Affichant la volonté de « faire que le travail paye mieux », Élisabeth Borne a menacé lundi de sanctionner les branches qui ont des minima sous le Smic, faute de progrès d’ici juin, en clôture d’une conférence sociale qui a largement laissé les syndicats sur leur faim.
Saluant un moment de concertation « utile », la Première ministre a indiqué que le ministère du Travail recevrait « prochainement toutes les branches ayant des minima en dessous du Smic pour qu’elles s’expliquent sur leur retard ». « Si nous ne constatons pas de progrès significatifs d’ici le 1er juin 2024, le gouvernement proposera au parlement un texte de loi qui permettra de calculer les exonérations non pas sur la base du Smic, mais sur la base du minima de branche », a-t-elle affirmé.
À l’heure actuelle, 56 branches ne sont pas en conformité, dont une dizaine « de manière durable », selon le ministre du Travail Olivier Dussopt. Cela ne signifie pas pour autant que des salariés soient payés sous le Smic – l’employeur doit combler l’écart –, mais lorsque plusieurs niveaux d’ancienneté sont rattrapés par le Smic, cela génère un « tassement » des salaires.
Mme Borne a aussi proposé aux partenaires sociaux de « bâtir un nouvel index » sur l’égalité femmes-hommes et a annoncé une mission confiée à des experts sur les exonérations de cotisations sociales. La Première ministre a également confirmé la création d’un Haut conseil des rémunérations qui planchera par exemple sur les temps partiels subis afin de préparer une négociation interprofessionnelle.
« Rien de nouveau », selon les syndicats
Les syndicats, qui avaient fait part en amont de nombreuses revendications – dont la « conditionnalité des aides publiques aux entreprises » – et dit attendre des mesures « concrètes », ont exprimé leur déception. « On reste sur notre faim, on aurait aimé avoir des éléments beaucoup plus concrets pour les travailleurs et travailleuses », a regretté la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon. « On a plutôt une feuille de route qui s’annonce. Ce n’est pas inintéressant puisqu’il y a un certain nombre de chantiers qui vont continuer d’être discutés », notamment sur « les temps partiels ».
« Tout ça pour ça ! », a déploré son homologue de la CGT Sophie Binet, pointant une « timide mise sous pression des branches » et fustigeant un gouvernement qui a des « œillères face à la situation de millions de salariés qui n’arrivent pas à boucler leur fin de mois ». « Rien de nouveau sous le soleil ! », a abondé le chef de file de FO, Frédéric Souillot.
Côté patronal, Patrick Martin (Medef) a regretté que les débats n’aient « pas suffisamment parlé de création de richesse ». « À cette grosse nuance près, les conclusions telles que la Première ministre vient de les annoncer nous donnent satisfaction », a-t-il ajouté, notant ainsi que la menace sur les branches, « que l’on peut comprendre », concerne en réalité « un faible nombre » sur le total d’environ 170.
« L’État prendra toute sa part »
Les organisations syndicales (CFDT, CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, Solidaires et Unsa) comme patronales (Medef, U2P, CPME, FNSEA, Fesac et Udes) étaient réunies pour cette grand-messe toute la journée au Conseil économique, social et environnemental (Cese), en présence de plusieurs ministres. « Nous nous retrouvons aujourd’hui avec la volonté que le travail paye mieux et de relancer la promotion sociale », avait souligné à l’ouverture la Première ministre, après une minute de silence en hommage à Dominique Bernard, l’enseignant tué dans un attentat vendredi à Arras.
« C’est la négociation qui amènera la révision des grilles de classifications » et « qui fera évoluer les salaires minimums des branches qui sont encore en dessous du Smic », avait-elle précisé, même si « bien sûr l’État prendra toute sa part ».
La conférence sociale a eu lieu trois jours après une manifestation en demi-teinte pour défendre le pouvoir d’achat, qui a rassemblé entre 92.500 et 200.000 personnes en France selon les sources. Ombre au tableau, elle s’est tenue sur fond de profond désaccord entre les partenaires sociaux et le gouvernement sur les finances des régimes des retraites complémentaires du privé (Agirc-Arrco) et de l’assurance-chômage (Unedic).
« Il n’a jamais été question de les ponctionner », s’est défendue Mme Borne, souhaitant toutefois « sanctuariser » les économies réalisées dans les régimes complémentaires grâce à la réforme des retraites.
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