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« Le bleu de méthylène pourrait jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre le cancer » – Laurent Schwartz

février 13, 2025 18:03, Last Updated: février 13, 2025 19:21
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Le docteur Laurent Schwartz est cancérologue. Diplômé de la faculté de médecine de Strasbourg, il a exercé quelques années aux États-Unis, notamment au Massachusetts General Hospital, avant de revenir en France et de travailler à l’Assistance-Publique des Hôpitaux de Paris.

Auteur de plusieurs livres sur le cancer, il publie un nouvel ouvrage intitulé Le bleu de méthylène : un remède oublié, un nouvel espoir contre le cancer, la dépression et les maladies du cerveau, aux éditions Thierry Souccar.

Un livre dans lequel Laurent Schwartz évoque ses recherches sur la nature du cancer ainsi que le rôle que le bleu de méthylène, un vieux médicament tombé dans l’oubli, pourrait éventuellement jouer dans le traitement de cette maladie.

Une autre approche du cancer

« Depuis plus de quarante ans, j’accompagne des patients incurables. Pour les aider vraiment, il fallait comprendre la vraie nature du cancer. Cette maladie n’est pas le combat du bien contre le mal, comme on se plaît souvent à la présenter. Elle ne s’explique pas non plus par des cellules qui seraient soudain devenues folles, comme on l’entend souvent. Le cancer est lié à une fermentation du sucre », écrit l’oncologue.

« La cellule normale brûle le glucose pour le transformer en CO2, en eau et en ATP (l’énergie dont elle a besoin pour fonctionner). La cellule cancéreuse, pour sa part, se limite à décomposer la molécule de glucose en deux molécules d’acide lactique. Faute de pouvoir brûler le glucose, elle passe à un mécanisme moins efficace : la fermentation », poursuit-il.

Une fermentation qui correspond à ce qu’on appelle « l’effet Warburg », du nom du prix Nobel de médecine à l’origine de l’observation de cette réaction métabolique.

« L’énergie extraite d’une molécule de glucose diminue nettement. Pour compenser, les cellules cancéreuses ouvrent leurs portes à plus de glucose. […] En moyenne, une cellule cancéreuse consomme dix fois plus de glucose que les cellules normales », précise Laurent Schwartz.

D’après lui, le cancer est donc essentiellement « une maladie du métabolisme » et non une maladie génétique. 

« […] seuls quelques (rares) cancers ont une explication strictement génétique. Si une anomalie héréditaire peut expliquer la survenue de certains cancers chez l’enfant ou l’adulte jeune, le facteur génétique n’explique pas les cancers les plus fréquents qui apparaissent chez les adultes ou les personnes âgées », explique-t-il.

« Le cancer n’est pas le combat du Bien contre le Mal, de même que la chimiothérapie ne guérit pas la plupart des cancers courants. Les mutations de l’ADN ne causent pas la plupart des cancers. Il n’y a ni bonnes ni mauvaises cellules, il n’y a pas de cellules folles et les cellules ne se suicident pas », poursuit l’oncologue, qui estime que « la façon de percevoir le cancer doit changer » de façon radicale. 

« Le cancer est une maladie simple. Nous avons été trompés en pensant à son intelligence et en cherchant à innover toujours plus pour lui faire face. »

« D’illustres prix Nobel, Otto Warburg et Albert Szent-Györgyi, avaient compris le cancer il y a déjà plusieurs décennies. Ils ne prônaient pas des traitements toxiques, mais une lutte contre la fermentation. Ils ne voyaient pas le cancer comme une maladie du génome, mais comme une maladie du métabolisme », ajoute le Dr Schwartz.

Le bleu de méthylène : un vieux médicament tombé dans l’oubli 

Fort de cette perspective, le cancérologue s’est intéressé à une vieille molécule, le bleu de méthylène, qui constitue « le plus ancien médicament de synthèse, mis au point avant même l’aspirine » par Heinrich Caro, un chimiste allemand, à la fin du XIXe siècle.

« Les médecins ont très vite testé cette molécule sur différentes pathologies. Les bénéfices les plus importants ont été observés dans quatre domaines en particulier : les maladies infectieuses, la psychiatrie, les maladies du cerveau et le cancer », note Laurent Schwartz.

« L’essentiel des travaux sur le bleu de méthylène a été réalisé il y a plus de cent ans. Tant en cancérologie qu’en psychiatrie, de multiples publications en témoignent », ajoute-t-il.

Selon le praticien, associé à d’autres molécules comme le dioxyde de chlore par exemple, ce médicament tombé dans l’oubli pourrait potentiellement « jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre le cancer », notamment du fait de son impact sur le métabolisme.

« Le traitement par le bleu de méthylène a pour but, avant tout, de gagner du temps. Il ne cherche pas à tuer les cellules tumorales mais à les faire respirer. Il ne tue pas non plus les cellules normales », précise Laurent Schwartz.

« Le but du traitement métabolique contre le cancer n’est pas de guérir le patient, mais de lui permettre de survivre. Nous sommes heureux si le cancer se stabilise ou s’il se développe lentement », poursuit le cancérologue.

« À l’heure actuelle, nous ne connaissons pas la durée du sursis apporté par le traitement métabolique. Mais l’histoire naturelle de la maladie a changé : si les patients ne sont pas guéris, ils peuvent mener une vie normale », ajoute-t-il.

Des essais cliniques nécessaires pour démontrer l’efficacité du bleu de méthylène contre le cancer

Si le protocole proposé par le Dr Schwartz a déjà été testé sur des malades du cancer, il précise que « ces quelques cas ne sont pas une preuve de l’efficacité du traitement métabolique et seuls des essais cliniques randomisés pourront démontrer l’intérêt de cette approche ».

Des essais cliniques rigoureux qu’il appelle de ses vœux depuis plusieurs années, sans succès. 

« Il faut du courage pour relancer les vieux médicaments, tant pour les patients que pour les médecins », explique le praticien. « Pour l’instant, nous disposons seulement de témoignages de patients qui mentionnent ce qui peut ressembler à un miracle. »

Et Laurent Schwartz de conclure : « Nous en sommes au début de nos recherches. Ce que nous savons, c’est que le traitement traditionnel a une réelle efficacité, mais que, en dehors de cas très rares, nous, médecins, ne savons pas guérir le cancer métastatique. Ce que je propose n’est pas la panacée, mais apporte un progrès probable. Bien sûr, cette approche n’a pas été testée dans le cadre rigoureux des essais thérapeutiques. Cependant, les cas rapportés sont suffisamment probants pour être partagés. »

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