La France est de nouveau en Europe le pays le plus attractif en matière d’investissements étrangers. Pour 2024, les firmes étrangères participant au sommet « Choose France », devraient y investir pour plus de 15 milliards d’euros, dont 4 milliards par la firme américaine Microsoft.
À un mois des élections européennes, l’exécutif promeut une France en bonne santé économique et redevenue attractive pour les multinationales, quand bien même sa plus grande entreprise en chiffre d’affaires, TotalEnergies, envisage de déménager à New York sa cotation boursière principale. Le gouvernement en veut pour preuve le dernier baromètre EY, qui a sacré la France championne d’Europe de l’attractivité pour la cinquième année de suite, avec près de 1200 annonces d’investissements étrangers en 2023.
« C’est à ça que sert la stabilité de notre politique économique », s’est félicité le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, sur France 2, citant les baisses d’impôts pour les entreprises.
Un « record »
Au sommet « Choose France » (« choisissez la France ») qui s’ouvre ce lundi à Versailles, Emmanuel Macron va réunir 180 patrons étrangers ayant annoncé vouloir construire ou agrandir des usines, ou d’autres investissements en France pour plus de 15 milliards d’euros au total, correspondant à 56 nouveaux projets. Il s’agit d’un « record » illustrant la réindustrialisation en cours, selon le gouvernement. En 2023, 28 projets d’investissements avaient été annoncés, représentant un total de 13 milliards d’euros.
En tête d’affiche figure l’annonce par Microsoft de 4 milliards d’euros d’investissements pour un nouveau centre de données dans l’est de la France et l’agrandissement d’autres en région parisienne et près de Marseille, pour répondre à la demande croissante d’intelligence artificielle et de services informatiques en cloud. « Il s’agit de l’investissement le plus important que nous ayons jamais réalisé » en France, a déclaré son président Brad Smith à l’AFP.
Nombre d’annonces concerneront des agrandissements ou modernisations d’usines, par exemple chez le géant canadien des frites McCain. L’investissement fait partie de la vie des entreprises : elles investissent chaque année plus de 200 milliards d’euros en France, selon l’Insee, dont 35 venant de multinationales étrangères.
« La plupart des projets annoncés lors du sommet sont des projets qui auraient vu le jour avec ou sans le sommet », estime Sylvain Bersinger, chef économiste au cabinet Asterès. « Le coeur de l’attractivité française ne réside pas là-dedans », dit-il à l’AFP, citant plutôt le système éducatif, le cadre « juridique, fiscal, l’environnement d’innovation, le marché local ».
Outre Microsoft, figurent parmi les projets d’investissements rendus publics :
– une potentielle nouvelle usine d’engrais bas carbone dans la Somme vers 2030 (FertigHy, 1,3 milliard d’euros) ;
– des investissements d’Amazon pour développer ses infrastructures cloud en région parisienne et son infrastructure logistique en Auvergne-Rhône-Alpes (1,2 milliard) ;
– des lignes de production de frites et pommes de terre de McCain modernisées ou agrandies (350 millions) dans le Pas-de-Calais et dans la Marne, où se rendra Emmanuel Macron lundi matin ;
– une usine de raffinage de nickel près de Bordeaux pour 2027 (entreprise suisse KL1, 300 millions) ;
– une usine de fabrication d’un « avion régional électrique » en Nouvelle Aquitaine (société allemande Ilium, 400 millions) ;
– des investissements supplémentaires dans la pharmacie avec Pfizer (500 millions sur cinq ans), AstraZeneca (388 millions de dollars) et GSK (140 millions d’euros).
Certains investissements sont déjà validés, d’autres ne le seront que dans plusieurs années.
Parmi les patrons attendus : ceux des banques JPMorgan, Goldman Sachs ou Bank of America, des laboratoires Novartis et AstraZeneca ou des fonds souverains saoudien ou qatari.
Entre la première édition de Choose France, en 2018, et celle de 2023 plus de 31 milliards d’euros d’investissements pour 122 projets ont été annoncés, selon l’Elysée.
Un effet sur l’économie à relativiser
L’impact sur l’emploi de cette moisson d’investissements, au-delà des annonces faites chaque année à Versailles, reste débattu.
Le baromètre EY « nous informe que les projets d’investissements étrangers en France sont associés à 39.773 créations d’emploi » en 2023, constate l’économiste Lucas Chancel dans une tribune dans Le Monde. Soit moins qu’au Royaume-Uni (52.211) ou en Espagne (42.450).
Ces emplois, qui représentent 0,13% de la population active, « aideront les territoires qui en bénéficieront, mais force est de constater que le chiffre demeure bien faible par rapport à l’importance que certains voudraient lui prêter », poursuit le codirecteur du Laboratoire sur les inégalités mondiales à l’École d’économie de Paris.
« Il y a un travail énorme » pour inverser 30 ans de désindustrialisation en France, a admis le ministre de l’Industrie Roland Lescure sur franceinfo lundi. « À Dunkerque on a détruit 10.000 emplois depuis 15 ans, et on va en créer 20.000 dans les 10 ans qui viennent. » « Au rythme d’ouverture d’usines sur lequel on est, d’ici une dizaine d’années, on aura inversé les 15 ans qui viennent de s’écouler », a-t-il insisté.
« Le “Choose” de l’hypocrisie »
Invitée lundi sur CNEWS et Europe 1, Manon Aubry (LFI) a pointé les firmes en difficulté telle que l’entreprise Metex, où 200 emplois sont menacés, ou encore Duralex et les firmes de panneaux solaires comme Photowatt « qui sont en train de fermer ».
« Parmi les bienfaiteurs invités par Emmanuel Macron, est-ce qu’il y en aurait un pour sauver l’une de ces entreprises en difficulté ? » demande-t-elle. « Quel type d’économie voulons-nous ? » poursuit-t-elle, déplorant les avantages fiscaux en faveur des grandes entreprises et la vente d’Alstom à General Electric, qui a finalement débouché sur la suppression de centaines d’emplois notamment dans les énergies renouvelables. « Son sommet “Choose France” c’est le “Choose” de l’hypocrisie », a t-elle conclu.
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