Le 18 juin dernier, le nouveau Premier ministre chinois Li Qiang avait entamé une tournée diplomatique en Europe. L’objectif visé était de trouver des moyens de désamorcer la confrontation commerciale entre le Parti communiste chinois et les démocraties libérales.
Toutefois, la visite de six jours de Li Qiang dans les principaux pays de l’UE, l’Allemagne et la France, a coïncidé avec la publication de la nouvelle stratégie de sécurité économique proposée par l’Union européenne pour faire face aux risques liés à la sécurité économique et, dans ce cadre, veiller à ce que les technologies critiques ne tombent pas entre les mains d’adversaires.
Le document sur la stratégie européenne de sécurité économique, publié le 20 juin, vise à convaincre les 27 États membres de l’UE d’accepter de renforcer les contrôles sur les exportations et les sorties de technologies qui pourraient être utilisées à des fins militaires par des rivaux tels que le Parti communiste chinois (PCC).
Les diplomates de l’UE estiment qu’il faudra des mois de débats avant que la stratégie ne devienne une politique concrète. Il s’agit néanmoins d’une première étape essentielle pour empêcher les objectifs économiques de compromettre la sécurité de l’UE.
Bien que le document ne cite aucun pays en particulier, des diplomates européens ont déclaré au New York Times que la stratégie visait « clairement » la Chine.
Li Qiang est le Premier ministre du Conseil d’État du PCC en Chine depuis son entrée en fonction en mars de cette année. Il s’est rendu en Allemagne le 20 juin pour le septième cycle de consultations gouvernementales sino-allemandes avant de se rendre en France pour sa première visite officielle et d’assister au Sommet du nouveau pacte mondial de financement du président français Emmanuel Macron les 22 et 23 juin.
Les médias d’État chinois ont déclaré que le choix de l’Europe par Li Qiang pour son premier voyage à l’étranger montre que la Chine attache une grande importance au développement des relations avec l’Europe et considère le renforcement des relations Chine-Europe « comme une priorité pour la diplomatie du PCC ».
Mais l’UE ne semble pas partager le même enthousiasme pour la coopération avec le PCC.
Li Yuanhua, ancien professeur à la Capital Normal University de Pékin, a déclaré à Epoch Times le 21 juin que le document de stratégie de sécurité économique de l’UE est une réponse à trois années de politiques draconiennes de Covid zéro du PCC menaçant la sécurité de la chaîne d’approvisionnement industrielle mondiale.
« L’UE a reconnu la faiblesse d’une chaîne d’approvisionnement [dépendant de la Chine] pour l’Europe », a déclaré Li Yuanhua.
Outre les questions relatives à la chaîne d’approvisionnement, les nouvelles politiques de l’UE visent à empêcher les États autoritaires de voler des technologies sensibles, y compris l’IA et les micropuces, et de les utiliser dans le domaine militaire, ce qui constituerait une menace pour l’ensemble de l’humanité, selon Li Yuanhua.
Le point de vue de l’UE sur la sécurité économique
La méfiance de l’UE à l’égard des relations commerciales avec le PCC était évidente depuis un certain temps avant sa proposition de stratégie européenne de sécurité économique, a affirmé Chen Weijian, rédacteur en chef de Beijing Spring, un magazine mensuel qui rend compte du mouvement démocratique en Chine, à Epoch Times le 21 juin.
Dans cette stratégie de 14 pages, la Commission européenne s’inquiète du manque de coordination entre les États membres et de la faiblesse des règles commerciales, qui pourraient permettre aux opposants d’exercer une mainmise sur les économies ou les fabricants de l’UE. Ce problème doit être traité de toute urgence, a déclaré la Commission.
La Commission européenne considère que l’exportation et le partage de technologies émergentes, telles que l’IA et les ordinateurs quantiques, constituent un risque potentiel pour la sécurité, car ils pourraient permettre à certains pays hostiles d’utiliser ces technologies à des fins militaires.
