Le géant chinois de la technologie Huawei est la cible de critiques après la mise en ligne virale du traitement d’un ancien employé sur les médias sociaux chinois.
Li Hongyuan, qui travaillait pour Huawei depuis 13 ans, a été licencié et détenu à tort par la police après avoir tenté de dénoncer la corruption dans l’entreprise.
Huawei jouit d’un large soutien patriotique en Chine depuis l’an dernier, lorsque le directeur financier de l’entreprise a été arrêté au Canada après que les procureurs fédéraux eurent demandé son extradition pour faire face aux accusations de violations des sanctions américaines contre l’Iran. Le soutien interne a continué après avoir été mis sur une liste noire commerciale par les États-Unis pour des raisons de sécurité nationale, mais Huawei subit maintenant des pressions croissantes pour présenter des excuses.
Les détails de l’affaire Li Hongyuan ont fait surface à la fin du mois de novembre lorsque les documents judiciaires ont été affichés sur les plateformes de médias sociaux chinois.
Selon les médias locaux, Li Hongyuan, 42 ans, a été licencié après avoir tenté de dénoncer la corruption dans son unité de travail. Lorsqu’il a reçu son indemnité de départ, il est devenu méfiant après avoir appris que les fonds provenaient directement du compte bancaire personnel d’un employé de Huawei. Cela a conduit M. Hongyuan à croire que Huawei était impliqué dans un stratagème d’évasion fiscale, et il a également essayé de le signaler aux autorités.
Huawei a ensuite intenté une action en justice contre lui pour extorsion de fonds. La police s’est pointée chez M. Hongyuan et l’a emmené au poste de police. Il a été détenu par la police pendant 251 jours.
M. Hongyuan a été libéré en août lorsque les autorités ont rejeté son dossier pour insuffisance de preuves. Il a également reçu environ 100 000 yuans (12 775 €) d’indemnisation publique.
« Je rentre dans ma ville natale… mais j’ai peur », a déclaré M. Hongyuan sur un site de médias sociaux le soir du 2 décembre.
Quelques heures avant que M. Hongyuan ne publie ces commentaires sur le site de médias sociaux chinois Weibo, l’entreprise Huawei a déclaré qu’elle n’avait rien fait de mal, ajoutant que la loi était une arme qui pouvait être utilisée par Huawei et M. Hongyuan.
Ces derniers jours, sur Google Trends, les mots les plus recherchés sont « Huawei », « 251 » et « Li Hongyuan ». Sur Weibo, des dizaines de milliers d’utilisateurs ont critiqué Huawei, mais beaucoup de ces commentaires ont été immédiatement supprimés.
Le 2 décembre, M. Hongyuan a déclaré au China Business Network, un réseau d’entreprises chinoises géré par l’État, en s’adressant au peuple chinois : « S’il vous plaît, [avant de faire des commentaires] regardez ce qui m’est arrivé, je vais suivre ce que la plupart des Chinois suggèrent. »
M. Hongyuan a partagé avec plusieurs médias chinois la décision d’indemnisation rendue par le parquet populaire du district de Longgang, dans la ville de Shenzhen, qui fait état de son épreuve avec Huawei.
Il a également parlé aux médias chinois de son expérience professionnelle à Huawei.
Licenciement
En octobre 2005, M. Hongyuan a démissionné de son poste d’ingénieur au sein du Zhejiang Juhua Group, une usine chimique publique, et a rejoint Huawei dans son siège social de Shenzhen pour effectuer des recherches et concevoir des produits de sécurité d’entreprise.
Avant de rejoindre l’unité d’affaires des onduleurs solaires de Huawei en 2016, M. Hongyuan a travaillé dans la division des ventes et du marketing de l’entreprise, ainsi qu’en tant que secrétaire des dirigeants de Huawei en Mongolie intérieure et en Inde.
« Je dirigeais une petite équipe de huit à neuf personnes pour coordonner chaque groupe de travail au sein de l’entreprise [d’onduleur solaire] », a déclaré M. Hongyuan à l’agent de presse privé chinois Jiemian le 1er décembre.
Il a ajouté qu’il a découvert que l’équipe de direction de l’unité d’affaires des onduleurs solaires falsifiait des données depuis longtemps. « Une grosse somme d’argent a été investie dans cette entreprise, et Huawei a subi une grosse perte. »
En novembre 2016, M. Hongyuan a signalé la situation à la haute direction et Huawei a envoyé des auditeurs pour enquêter sur l’activité des onduleurs solaires en juin 2017.
