En 2015, les efforts bien en vue du dirigeant du Parti communiste chinois, Xi Jinping, de s’attaquer à la corruption au sein de son parti ont été implacables.
À l’avant-plan, trois anciens hauts dirigeants ont été expulsés du Parti et l’un deux a été condamné à perpétuité. L’agence de discipline interne du Parti a purgé les chefs d’importantes sociétés d’État, et deux fois plus d’entreprises ont été l’objet d’une enquête. De plus, pour la première fois depuis le début de la campagne anticorruption en 2013, un cadre du Parti dans chacune des 31 provinces chinoises a fait l’objet d’une enquête.
Xi Jinping joue gros. Sa campagne « anticorruption » vise à consolider son pouvoir en éliminant la faction qui est loyale à l’ex-dirigeant du Parti Jiang Zemin. Il sera intéressant de voir ce que Xi Jinping fera en 2016 avec une plus grande marge de manœuvre.
Pas de démonstration pratique
La dénonciation voilée d’anciens hauts dirigeants comme Zhou Yongkang, Ling Jihua et Guo Boxiong en 2015 a peut-être signalé haut et fort les ambitions plus grandes de Xi Jinping.
Le procès de Zhou Yongkang, l’ex-chef de la sécurité intérieure, avait été hautement anticipé, puisqu’il avait été l’objet d’une enquête en juillet 2014. Ce fut donc une surprise lorsque des images de Zhou durant son procès à huis clos – avec un imperméable noir, des cheveux tout blancs et la mine basse – ont été diffusées sans préambule à la télévision d’État en juin 2015.
Le lendemain du procès, les médias officiels et semi-officiels ont relégué la confession de Zhou et sa peine à perpétuité dans l’espace réservé aux manchettes moins importantes de leur page frontispice.
Quelle chute abrupte ! En tant que chef du tentaculaire appareil de sécurité du régime et membre du Comité permanent du Politburo (le seul véritable centre de décision en Chine), Zhou détenait un immense pouvoir.
Le régime chinois n’a pas non plus crié sur les toits l’expulsion de Ling Jihua, l’ex-conseiller principal du prédécesseur de Xi Jinping, Hu Jintao, et du général Guo Boxiong, autrefois le numéro 2 des forces armées.
Dans le cas de Zhou Yongkang, il semble que Xi Jinping ne voulait pas d’un autre Bo Xilai – l’ex-patron de la mégalopole de Chongqing aux ambitions mégalomanes qui s’était présenté à son procès public en tenue de ville décontractée avec les cheveux teints plus noir que noir. Bo Xilai avait alors repoussé le blâme sur d’autres tout en niant toutes les accusations portées contre lui, selon les images disponibles, les transcriptions des débats judiciaires incomplètes et les informations diffusées par les journalistes sur le site microblogue chinois Sina Weibo.
La manière par laquelle le régime s’est débarrassé de ces hauts dirigeants suggère que leur sort n’est qu’une étape et pas une fin en soi.
Retirer des pouvoirs
En 2015, la campagne de Xi Jinping a ciblé deux secteurs économiques importants dans lesquels la faction de Jiang Zemin jouait un grand rôle : le pétrole et les télécommunications.
La Commission centrale pour l’inspection de la discipline (CCID) a repris où elle avait laissé en 2014 dans le secteur pétrolier en enquêtant deux chefs d’entreprises, soit Liao Yongyua de la China National Petroleum Corporation et Su Shulin de la China Petroleum & Chemical Corp. L’arrestation de Su Shulin en octobre a capté l’attention parce qu’il était alors le gouverneur de la province du Fujian, dans le sud de la Chine, une position qu’il a occupée durant cinq ans après avoir passé des décennies dans le secteur pétrolier étatisé.
Quelques jours après l’arrestation de Su Shulin, une enquête ayant duré deux ans a pris fin. Jiang Jiemin (aucun lien de parenté avec Jiang Zemin), ancien chef de l’agence qui supervise les sociétés d’État et magnat du pétrole, a été accusé de corruption, de possession d’actifs non déclarés et d’abus de pouvoir. Il a été condamné à 16 ans de prison.
L’agence disciplinaire a également scruté les trois plus importantes entreprises en télécommunications, soit China Mobile, China Telecom et China Unicom.
L’enquête de China Unicom a commencé en décembre 2014 et a mené à l’arrestation de deux cadres supérieurs. Les inspecteurs de la discipline ont publié un rapport très critique en février 2015, accusant les cadres de l’entreprise d’accepter des faveurs sexuelles et des pots-de-vin, de pratiquer le népotisme et d’autres instances de malfaisance.
En juin, le directeur d’une équipe d’inspection disciplinaire a déclaré que les enquêtes préliminaires de China Mobile et China Telecom ont déterminé que les hauts dirigeants ont « formé une famille parasite qui festoyait à même les biens de l’État ». Les chefs des trois géants des télécommunications ont changé de poste ou ont été démis de leurs fonctions en août 2015. Le 27 décembre, Chang Xiaobing, président de China Telecom, a été emmené à un autre endroit avant une importante rencontre annuelle.
Ce remaniement dans l’industrie des télécommunications a tassé des cadres supérieurs associés à Jiang Mianheng, le fils aîné de Jiang Zemin et l’homme soupçonné depuis longtemps de tirer les ficelles de l’industrie. Il semble que Jiang Mianheng pourrait lui-même être bientôt victime de la purge.
