Le marathon continue à l’Assemblée nationale : si les motions de censure contre le gouvernement sont rejetées, les députés devront enchaîner lundi avec l’examen du projet de loi pour préparer les JO-2024, dont le volet vidéosurveillance suscite la forte défiance de la gauche.
Les échanges pourraient démarrer tard lundi et durer jusqu’à jeudi voire vendredi, avec la ministre des Sports et des Jeux Olympiques Amélie Oudéa-Castéra, et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Adopté avec une confortable majorité en première lecture au Sénat, dominé par la droite, le texte éclectique comprend un large volet sécuritaire et arrive quelques mois après le fiasco de la finale de Ligue des Champions au Stade de France. En mai 2022, des spectateurs étaient restés bloqués à la sortie du RER, d’autres sans billets avaient escaladé les grilles du Stade de France, des familles avaient été aspergées de gaz lacrymo ou s’étaient fait agresser.
La vidéosurveillance algorithmique contestée
L’article 7 du projet de loi, visé par une bonne partie des 770 amendements déposés, prévoit d’autoriser le couplage de la vidéosurveillance à un traitement algorithmique des images. Le but ? Aider à la protection des « manifestations sportives, récréatives ou culturelles » en repérant automatiquement des « événements » dont la liste sera définie par décret, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).
Ces analyses de mouvements sont supposées alerter par exemple sur l’abandon d’un bagage ou le début d’un mouvement de foule, alors que 13 millions de spectateurs sont attendus, dont 600.000 pour la cérémonie d’ouverture sur la Seine. L’expérimentation, qui démarrerait dès la promulgation et pourrait concerner la prochaine Coupe du monde de rugby en septembre-octobre, est supposée s’arrêter au 31 décembre 2024.
Mais les associations de défense des libertés y voient un dévoiement qui ferait passer la surveillance de la population dans une autre sphère. « On va pouvoir conserver des images plus longtemps que d’habitude pour entraîner des algorithmes », déclare le rapporteur à l’Assemblée Guillaume Vuilletet (Renaissance).
Le député, comme le gouvernement, met en avant de « nombreuses garanties » pour circonscrire l’expérimentation et insiste sur le fait que la reconnaissance faciale n’est pas au programme. Insuffisant pour les quatre groupes de l’alliance de gauche Nupes, qui proposeront de supprimer l’article 7, tout comme des députés indépendants Liot et même deux députés LR.
La crainte d’une généralisation de ce type de surveillance
« Personne ne pensait voir arriver un texte comme ça en France », dénonce l’écologiste Sandra Regol. Elle fustige « une loi qui transforme en cobayes les Français ». « On va créer un marché de la surveillance algorithmique », s’insurge le député LFI Paul Vannier, dont le groupe va déposer une motion de rejet.
La mesure est également dénoncée par les associations Amnesty et la Quadrature du net, mais aussi par le Conseil national des barreaux. Les opposants au texte sont convaincus que l’expérimentation préparera le terrain à une généralisation de ce type de surveillance. « C’est normal qu’il y ait des mesures exceptionnelles pour un événement exceptionnel », concède Roger Vicot (PS), « mais on va au-delà d’un texte visant à sécuriser les JO ».
Bien que des députés de gauche réservent encore leur vote final, le texte devrait principalement obtenir un soutien de la droite et l’extrême droite, en appui à la majorité présidentielle. « Le gouvernement utilise le prétexte des JO pour un cheval de Troie sécuritaire qui nous donne raison », se satisfait le député RN Jordan Guitton.
Parmi les autres mesures : la possibilité de « cribler » (soumettre à une enquête administrative) des personnes accréditées sur les sites de compétition et dans les « fans zone », et le renforcement des sanctions en cas d’intrusion dans une enceinte. La copie du Sénat sur ce point a été adoucie en commission à l’Assemblée mais des députés de gauche y voient toujours une mesure contre les militants, notamment écologistes. Le texte prévoit également des tests génétiques afin de se conformer aux standards mondiaux de l’antidopage, la création d’un grand centre de santé au village olympique, ou encore des dérogations aux règles du travail dominical.
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