Stations balnéaires ciblées par des frappes russes, hôtels vides ou fermés : depuis le début de la guerre, le tourisme est à l’arrêt en Ukraine, privée d’une importante source de revenus. Mais pour Kiev, ce secteur reste prometteur et « crucial » pour reconstruire le pays.
« Quand la guerre sera terminée, le tourisme jouera un rôle clé pour permettre à l’Ukraine de se relever et de relancer son économie », assure auprès de l’AFP Mariana Oleskiv, présidente de l’Agence nationale pour le développement touristique en Ukraine, un organisme gouvernemental créé en 2019.
À la tête d’une délégation ukrainienne invitée au Salon international du tourisme Fitur, l’un des plus gros événements du secteur qui se tient jusqu’à dimanche à Madrid, Mme Oleskiv juge nécessaire de « travailler » d’ores et déjà pour préparer cette reprise.
« Il ne s’agit pas bien entendu d’inviter les touristes à venir maintenant: il n’est pas question de leur faire prendre des risques, même si dans certaines régions d’Ukraine le risque est actuellement faible », souligne la jeune femme, à la tête de cette agence depuis mars 2020.
« Mais quand le pays sera de nouveau sûr, nous voulons être prêts pour inviter les gens à venir visiter l’Ukraine », ce qui implique d’avoir « suffisamment de partenaires pour promouvoir » le pays et en faire une « importante destination », ajoute-t-elle.
Jusqu’au début des années 2010, le pays recevait en moyenne près de 20 millions de visiteurs étrangers par an, en provenance principalement de Russie et d’Europe de l’Est, selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). Ce qui faisait de l’Ukraine le huitième pays le plus visité d’Europe.
Mais ce chiffre a chuté à près de 12 millions en 2014 avec le début de la guerre du Donbass et l’annexion par la Russie de la Crimée, l’une des principales régions touristiques du pays. Et il s’est littéralement écroulé avec l’invasion de l’Ukraine déclenchée par la Russie le 24 février.
« Il y a encore un peu de tourisme domestique, par exemple dans les montagnes des Carpates », qui accueillent des visiteurs cherchant à fuir pour quelques jours « le stress », les « destructions » et « les coupures d’électricité provoquées dans les villes par les attaques russes », explique Mariana Oleskiv.
Mais les touristes étrangers ont quant à eux complètement disparu, sans qu’il soit possible de dire quand ils pourront revenir, au vu de l’évolution du conflit enlisé dans une guerre de positions.
« À Kiev ou Lviv (ville de l’ouest du pays où vivent de nombreux déplacés), l’industrie hôtelière arrive à survivre », grâce aux « délégations internationales », aux « journalistes » et « humanitaires », souligne Mme Oleskiv.
Mais dans des villes comme Odessa, ancien « haut-lieu touristique » situé « près de la ligne de front », et autrefois « très dynamique », la situation est « beaucoup plus compliquée », insiste-t-elle.
Réseau ferroviaire détérioré, bâtiments historiques et culturels détruits… Pour l’Ukraine, qui tirait avant la guerre 2% de son produit intérieur brut (PIB) du tourisme, la remise en route du secteur ne sera pas aisée et impliquera de lourds investissements.
« Cela va prendre du temps », reconnaît Mariana Oleskiv. Mais l’Ukraine, réputée pour ses stations balnéaires au bord de la Mer Noire, ses cités historiques ou ses stations de ski familiales, a « le potentiel » pour rebondir et « attirer les visiteurs », explique-t-elle.
Ces dernières années, Kiev avait déjà commencé à se tourner vers de nouveaux marchés comme l’Arabie saoudite et les pays du Golfe, grâce à des exemptions de visa et de nouvelles dessertes aériennes. Une stratégie de diversification qui pourrait être prolongée.
Reste le problème d’image, l’Ukraine étant désormais associée aux destructions et à la guerre, de nature à dissuader les visiteurs. « C’est un défi », d’autant qu' »il est important pour nous de montrer les conséquences du conflit et des crimes commis par la Russie », reconnaît Mme Oleskiv.
Mais « quand la guerre sera finie, nous pourrons promouvoir une autre image », en misant sur un autre aspect mis en lumière par le conflit : l’image « d’un peuple courageux, qui continue à se battre alors que personne ne pariait sur lui », insiste la jeune femme.
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