« Il faut faire respecter les règles » : un chasseur jugé pour avoir tué l’ourse Caramelles en Ariège

Par Epoch Times avec AFP
18 mars 2025 17:12 Mis à jour: 18 mars 2025 18:15

Le procès d’un chasseur de 81 ans s’est ouvert mardi devant le tribunal correctionnel de Foix où il est accusé d’avoir abattu une ourse qui venait de l’attaquer, lors d’une battue au sanglier dans les Pyrénées.

« Ce n’est pas le procès des anti-ours ou des pro-ours, ni des pro-chasse ou des anti-chasse », a déclaré en préambule la présidente du tribunal.

Le principal prévenu est jugé pour « destruction d’espèce protégée », l’ours étant une espèce en voie d’extinction dans le massif pyrénéen, malgré un programme de restauration de la population.

Quinze autres chasseurs ayant également participé à la battue sont poursuivis pour diverses infractions, notamment chasse dans une zone interdite, la réserve naturelle du Mont-Valier, sur les hauteurs du village de Seix.

Pas connaissance de la présence de l’ours « à cet endroit-là »

« La limite est mal marquée (…) on ne sait jamais vraiment où on est », s’est défendu à la barre Jean-Claude Estaque, l’un des deux responsables de la battue interrogés par la présidente. « Votre obligation de chasseur est de savoir où vous chassez », rétorque le procureur.

L’enquête a mis en évidence que le plantigrade a été tué à 400 mètres à l’extérieur de la zone de chasse autorisée.

La consigne – rappelée ce jour-là « comme à chaque fois » – est d’arrêter la chasse en cas de présence de l’ours, ajoute Jean-Marc Doumenc, l’autre chef de battue. Mais les chasseurs n’avaient pas connaissance de la présence de l’ours « à cet endroit-là ».

Ce 20 novembre 2021, en début d’après-midi, près du Rocher de l’aigle, dans une zone difficile d’accès à 1300 mètres d’altitude, deux oursons sortent d’un bois, devant le chasseur stupéfait. Puis leur mère apparaît et le charge, blessant le chasseur aux jambes et le traînant sur plusieurs mètres.

Une participante à la chasse, sapeur-pompier de métier, lui a donné les premiers soins et contenu une hémorragie, le temps qu’il soit évacué par hélicoptère, puis hospitalisé.

Le taxidermiste Brian Aiello travaille sur la peau de l’ourse Caramelles dans le laboratoire de taxidermie du Muséum de Toulouse, le 17 janvier 2023. Sous les doigts habiles de Brian Aïello et d’Adam Huyet, la silhouette de Caramelles, reconstituée en polyéthylène – un matériau léger et facile à sculpter – reprend sa forme arrondie avant d’être recouverte de la peau de l’ourse. (Photo LIONEL BONAVENTURE/AFP via Getty Images)

« En état de légitime défense » ?

Il « était en état de légitime défense, il a tiré. Il aurait dû la laisser faire? Non, il a sauvé sa peau », a déclaré avant le procès Jean-Luc Fernandez, président de la fédération de chasse de l’Ariège.

Dans le camp de la partie civile, la notion de légitime défense passe mal. « Dans quelle mesure peut-on faire valoir l’état de nécessité, alors qu’on a commis une série d’infractions qui ont conduit à la mort de l’ourse Caramelles », s’est aussi demandé Alain Reynes, de l’association Pays de l’ours, pionnière dans la défense du plantigrade dans les Pyrénées.

Une vingtaine d’associations se sont portées partie civile, dont Pays de l’ours, Ferus, France nature environnement, l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS), One Voice.

L’accident de chasse est survenu en Ariège, un département rural et montagneux, où vivent la majorité des 86 ours des Pyrénées, selon une estimation de 2023.

Un département où leur présence est très contestée par les éleveurs, qui se plaignent des prédations de l’ours. Des centaines de brebis sont tuées chaque été.

La France a engagé dans les années 1990 un programme visant à rétablir la population d’ours bruns des Pyrénées, en réintroduisant des mâles et des femelles adultes venant de Slovénie.

La chasse « ne doit pas nuire à l’environnement »

« Par ce procès c’est la présence de l’homme dans nos territoires de montagne qui est en question », ironise le président de la chambre d’agriculture d’Ariège, Philippe Lacube.

« Nous tenons à exprimer la solidarité de la profession agricole aux chasseurs et tout particulièrement au chasseur qui a déjà été marqué dans sa chair par la sauvagerie de l’ours qui l’a attaqué, et qui doit subir aujourd’hui la pression psychologique de ce procès », a ajouté cette figure emblématique du mouvement anti-ours.

Le fait que la chasse était fréquente dans cette zone « n’enlève rien à la caractérisation du délit ». « Nombre des pièces du dossier démontrent une connaissance des limites de la réserve, avec des marquages sur les arbres », a souligné, avant le procès, Julie Rover, avocate de 12 associations.

« Les parties civiles veulent faire passer un message. Elles ne sont pas opposées à la chasse, mais pour qu’elle ne nuise pas à l’environnement, il faut faire respecter ses règles », a-t-elle dit. « Les ours sont menacés d’extinction, la disparition d’une femelle reproductrice, c’est grave et préjudiciable » pour la survie de l’espèce.

Le procès doit durer jusqu’à mercredi, la décision devrait être mise en délibéré.

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