L’ancien ralentit, le neuf s’écroule : le marasme guette le secteur de l’immobilier, frappé par des conditions de crédit plus difficiles.
Sur un an, les prix de l’immobilier ancien de l’indice Notaires-Insee, dévoilés jeudi, ont augmenté de 4,8% en 2022. Une progression qui n’avait plus été aussi faible depuis 2019, avant la pandémie.
« 2022 a marqué, vraiment, une grande dualité, avec deux semestres qui sont particulièrement prononcés » : le premier en nette hausse, le second en forte baisse, a exposé Élodie Frémont, présidente de la commission statistiques immobilières chez les Notaires du Grand Paris.
Trois causes majeures à ce ralentissement, a-t-elle détaillé : « la difficulté du crédit à l’habitat, qui devient plus onéreux et plus compliqué à obtenir; un contexte général, aussi bien économique que géopolitique, plus tendu ; et peut-être un engouement pour la maison au vert (…) qui semble se terminer. »
Depuis le confinement du printemps 2020, les prix des maisons anciennes augmentaient plus vite que ceux des appartements, poussés par une envie accrue de vert et d’espace.
Le marché des maisons pénalisé
Si le prix des maisons continue d’augmenter plus vite que celui des appartements (5,8% contre 3,5%), les rythmes tendent à se rejoindre.
« Une partie de ce que l’on qualifie d’appel du vert était aussi un appel de prix plus bas », souligne auprès de l’AFP Alain Tourdjman, directeur des études économiques chez BPCE.
Maintenant que le prix des maisons a rattrapé celui des appartements, elles deviennent mécaniquement moins attractives, dit-il.
Les craintes sur la consommation d’énergie et la réglementation qui se durcit pour les possesseurs de passoires thermiques ont pu pénaliser davantage le marché des maisons, celles-ci étant en général plus grandes et plus énergivores, pointe Alain Tourdjman.
L’immobilier en province, qui augmentait plus vite qu’en Île-de-France, décélère aussi, même s’il continue de surclasser la région parisienne (6% d’augmentation annuelle, contre 1,4%).
Mais la cause principale du freinage est la difficulté à emprunter.
Le coût du crédit renchéri
La remontée rapide des taux d’intérêt a renchéri le coût du crédit. Si bien, ont calculé les Notaires du Grand Paris, qu’un acquéreur qui pouvait acheter une maison de 100 mètres carrés en janvier 2022 ne peut plus acquérir, avec le même montant emprunté, que 88 mètres carrés un an plus tard.
Le taux d’usure, qui interdisait aux banques de prêter au-delà d’un certain taux, a un temps grippé le marché, avec des acquéreurs qui devaient rétracter leurs offres faute d’accès au crédit.
Mais l’assouplissement de la réglementation décidé fin janvier ne va pas pour autant relancer le marché, estiment plusieurs professionnels.
« C’est plus la contrainte de l’environnement économique et de la baisse du pouvoir d’achat qui réduit les volumes de crédit que le taux d’usure », estime Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim).
Baisse des prix
Par rapport à l’inflation (5,2% en 2022), les prix de l’immobilier sont d’ores et déjà en baisse, souligne-t-il.
Et ça ne va pas s’arrêter là. « Oui, nous allons assister à une poursuite de la décélération des prix dans les prochains mois », dit-il.
Les économistes de BPCE estiment même que les prix dans l’ancien devraient refluer d’ici à la fin de l’année, de 2 à 3%.
L’immobilier neuf dans une « crise sévère »
Du côté de l’immobilier neuf, les très mauvais chiffres s’accumulent. Jeudi, le pôle habitat de la Fédération française du bâtiment, qui regroupe aménageurs, promoteurs, constructeurs de maisons et rénovateurs, s’est alarmé d’une « crise sévère » touchant le secteur.
Les constructions de maisons individuelles en lotissements ont chuté de 22,2% en 2022, celles en secteur diffus (hors lotissements) de 31%.
En cause, pointe le pôle habitat, la remontée des taux d’intérêt, mais aussi la hausse des coûts de construction, aggravée par la guerre en Ukraine, et l’affaiblissement de dispositifs de soutien aux acquéreurs.
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