« Depuis que j’ai signalé les problèmes de l’entreprise à l’équipe de la haute direction, mon directeur commercial a commencé à vouloir m’évincer. Par exemple, il n’a pas approuvé mon plan de voyage d’affaires, ne m’a pas permis d’embaucher un nouvel employé pour remplacer un employé qui a démissionné, et ainsi de suite », a déclaré M. Hongyuan.
En décembre 2017, M. Hongyuan a été informé par Huawei que la société ne renouvellerait pas son contrat qui devait expirer en janvier 2018.
Selon le droit du travail chinois, les employeurs sont tenus de conclure des contrats à durée indéterminée avec des employés qui ont travaillé pour l’entreprise pendant plus de 10 ans. Si l’employeur ne le fait pas, il est tenu de verser une indemnité.
Le 31 janvier 2018, un gestionnaire des ressources humaines (RH) de Huawei a organisé une réunion avec M. Hongyuan pour discuter du montant de l’indemnité de départ qu’il recevrait.
Son indemnité de départ totale comprenait 304 742,98 yuans (environ 38 900 €) de rémunération et sa prime annuelle pour 2017 était de 200 000 yuans (25 600 €).
M. Hongyuan a secrètement enregistré cette réunion, qui a duré deux heures et demie.
Détenu pendant 251 jours
Le 8 mars 2018, le directeur des ressources humaines a demandé à sa secrétaire de faire le virement de 304 742,98 yuans sur le compte bancaire de M. Hongyuan, mais les fonds provenaient directement du compte bancaire privé d’un certain M. Zhou.
M. Hongyuan a ensuite demandé au responsable des ressources humaines pourquoi les fonds ne provenaient pas directement du compte de Huawei. Il a également signalé l’activité suspecte au service des ressources humaines de Huawei ainsi qu’au bureau des impôts de la municipalité. Cependant, M. Hongyuan a été ignoré par Huawei, et le bureau des impôts lui a dit qu’ils allaient percevoir l’impôt de Huawei.
M. Hongyuan a également vérifié auprès d’autres collègues qui ont été licenciés et a découvert que cinq d’entre eux recevaient des fonds de compensation provenant des comptes bancaires privés des secrétaires des RH. « Je pensais que c’était la solution de Huawei pour se soustraire à l’impôt », a déclaré M. Hongyuan.
Le 7 novembre 2018, M. Hongyuan a poursuivi Huawei parce qu’il n’avait pas reçu la prime annuelle. En défense, Huawei a fourni un compte rendu de la réunion à la cour et a affirmé que la performance de M. Hongyuan en 2017 était médiocre et donc inéligible à la récompense.
Huawei a ensuite poursuivi M. Hongyuan en justice le 28 novembre 2018, alléguant qu’il avait extorqué l’entreprise. Huawei a prétendu que M. Hongyuan avait menacé le directeur des RH lors de sa réunion du 31 janvier.
Tôt le matin du 16 décembre 2018, M. Hongyuan a été arrêté par des policiers en civil à son domicile à Shenzhen. La police lui a dit que Huawei avait intenté une action en justice contre lui pour avoir « utilisé sa position pour voler les biens de l’entreprise ».
Au poste de police, M. Hongyuan a appris que Huawei le poursuivait pour « fuite de secrets commerciaux ». La police a alors enquêté sur l’affaire et n’a pas pu trouver de preuves.
L’enregistreur audio de M. Hongyuan et les disques durs externes ont été emportés par la police lorsqu’il a été arrêté. Lorsque M. Hongyuan a parlé à la police de l’enregistrement audio de sa rencontre avec le directeur des RH et de la façon dont il pouvait l’utiliser pour prouver son innocence, la police a affirmé qu’elle ne l’avait pas trouvé.
Le 21 mars, la police a remis le dossier de M. Hongyuan au parquet. Il a ensuite demandé à sa femme de trouver la copie de l’audio sur l’ordinateur de son ami, en avril. L’enregistrement audio a finalement prouvé que M. Hongyuan n’avait pas menacé le directeur des RH pendant la réunion.
En mai, un employé de Huawei qui a participé à la réunion a écrit un témoignage au procureur, disant que M. Hongyuan n’avait commis aucun acte répréhensible. Le directeur des ressources humaines a également changé son témoignage en juin, avouant que M. Hongyuan ne l’avait pas menacé.
Le 22 août, le parquet a décidé qu’il n’y avait pas assez de preuves pour prouver la culpabilité de M. Hongyuan et a rejeté l’affaire.
M. Hongyuan a été libéré le lendemain et il a présenté une demande d’indemnisation parce qu’il avait été détenu à tort pendant 251 jours.
Le 25 novembre, le parquet lui a accordé 107 055,94 yuans (environ 13 700 €) en réparation d’une détention injustifiée.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.