L’exécutif et désormais une partie de l’opposition ont multiplié les appels au calme jeudi face au risque d’une nouvelle explosion de violences ce week-end en marge de la mobilisation des « gilets jaunes ».
Des dizaines d’appels à manifester à Paris se concurrencent sur les réseaux sociaux, donnant pour la plupart rendez-vous sur les Champs-Élysées, théâtre de scènes d’émeutes le 1er décembre.
Devant le Sénat, Édouard Philippe a solennellement demandé aux « gilets jaunes » de ne pas se rendre à Paris pour « éviter qu’ils soient pris au piège que leur tendent les casseurs ». Le Premier ministre a réitéré son appel au calme dans le 20h de TF1 ce jeudi soir.
L’Élysée a dit craindre « une très grande violence » samedi, malgré l’annonce mercredi soir d’un geste que l’exécutif espère décisif: la renonciation pour toute l’année 2019 aux augmentations de taxes sur les carburants.
« Je prie pour samedi », a glissé un proche du président, alors que le ministère de l’Intérieur fait état d’une « mobilisation de la part de l’ultradroite et de l’ultragauche ».
Une « partie du peuple est en train de se soulever », a estimé le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume, décrivant un président « inquiet ».
En perspective de nouveaux débordements, les autorités ont d’ores et déjà pris leurs dispositions, à Paris comme en régions.
Dans la capitale, la préfecture de police de Paris a appelé les commerçants du secteur des Champs-Élysées à rester fermés. La tour Eiffel et une dizaine de musées, dont le Louvre, garderont leurs portes closes. L’Opéra a annulé ses représentations et le parcours de la marche pour le climat a été modifié.
À Bordeaux, une dizaine d’établissements culturels et espaces publics resteront fermés. Le maire de Saint-Étienne Gaël Perdriau a proposé à son homologue lyonnais Gérard Collomb d’« annuler » la Fête des Lumières.
Cinq matches de la Ligue 1 de football ont d’ores et déjà été reportés.
Sur les réseaux sociaux, les mots d’ordre évoquent un renversement des institutions : « dissolution de l’Assemblée nationale », « Manu, on arrive! », « Pot de départ de Macron ! », ou encore « Tous à la Bastille ».
Face à ce risque, le gouvernement va déployer des « moyens exceptionnels » en plus des 65 000 policiers et membres des forces de l’ordre en France.
Édouard Philippe a poursuivi jeudi au Sénat un débat engagé à l’Assemblée pour défendre une nouvelle fois les mesures prises en urgence : outre l’annulation de la taxe carbone, il s’agit d’un gel des tarifs du gaz et de l’électricité cet hiver et du renoncement à durcir le contrôle technique automobile avant l’été.
Toutes ces annonces répondent à des demandes des « gilets jaunes ». Mais pour huit Français sur dix, elles « interviennent trop tard », selon un sondage OpinionWay diffusé jeudi. Les deux tiers d’entre eux estiment cependant que c’est l’occasion d’ouvrir le dialogue.
Désavoué par l’Élysée en plein débat à l’Assemblée, Édouard Philippe voit son avenir à Matignon remis en question. S’il a été envoyé en première ligne ces derniers jours, c’est bien le président Emmanuel Macron qui reste la cible de toutes les critiques sur les points de blocage.
Le président a demandé solennellement aux partis politiques, aux syndicats et au patronat « de lancer un appel clair et explicite au calme ».
Il semble avoir été entendu par l’opposition, qui s’était encore montrée très offensive la veille.
Le collectif des « gilets jaunes libres » a, lui, demandé à être reçu vendredi par Emmanuel Macron, pour « calmer » la France qui se trouve « au bord de la guerre civile », a annoncé un de ses représentants, Benjamin Cauchy, à l’Agence France Presse (AFP). L’Élysée n’a pas réagi dans l’immédiat.
L’exécutif redoute aussi une extension de la colère à d’autres secteurs, notamment les agriculteurs et les transporteurs routiers.
Environ 200 lycées et collèges étaient de nouveau bloqués ou perturbés jeudi. Un total de 146 personnes a été interpellé jeudi devant un lycée de Mantes-la-Jolie après des heurts et dégradations dans cette commune des Yvelines.
Plusieurs milliers de lycéens ont également manifesté à Marseille et Nice contre la réforme du bac et Parcoursup.
D. S avec AFP
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