Los Angeles : « C’était une sacrée bataille », un gardien raconte comment il a sauvé son immeuble des incendies

Par Epoch Times avec AFP
14 janvier 2025 12:31 Mis à jour: 14 janvier 2025 12:31

Au milieu des ruines calcinées de Pacific Palisades, Jeff Ridgway promène sa chienne Abby, comme si de rien n’était. Contrairement aux dizaines de milliers de personnes chassées par les flammes, ce concierge a refusé d’évacuer.

Cela fait maintenant une semaine qu’il est retranché chez lui dans ce quartier huppé de Los Angeles, après avoir défendu son immeuble avec des tuyaux d’arrosage. « C’était une sacrée bataille », raconte à l’AFP ce Californien de 67 ans, en montrant l’eucalyptus noirci qu’il a empêché de brûler, juste devant le bâtiment. « Mais je suis têtu, je me suis dit : ‘‘je ne me laisserai pas vaincre, il n’y a pas moyen’’. »

Après quasiment 35 ans passés ici, le gardien tenait à faire son maximum pour sauver les 18 appartements de cette petite résidence. Lorsque la ville s’est retrouvée à court d’eau, il a pris des seaux pour puiser dans la piscine. « J’avais le sentiment d’avoir une certaine responsabilité, à la fois vis-à-vis de mon logement et de mes possessions, mais aussi de veiller sur leurs affaires à eux », lâche-t-il.

Les abords de Los Angeles sont toujours ravagés par plusieurs feux, qui ont fait au moins 24 morts. À Pacific Palisades comme à Altadena, les villes les plus touchées, des barrages de police et de militaires empêchent la plupart des rescapés de rentrer chez eux.

M. Ridgway, lui, ne veut pas finir dans une chambre d’hôtel froide ou un centre d’hébergement. Alors il campe dans son appartement, malgré le spectacle de désolation sous ses fenêtres. Les locataires de son immeuble lui ont fait livrer des vivres, grâce à l’aide d’un policier bienveillant : bouteilles d’eau, clémentines, tomates… Le gardien a de quoi tenir « au moins deux semaines ».

Il a même reçu des chaussettes et du poulet séché pour sa chienne. « Elle est très contente de sa nourriture. Et si elle est heureuse, je le suis aussi », dit-il, en regardant son épagneul nain avec tendresse.

« J’ai besoin d’une douche »

Sans électricité, il porte les mêmes vêtements depuis des jours. « J’ai besoin d’une douche », sourit-il dans son veston en tweed et son jean recouvert de suie. « Et elle a besoin d’un bain. Je commence à la surnommer ‘‘Souillon’’, car elle est devenue tellement sale. » Ces conditions rustiques sont toutefois loin de décourager cet Américain, qui évoque avec nostalgie ses séjours en camping dans le parc naturel de Yosemite.

Car bien au-delà de son immeuble, cet ancien libraire est tombé amoureux de Pacific Palisades. Pour lui, ce coin de collines surplombant l’océan n’est pas simplement un repaire de célébrités, dont Anthony Hopkins et Rita Moreno ont été les maires honoraires. « C’est un Shangri-La », insiste-t-il, en référence au monastère tibétain imaginaire rêvé par l’écrivain James Hilton, comme un parangon de beauté et de quiétude. « C’est une vraie communauté solidaire, qui a une grande histoire. »

Le quartier abrite la villa Getty, qui compte une collection inestimable de statues antiques. Les pionniers du design Charles et Ray Eames y ont également construit un studio à flanc de colline. Avec son extérieur de verre et ses blocs de béton coloré, la villa reste un symbole de l’architecture moderne du XXe siècle.

Ces joyaux ont jusqu’ici été épargnés par les flammes. Mais à quelques encablures de l’appartement de M. Ridgway, le centre commercial et ses façades richement ornées datant de 1924 ne sont plus que ruines. « Notre immeuble est probablement l’un des plus vieux de la ville maintenant », soupire le concierge, dans sa résidence des années 1950.

Chaque année, il attend avec impatience les célébrations du 4 juillet, la fête nationale américaine. Elles attirent des dizaines de milliers de personnes à Pacific Palisades, venues admirer les parachutistes lâchés depuis le ciel pour atterrir sur Sunset Boulevard.

Malgré ces incendies destructeurs, il reste persuadé que ce petit parfum de paradis, qui l’a empêché de fuir, permettra au quartier de se relever. « Même sans maison, chacun de ces terrains vaut encore un ou deux millions de dollars », rappelle-t-il. « Nous avons toujours les montagnes, l’océan, et surtout un ciel bleu et une bonne qualité de l’air. C’est ce qui ramènera les gens. »

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