Pendant des siècles, l’histoire du monde a été tracée par l’Europe, puis s’est faite en Europe. Au cours du XXe siècle, avec la sanglante Première Guerre mondiale, puis la Seconde Guerre mondiale, et enfin la Guerre froide, l’Europe a été constamment au cœur de l’histoire. Pour la première fois, avec les événements récents, le Moyen-Orient lui dame le pion et l’histoire avance ailleurs, n’en déplaise à une Europe perdue dans ses difficultés économiques et ses faiblesses politiques.
L’Occident est manifestement dépassé par la rapidité des bouleversements stratégiques survenant au Moyen-Orient. Il y a également une sorte de dépit occidental face à la manière dont les pièces de l’échiquier sont bousculées ou éliminées par l’évolution de la réalité géopolitique grâce à la seule volonté politique et à l’action militaire parfois disproportionnée d’Israël. Il ne peut en être autrement. Alors qu’Israël mène une bataille sur sept fronts – à Gaza, en Cisjordanie, au Liban, en Syrie, en Irak, au Yémen et en Iran – l’Europe occidentale peine à stabiliser le seul front qui l’oppose à la Russie en Ukraine.
Et ce n’est certainement pas fini. Le 27 septembre dernier, le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a annoncé à la tribune des Nations unies qu’il faut un « changement de régime » en Iran, préparant ainsi l’opinion publique à la poursuite des opérations militaires, malgré le risque grandissant d’élimination pure et simple de tous les otages détenus par le Hamas.
Pour la première fois, le régime iranien se retrouve sur la défensive, son système d’alliances ébranlé et sa crédibilité en tant que puissance régionale clairement entamée par l’offensive israélienne. Dans ce contexte défavorable, l’Iran a fait le pari stratégique risqué d’une confrontation directe avec Israël, dont l’issue est imprévisible pour le régime.
Armes nucléaires, missiles et milices armées : ce triptyque, qui constitue la base de la défense du régime, a été ébranlé par les lourdes pertes infligées par Israël au Hezbollah. L’Iran ne peut que constater que la composante la plus importante de son réseau de milices arabes, qui comprend les milices irakiennes, les Houthis yéménites et, bien que sunnite, le Hamas palestinien, a été considérablement affaiblie.
Les mollahs iraniens ont perdu gros avec la destruction substantielle du Hezbollah. Seront-ils assez imprudents pour riposter de manière encore plus agressive contre Israël ? Cela semble peu probable, car avec l’aide des États-Unis, Israël pourrait saisir cette occasion pour détruire le programme nucléaire iranien une fois pour toutes. L’histoire s’accélère et les Européens restent de simples spectateurs.
Les moultes tergiversations et revirements, notamment de la part de la France, n’ont guère contribué à façonner la position européenne. Parti d’une position très pro-israélienne, avec une proposition sortie de nulle part d’une coalition internationale contre le Hamas, sur le modèle de celle mise en place contre l’État islamique, qui n’a même pas reçu un accueil favorable dans les capitales arabes les plus proches de Paris, le Président Macron a complètement changé de position, durcissant progressivement le ton jusqu’à remettre en cause les livraisons d’armes à Israël.
Il est légitime de se poser la question pourquoi l’Europe ne parvient plus à peser sur les grands dossiers internationaux. Il s’agit avant tout d’un problème de leadership. Le continent européen ne produit plus de dirigeants compétents, confiants et coriaces. De même, l’alignement total de l’Europe sur les États-Unis achève de lui faire perdre son indépendance politique et géostratégique, au détriment de ses intérêts fondamentaux.
L’éclatement de la pire phase de violence dans le conflit israélo-palestinien depuis des décennies marque clairement un tournant dans l’érosion du rôle de l’Europe dans le monde. Il y a encore quelques mois, l’image donnée était celle d’une Europe unie pour soutenir l’Ukraine contre la Russie. L’unité politique en faveur de l’Ukraine s’est maintenue, malgré certaines difficultés. Les sanctions contre la Russie, l’accueil de millions de réfugiés ukrainiens et l’augmentation constante de l’aide militaire et économique ont été les piliers d’une stratégie européenne commune et concertée.
Or, les événements survenus depuis le 7 octobre 2023 ont brutalement mis en lumière les contradictions de l’Europe qui a fait preuve d’une cacophonie déconcertante : suspension puis rétablissement de l’aide de l’UE aux Palestiniens, messages ambigus sur la nécessité pour Israël de se défendre dans les limites du droit international humanitaire, etc.
En effet, les 27 États membres ont d’abord insisté à l’unisson sur le droit d’Israël à se défendre, mais des désaccords sont rapidement apparus. Par exemple, en octobre 2023, le consensus laborieusement forgé à Bruxelles a volé en éclats lors de discussions parallèles à l’Assemblée générale des Nations unies à New York. Huit États membres européens ont approuvé la résolution appelant à une « trêve humanitaire immédiate » dans la bande de Gaza (France, Irlande, Belgique, Luxembourg, Espagne, Slovénie, Portugal et Malte), tandis que quatre ont voté contre (Autriche, République tchèque, Hongrie et Croatie) et qu’une majorité d’États membres de l’UE (15 pays, dont l’Allemagne et la Pologne) se sont abstenus. L’Europe s’est ainsi enfermée dans son rôle traditionnel au Moyen-Orient : jouer les seconds rôles et laisser la responsabilité de la solution aux États-Unis.
Six éléments clés définissent les contours de cette crise dans le contexte de tensions croissantes au Moyen-Orient. Le premier est que, dans la recherche d’une solution à la crise, l’Europe n’existe pas. Deuxièmement, l’ONU est totalement marginalisée et ne sert qu’à compter les morts et les blessés. Troisièmement, Israël et les États-Unis attendent les résultats des élections du 5 novembre pour décider des prochaines étapes, mais il est peu probable que Netanyahou veuille mettre fin aux hostilités avant ou même après ces élections. Quatrièmement, la Chine et la Russie restent en retrait et leur jeu d’influence se déroule dans l’ombre. Cinquièmement, les graves conséquences économiques de la guerre commencent déjà à se faire sentir dans tous les pays de la région. Sixièmement, pour la première fois, l’Iran subit une telle pression militaire israélienne tant sur ses alliés que sur son régime.
Les enjeux sont donc historiquement élevés et les défis à surmonter pour régler la crise au Moyen-Orient sont sans précédent.
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