, la Russie, l’Iran et la Corée du Nord de respecter les règles internationales, comme la non‑prolifération nucléaire et une certaine évolution de la politique vers une meilleure conception des droits de l’homme, établies après la Seconde Guerre mondiale pour maintenir la paix internationale. Mais ces pays, dirigés par des dictateurs assoiffés de pouvoir, continuent de refuser. Les tentatives sincères déployées par les démocraties à cet égard sont une course de dupes, où l’on répète sans cesse au dindon de la farce qu’il faut botter en touche.
Avec la montée en puissance économique et militaire de la Chine, on arrive peu à peu au bout de l’impasse. Il est temps de durcir les sanctions à l’encontre de tous ces régimes autocratiques, en commençant par Pékin leur chef de file, et de rompre les liens économiques qui leur permettent de violer de manière répétée et flagrante les normes internationales destinées à préserver la paix et la sécurité dans le monde.
Anders Corr est titulaire d’une maîtrise en sciences politiques de l’université de Yale (2001) et d’un doctorat en administration de l’université de Harvard (2008). Il est directeur de Corr Analytics Inc, éditeur du Journal of Political Risk, et a mené des recherches approfondies en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Ses derniers ouvrages sont « The Concentration of Power : Institutionalization, Hierarchy, and Hegemony » [La concentration du pouvoir : institutionnalisation, hiérarchie et hégémonie, ndt.] (2021) et « Great Powers, Grand Strategies : the New Game in the South China Sea » [Grandes puissances, stratégies globales : les nouvelles donnes en mer de Chine méridionale, ndt.] (2018).
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