En purgeant les secteurs du pétrole et des télécommunications et en plaçant ses propres hommes à la barre, Xi Jinping a coupé une énorme source de richesse – et du pouvoir politique associé – à la faction de Jiang Zemin.
Un prince mort depuis longtemps
Tous les responsables du Parti mentionnés ci-dessus sont des alliés de Jiang Zemin, soit comme bras droits ou subalternes de ses associés. Le mouvement général de la purge de Xi Jinping est dirigé contre les hommes de Jiang Zemin.
En montant des dossiers de corruption contre les hauts fonctionnaires, la Commission d’inspection de la discipline travaille du bas vers le haut, ensuite vers le centre pour encercler tranquillement la cible. Après être passé à travers tout ce dispositif du Parti, il semble que le tour de Jiang Zemin est arrivé.
Actuellement, seulement le rusé Zeng Qinghong, le conseiller et homme de main de longue date de Jiang, se dresse entre Xi Jinping et son objectif final. Au sein du régime chinois, le changement de main du pouvoir est souvent communiqué en langage ou en actions codés. Des signes indiquent que Zeng pourrait bientôt chuter.
En février 2015, l’agence anticorruption a publié un article sur son site web qui semblait ne pas cadrer avec sa mission des plus sérieuses. L’article soulignait les méfaits éhontés du prince Qing, un Mandchou mort depuis longtemps.
Cela a déclenché une vague de spéculations parmi les internautes chinois et les chroniqueurs politiques que le prince Qing est en fait une allusion pas très subtile à Zeng Qinghong, en partie parce que leurs noms partagent un caractère chinois.
Aussi, la récente disparition de Wang Qishan, le chef de l’agence anticorruption, pourrait annoncer la chute imminente de Zen Qinghong, selon certains analystes.
Wang a l’habitude de se retirer de la vie publique pendant des semaines avant la purge de hauts dirigeants, comme il l’a fait dans le cas de Zhou Yongkang et des généraux Guo Boxiong et Xu Caihou. À part Zeng Qinghong, il n’y a aucun autre responsable de leur stature dans le camp de Jiang Zemin.
Débat ouvert
Le cas de Jiang Zemin a été ouvertement débattu cette année. En juillet 1999, Jiang a ordonné l’élimination de la discipline spirituelle Falun Gong, déclenchant une sévère persécution. En mai, les pratiquants de Falun Gong ont commencé à déposer des plaintes criminelles auprès des tribunaux du régime, accusant Jiang de génocide et de crimes contre l’humanité.
La branche judiciaire du régime a accepté et reconnu l’essentiel des plaintes de plus de 200 000 pratiquants, un fait sans précédent. Pendant presque la totalité des 16 dernières années, les pratiquants de Falun Gong n’ont pas eu droit à une véritable défense devant les tribunaux et encore moins le droit d’utiliser le système judiciaire pour déposer leurs propres plaintes.
Une autre dénonciation est venue le 10 août 2015 dans le Quotidien du peuple, l’organe officiel du régime. L’éditorial a critiqué les ex-dirigeants du Parti qui continuent d’influencer les politiques. Plusieurs estiment que l’éditorial faisait allusion à Jiang Zemin, qui s’est constamment immiscé dans les affaires du Parti depuis sa retraite en 2002.
Dix jours après la publication de l’éditorial, une grosse pierre qui portait une inscription de Jiang Zemin et qui était située à l’extérieur de l’École centrale du Parti à Pékin est disparue, selon plusieurs médias chinois. Quelques jours plus tard, l’École a indiqué que la grosse pierre avait simplement été déplacée à l’intérieur. Même si c’était vraiment le cas, ce symbole du pouvoir de Jiang est maintenant moins visible.
2016 : une année importante ?
Luo Yu, le fils d’un important révolutionnaire communiste à qui on attribue la fondation du mécanisme de sécurité du régime, a mentionné en entrevue avec Epoch Times que Xi Jinping est peut-être comme le fils du dictateur taiwanais Chiang Kai-shek. En effet, Chiang Ching-kuo a mis fin à la dictature sur l’île en introduisant la démocratie.
Luo Yu a connu Xi Jinping alors qu’ils étaient enfants – leurs familles étaient très proches – et il a récemment écrit une lettre ouverte au haut dirigeant, qu’il appelle « frère Xi ». Luo demande à Xi de mettre fin à la dictature du parti unique et d’introduire la démocratie en Chine.
En entrevue, Luo affirme que la faction de Jiang empêche Xi d’entamer des réformes et qu’il pourra seulement entreprendre des réformes véritables et graduelles – s’il le souhaite – une fois qu’il aura consolidé son pouvoir par l’entremise de la campagne anticorruption et la restructuration de l’Armée populaire de libération.
La suite logique aux événements de 2015 – la purge d’alliés importants de Jiang, l’isolation de Jiang Mianheng et la purge des secteurs du pétrole et des télécommunications – sera le démantèlement final de la faction de Jiang Zemin.
Si Xi Jinping suit ce scénario et qu’il écoute les conseils de Luo Yu, alors 2016 sera une année très intéressante et importante pour la Chine.
Version originale : Anti-Corruption Campaign Prepares 2016 Changes in China
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