La justice groenlandaise a décidé jeudi du maintien en détention du militant écologiste américano-canadien Paul Watson, dont le Japon demande l’extradition dans une affaire liée à son combat pour la défense des baleines.
« Le tribunal du Groenland a décidé aujourd’hui que Paul Watson sera maintenu en détention jusqu’au 5 septembre 2024 afin de garantir sa présence au moment de la décision d’extradition », dont la date n’a pas été rendue publique, a annoncé la police dans un communiqué.
La justice groenlandaise a tranché : Paul Watson reste en prison jusqu’au 5 septembre.
Le capitaine est ressorti menotté du tribunal pour retourner dans sa cellule.#FreePaulWatson pic.twitter.com/L0eYOsWCdj
— Vakita (@vakitamedia) August 15, 2024
Le Japon a demandé son extradition le 31 juillet auprès du ministère danois de la Justice. La défense du militant de 73 ans, qui demandait sa remise en liberté, estimait disproportionné son maintien en détention plus de trois semaines après son arrestation à Nuuk, la capitale du territoire autonome danois, le 21 juillet. Elle a fait appel de la décision de la cour.
À la sortie du tribunal de Nuuk, juste avant de monter dans une camionnette de la Police, Paul Watson a lancé à l’AFP que son maintien en détention augmentait la pression sur le Japon de mettre un terme à « ses activités illégales de chasse à la baleine ».
Fondateur de Sea Shepherd et de la fondation qui porte son nom en faveur des océans, Paul Watson, qui vivait en France depuis plus d’un an, a été appréhendé sur son navire, le John Paul DeJoria, après avoir accosté. Le bateau venait se ravitailler en carburant en vue « d’intercepter » le nouveau navire-usine baleinier du Japon dans le Pacifique Nord, selon la Fondation du capitaine Paul Watson (CPWF).
« La cour a refusé de regarder les preuves »
L’arrestation s’est faite sur la base d’une notice rouge d’Interpol émise en 2012, lorsque le Japon l’a accusé d’être co-responsable de dommages et blessures à bord d’un navire baleinier nippon deux ans plus tôt dans le cadre d’une campagne menée par Sea Shepherd.
Pour ses conseils, le mandat d’arrêt repose sur des données fallacieuses, ce qu’ils voulaient démontrer pendant l’audience en présentant des extraits vidéos des événements concernés. « La cour a refusé de regarder les preuves vidéos de la série Whales Wars (qui suivait les activités de Sea Shepherd) qui montrent que les Japonais ont fabriqué des preuves, car ça ne les intéresse pas », a déploré auprès de l’AFP la présidente de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali.
« À la fin de l’audience, Paul a dit que ses deux petits garçons avaient plus besoin de lui que le Japon n’a besoin de sa vengeance », a-t-elle expliqué. Le militant s’est exprimé en anglais mais n’a pas eu le droit à un interprète, a relevé Mme Essemlali. « On trouve ça absolument scandaleux. Ce n’est pas du tout normal, on ne comprenait rien », a-t-elle dit.
En 2010, un Néo-Zélandais, Peter Bethune, avait déjà été condamné dans cette affaire à deux ans de prison avec sursis. Comme ce dernier, Paul Watson est accusé d’avoir blessé au visage un marin japonais en jetant une bombe puante – de l’acide butyrique – pour entraver le travail des baleiniers. Pour l’avocate de M. Watson, Julie Stage, le matériel vidéo prouve que « le membre d’équipage qui, selon les autorités japonaises, a été blessé, n’était même pas présent lorsque la bombe puante a été lancée » à bord.
« Présomption de culpabilité »
En 2010, lors du procès de M. Bethune, ces extraits n’avaient pas été pris en compte par la justice nippone. Le marin ne peut avoir été blessé qu’à cause du spray utilisé en direction des activistes par l’équipage, qui au moment du lancement de la boule puante avait quitté le pont, argue la défense. « Ces vidéos montrent que le Japon invente des faits pour obtenir l’extradition et la condamnation » de Paul Watson, a souligné Mme Stage, dénonçant un nouveau gage de la faillibilité du système judiciaire nippon.
Cette affaire « est une question de vengeance de la part du système juridique japonais et des autorités japonaises », a estimé un autre avocat de M. Watson, François Zimeray. Ce spécialiste des droits humains affirme qu’au « Japon, il existe une présomption de culpabilité ». « Les procureurs sont fiers d’annoncer qu’ils ont un taux de condamnation de 99,6% », a-t-il déploré.
L’arrestation et la détention du militant écologiste ont donné lieu à une vaste mobilisation à travers le monde. Une pétition demandant sa libération rassemble jusqu’à présent plus de 62.000 signatures. La présidence française a demandé aux autorités danoises de ne pas l’extrader.
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