La chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, retenue depuis 18 mois en Iran, a rendu hommage samedi à ses proches, ses codétenues à la prison d’Evin et à tous ses interlocuteurs au cours de ses recherches, dans un rare message public.
« J’aimerais ici avoir une pensée pour mes interlocutrices et interlocuteurs, nombreux, sur plus de trente ans de métier, qui à un moment ou un autre m’ont ouvert la porte de leur maison, ainsi que de leur cœur, et partagé avec moi leur expérience », écrit-elle dans ce texte mis en ligne par son comité de soutien (https://faribaroland.hypotheses.org/9559), un an et demi jour pour jour après son attestation.
Spécialiste du chiisme et de l’Iran postrévolutionnaire à Sciences Po Paris, Mme Adelkhah a a été arrêtée le 5 juin 2019 à Téhéran, tout comme son compagnon Roland Marchal, spécialiste réputé de l’Afrique venu lui rendre visite.
Ce dernier a été libéré en mars dans le cadre d’un échange de prisonniers. Mais la chercheuse, née en Iran en 1959 et vivant en France depuis 1977, a été condamnée le 16 mai à cinq ans de prison pour « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale » et « propagande contre le système » politique de la République islamique, des accusations montées de toutes pièces selon son comité de soutien.
Depuis le 3 octobre en résidence surveillée
Longtemps détenue à la prison d’Evin, à Téhéran, elle est depuis le 3 octobre en résidence surveillée dans la capitale iranienne, sous le contrôle d’un bracelet électronique.
Les arrestations d’étrangers, notamment de binationaux, se sont multipliées en Iran depuis le retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien en 2018 et le rétablissement de lourdes sanctions américaines contre Téhéran.
Mme Adelkhah cite, parmi ses nombreux contacts en Iran dans le cadre de ses recherches, « responsables politiques, religieux, voire militaires, marchands du bazar, collègues et universitaires, étudiants, ami(e)s, famille et autres connaissances » ou « simples citoyens », en espérant que son arrestation n’a pas eu de conséquences pour eux.
Mon autonomie et ma liberté d’esprit
« Une pensée aussi pour toutes ces femmes que j’ai connues durant ma détention et que j’ai laissées derrière les barreaux dans la section de femmes », poursuit Fariba Adelkhah.
« Enfin une pensée pour mon compagnon, Roland, dont le pays m’a tout donné … et notamment un travail qui m’a permis de grandir en gardant mon autonomie et ma liberté d’esprit (quel beau cadeau !) tandis que mon pays lui a pris neuf mois de sa vie, tout simplement pour avoir été un chercheur », ajoute-t-elle.
Fariba Adelkhah plaide à cette occasion une nouvelle fois pour la liberté de la recherche, dont elle a fait un combat personnel, sous le slogan » Sauvons la recherche, sauvons l’histoire pour sauver la liberté ».
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