La stratégie vise à garantir que la chaîne d’approvisionnement des produits sensibles pour la sécurité soit fermée aux pays hostiles, afin d’empêcher les fuites de technologies propriétaires européennes dans les domaines de l’IA, de la fabrication de puces et de la biotechnologie.
L’UE devrait également exclure les pays rivaux potentiels et leurs entreprises des infrastructures cruciales, telles que les ports et les oléoducs, et interdire aux entreprises européennes d’exporter des applications militaires de haute technologie vers des rivaux potentiels, indique le rapport.
« Dans certains cas, les fuites de technologies risquent de renforcer les capacités militaires/de renseignement de ceux qui pourraient les utiliser pour saper la paix et la sécurité, en particulier pour les technologies à double usage telles que les technologies quantiques, les semi-conducteurs avancés ou l’intelligence artificielle », peut-on lire dans le rapport.
La Commission a proposé une liste de technologies à double usage pour l’évaluation des risques que le Conseil du commerce et des technologies (CCT) de l’UE pourrait adopter d’ici septembre de cette année. Cette liste prendra en compte, pour chaque pays, « le risque de fusion civilo-militaire et le risque d’utilisation abusive de ces technologies à des fins de violation des droits de l’homme ».
La diplomatie du PCC en Europe
Li Qiang a déclaré lors de son voyage en Allemagne que le PCC était prêt à « envoyer un signal positif et fort pour maintenir la stabilité des chaînes industrielles et d’approvisionnement internationales et pour préserver la paix et la prospérité dans le monde », selon le ministère chinois des Affaires étrangères.
De tels propos semblent sous-entendre une quasi menace, rappelant à l’Europe et au monde que la Chine joue toujours un rôle vital dans la chaîne d’approvisionnement internationale.
Mais en fait, la réalité à laquelle la Chine est confrontée est à l’opposé, a expliqué Li Yuanhua, car « l’économie chinoise est sur le point de s’effondrer et a désespérément besoin d’injections de capitaux étrangers et de commandes à l’étranger, [elle subit] une énorme pression économique, de sorte que le PCC est désireux de sauver son économie en déliquescence en renforçant la coopération commerciale avec l’Europe » après avoir perdu le soutien des États-Unis.
Li Yuanhua a indiqué qu’une autre mission voilée du Premier ministre chinois – en plus d’avertir subtilement l’UE que le retrait du commerce avec la Chine serait mauvais pour la paix mondiale – consistait à « faire pression sur l’Europe dans l’arène diplomatique pour qu’elle se rapproche du PCC afin de faire contrepoids aux États-Unis ».
Le PCC est conscient que les États-Unis sont tenus de lui imposer des sanctions, car « quel que soit le parti au pouvoir aux États-Unis, l’opinion publique et sa stratégie mondiale lui imposent de restreindre et d’équilibrer l’expansion du PCC; ce régime despotique qui nuit au peuple ».
Par conséquent, le PCC ne peut qu’espérer s’aligner sur les puissances européennes pour résister aux sanctions américaines, a déclaré Li Yuanhua.
Chen Weijan estime quant à lui que la position de l’UE, qui s’est progressivement formée pour se désolidariser du PCC, ne sera pas facilement modifiée, en particulier par la simple visite d’un « dirigeant communiste chinois ou par une rhétorique superficiellement discrète ».
De plus, la politique du dirigeant chinois Xi Jinping pour la Chine est orientée vers une stratégie diplomatique guerrière et dure, une hostilité continue envers les États-Unis et les institutions occidentales, et des tactiques de rétractation et de répression à l’encontre des entreprises étrangères, ce qui a conduit un grand nombre d’entreprises étrangères à fuir la Chine.
Dans ce contexte politique interne et externe, il est peu probable que la visite de Li Qiang en Europe « aboutisse à des résultats tangibles », a déclaré M. Chen.
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