NEW DELHI – L’Inde et la Chine ont convenu de retirer leurs troupes du lac Pangong Tso le long de leur frontière contestée dans l’ouest de l’Himalaya après une impasse militaire de 10 mois, a déclaré le ministre indien de la Défense Rajnath Singh à la chambre haute du Parlement de ce pays le 11 février.
« La mise en œuvre de cet accord permettra de rétablir substantiellement la situation qui existait avant le début de l’impasse de l’année dernière », a déclaré M. Singh.
Les relations bilatérales entre les pays voisins se sont détériorées depuis un affrontement sanglant dans la vallée de Galwan le 15 juin 2020. Cela a créé une impasse militaire intense le long de la frontière de facto dans la région du Ladakh, en particulier au niveau du lac, dont les deux tiers se trouvent en territoire contrôlé par la Chine.
Après le neuvième cycle de pourparlers militaires de haut niveau du mois dernier, les troupes des deux parties ont commencé à se retirer du lac le 10 février ; M. Singh a déclaré que le désengagement serait achevé en 48 heures.
« Nous espérons que ces mesures conduiront finalement à la restauration du statu quo. Je tiens à rappeler à la Chambre que nous n’avons rien perdu », a-t-il déclaré.
Chaque côté va également retirer toutes les structures militaires construites après le mois d’avril 2020 et les patrouilles seront suspendues. Les patrouilles reprendront après que les deux pays auront conclu un accord à la suite de pourparlers militaires et diplomatiques de haut niveau, a déclaré M. Singh, qui a salué l’armée indienne pour ses efforts.
« Notre nation se souviendra toujours des sacrifices faits par nos braves soldats, qui ont été le fondement de ce désengagement au lac Pangong Tso », a-t-il déclaré.
Le major retraité G.G. Diwedi, qui a servi au Ladakh et a également été attaché de défense de l’Inde en Chine, en Corée du Nord et en Mongolie pendant trois ans, a déclaré à Epoch Times que le lac Pangong Tso avait une immense valeur stratégique, car c’est une voie par laquelle les forces militaires se dirigent vers le Chishul Bowl et Leh, la capitale du Ladakh. Il a souligné que le désengagement a une importance significative.
« C’est un processus complexe et fastidieux, qui implique le retrait des troupes et des équipements déployés, selon un calendrier préétabli, supervisé par un mécanisme de vérification », a-t-il déclaré. « Au cas où le statu quo du 20 avril serait rétabli, cela signifiera certainement un succès pour l’Inde. »
Les experts avertissent l’Inde
Le Dr Satoru Nagao, chercheur non résident à l’Institut Hudson de Washington, D.C., a déclaré à Epoch Times que la baisse des tensions n’est probablement que temporaire.
« La Chine va négocier avec l’Inde et apaiser la tension temporairement. Cependant, au printemps, les conditions seront réunies pour que la Chine reprenne sa provocation », a déclaré M. Nagao, dont le principal domaine de recherche est la coopération en matière de sécurité entre l’Inde, la Chine et les États-Unis.
M. Nagao a indiqué que la session d’hiver est extrêmement froide dans le secteur du Ladakh où les températures variaient le 11 février de – 4° à – 17 °C.
« Avant la prochaine série de provocations, la Chine veut que ses soldats se reposent », a-t-il déclaré, tout en expliquant les opérations de désengagement.
Le lieutenant général à la retraite Kamal Davar, premier directeur général de l’Agence de renseignement de la défense de l’Inde et ancien chef adjoint de l’état-major de la défense intégrée, a averti que l’Inde devait être prudente.
« L’Inde doit constamment s’affirmer et ne pas être la proie des machinations des Chinois rusés », a déclaré Davar, un ancien commandant général des forces indiennes au Ladakh.
« Nous devons nous en tenir à notre position de repli chinois sur les positions d’avant avril 2020. Ils doivent aussi évacuer leurs transgressions dans les plaines de Depsang », a-t-il déclaré. Les plaines de Depsang, qui se trouvent à 385 km au nord du lac Pangong Tso, sont une autre zone de tension militaire.
Les enjeux mondiaux de la géopolitique
La Chine a décidé de se désengager militairement après avoir observé les réponses récentes du président américain Joe Biden aux questions géopolitiques connexes dans la région, a déclaré M. Nagao.
« La Chine exploite la situation des États-Unis qui passent de Trump à Biden », a-t-il dit, notant qu’il existe des inquiétudes quant à la capacité de Biden à poursuivre une politique forte à l’égard de la Chine.
« Par exemple, si l’Inde et la Chine s’affrontent comme en juin 2020, l’administration Biden va-t-elle clairement soutenir l’Inde comme l’administration Trump ? » a demandé M. Nagao.
Pendant ce temps, la Chine avance ses pions sur l’échiquier, a-t-il poursuivi.
« La Chine essaie de persuader d’autres pays en assouplissant sa position et en apaisant temporairement la tension. Cependant, une telle position ne signifie pas une promesse d’arrêter les provocations [futures] », a-t-il analysé. « Si la Chine comprend que Biden ne soutiendra pas clairement l’Inde, la Chine peut à nouveau provoquer son voisin, à tout moment »
L’expert basé à Tokyo a fait référence à un discours de Biden ce mois-ci, dans lequel il a mentionné que « l’Amérique est de retour ».
« Il a mentionné l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afghanistan et la Chine, etc. Mais il n’a pas mentionné l’Inde, l’Asie du Sud-Est, l’Indo-Pacifique et le Quad[Quadrilateral Security Dialogue, un partenariat informel mis en place pour contrer l’influence grandissante de Pékin -ndlt], à l’exception de la Birmanie. Je comprends, d’après cette remarque, que son idée est la politique étrangère américaine traditionnelle », a déclaré M. Nagao.
Par politique étrangère traditionnelle, M. Nagao suggère que les États-Unis, sous la direction de M. Biden, se concentreront davantage sur l’Europe et le Moyen-Orient.
« Dans un avenir proche, l’administration Biden adaptera la situation et mettra en ouvre une approche plus actualisée de sa politique étrangère. Mais avant cela, la Chine aura une opportunité », a-t-il conclu.
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