Le chef du parti islamo-conservateur Ennahdha, Rached Ghannouchi, principal opposant au président Kais Saied en Tunisie, a été placé sous mandat de dépôt, a annoncé jeudi sa formation, en dénonçant sur sa page Facebook un « emprisonnement injuste ».
Il avait été interpellé lundi soir après des déclarations dans lesquelles il avait affirmé que la Tunisie serait menacée d’une « guerre civile » si les partis de gauche ou ceux issus de l’islam politique comme Ennahdha, y étaient éliminés. Son arrestation avait été critiquée par l’Union européenne et les États-Unis notamment. La Tunisie a fermement rejeté mercredi les inquiétudes, exprimées notamment en Europe, après l’arrestation de l’opposant islamiste Rached Ghannouchi, les qualifiant d’ « inadmissibles ».
Chef du parti islamo-conservateur Ennahdha et de l’ancien Parlement, M. Ghannouchi, 81 ans, est l’opposant le plus en vue à être arrêté en Tunisie depuis le coup de force du président Kais Saied, qui s’est emparé des pleins pouvoirs en juillet 2021. Son arrestation, lundi, est survenue après des déclarations dans lesquelles il a affirmé que la Tunisie serait menacée d’une « guerre civile » si les partis de gauche ou ceux issus de l’islam politique comme Ennahdha, y était éliminés.
L’Union européenne suit les événements « avec beaucoup d’inquiétude »
L’Union européenne, un partenaire clef de la Tunisie, a dit mardi suivre « avec beaucoup d’inquiétude les derniers développements » dans le pays, citant l’arrestation de M. Ghannouchi et la fermeture des locaux de son parti. L’UE a aussi souligné « le principe fondamental du pluralisme politique ».
La France a pour sa part noté que cette interpellation « s’inscrit dans une vague d’arrestations préoccupantes », rappelant son « attachement à la liberté d’expression et au respect de l’état de droit ». Pour les États-Unis, ces arrestations représentent une « escalade inquiétante ».
« Les arrestations par le gouvernement tunisien d’opposants et de critiques sont fondamentalement contraires aux principes que les Tunisiens ont adoptés dans une Constitution qui garantit de manière explicite la liberté d’opinion, de pensée et d’expression », a affirmé dans un communiqué mercredi le porte-parole du département d’État américain, Vedant Patel.
Un état de droit et des libertés malmenés au nom du « redémarrage de l’ économie »
Le ministère tunisien des Affaires étrangères a affirmé dans un communiqué publié mercredi soir en réaction aux déclarations françaises et européennes que « les lois de la République s’appliquent à tous les justiciables sans exception, avec toutes les garanties légales », et que « la justice s’exerce sereinement, sans être influencée par la vague de commentaires inappropriés et inadmissibles ».
Il a soutenu que ces commentaires « ne peuvent qu’affecter les efforts intenses du pays pour redresser une situation économique et financière sous grande tension du fait, en grande partie, de la mauvaise gouvernance et de l’amateurisme ayant caractérisé la décennie écoulée » pendant laquelle le parti Ennahdha de M. Ghannouchi jouait un rôle politique de premier plan.
Le ministère n’a pas expliqué le lien qu’il fait entre les inquiétudes exprimées sur l’état de droit et les libertés dans le pays et sa situation économique. « Ces communications constituent une ingérence inacceptable dans les affaires internes de la Tunisie émanant de parties pourtant informées sur les réalités du pays », a ajouté le ministère tunisien, soulignant de nouveau l’ « importance du redémarrage de l’économie tunisienne dans les meilleures conditions possibles ».
La Tunisie traverse une grave crise politico-économique qui pousse de nombreux Tunisiens à essayer de gagner clandestinement l’Europe par la mer au risque de leur vie.
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