ÉCONOMIE

Pourquoi la France reste attractive pour les investisseurs étrangers ?

mai 14, 2024 11:51, Last Updated: mai 14, 2024 11:55
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Le sommet Choose France 2024 qui s’est déroulé au château de Versailles le 13 mai a récolté cette année 15 milliards d’euros d’investissements étrangers, un record selon l’Élysée qui a dévoilé les 56 projets pouvant créer potentiellement 10.000 emplois.

Malgré le french bashing, le pays garde structurellement une attractivité pour les investisseurs étrangers, avec en ligne de mire une ré-industrialisation de la France et la poursuite d’une plus grande implication dans l’écologie.

La portée de ces investissements reste pourtant difficile à mesurer et mettra plusieurs années à se concrétiser.

La France leader en Europe de l’attractivité économique 

La France a conservé pour la cinquième année consécutive sa médaille de pays le plus attractif en Europe pour les projets d’investissements étrangers, selon le baromètre annuel publié par le cabinet EY. Selon un autre baromètre du cabinet Kearney, le pays se place au 6e rang au niveau mondial, derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne, en se basant sur d’autres critères.

Pour la France, les projets d’implantation ou d’extensions d’usines se sont envolés en 2023, ils ont plus que doublé par rapport à 2015, loin devant les concurrents allemands et britanniques, montrent les statistiques du cabinet EY.

« Après des années de désindustrialisation, la France réussit à arrêter l’hémorragie », selon Thomas Grjebine, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii), qui note une stabilisation de la part du secteur manufacturier dans le produit intérieur brut (PIB) et des créations nettes d’usines depuis 2018.

Le plus gros investisseur cette année est Microsoft. Le groupe américain consacrera 4 milliards d’euros à un nouveau centre de données dans l’est de la France et à l’agrandissement d’autres en région parisienne et près de Marseille : l’investissement le plus important que nous ayons jamais réalisé » en France, a déclaré son président Brad Smith à l’AFP.

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Outre Microsoft, figurent parmi les projets une nouvelle usine d’engrais bas carbone dans la Somme (FertigHy, 1,3 milliard d’euros) et des investissements d’Amazon pour développer ses infrastructures cloud en région parisienne et son infrastructure logistique en Auvergne-Rhône-Alpes (1,2 milliard).

S’ajoutent également des lignes de production de frites et pommes de terre de McCain (350 millions) dans le Pas-de-Calais et dans la Marne. Dans le secteur pharmaceutique, Pfizer, AstraZeneca et GSK ont également fait des annonces.

Les raisons de l’attractivité de la France

« Avant de venir en France j’avais quelques stéréotypes » a déclaré l’investisseur Taavi Madiberk, cofondateur estonien de la société Skeleton Technologies qui vient d’annoncer 600 millions d’euros d’investissements pour développer des batteries de nouvelle génération dans la région Occitanie.  « Je voyais la France comme un endroit où les démarches prendraient beaucoup de temps, où la bureaucratie serait excessive », a-t-il poursuivi. « Or ce que j’ai observé ici est qu’il y a une vraie priorité affichée dans le fait de faire des affaires », a-t-il estimé.

Le gouvernement français se targue de leur avoir simplifié la vie au cours des sept dernières années au travers d’une baisse du taux d’imposition sur les sociétés, de la suppression de certains impôts, et d’une flexibilisation du marché du travail, à rebours de l’image généralement véhiculée d’un pays à l’instabilité fiscale et la rigidité sociale.

« Il y a une fiscalité attirante, c’est un pays pro-business », a reconnu dans les travées du château de Versailles Denis Machuel, à la tête du groupe suisse Adecco, une entreprise qui réalise un quart de son chiffre d’affaires en France et vient d’annoncer le recrutement de 3.000 personnes en CDI et 8.000 en CDI intérimaires. Les réformes ne sont toutefois pas le seul facteur, a-t-il ajouté, mettant en avant « une qualité des talents » sur le territoire.

Parmi les qualités françaises reconnues par les investisseurs étrangers figurent en effet aux premières places la qualité de la main d’œuvre et l’environnement juridique et réglementaire, selon le baromètre EY. Au bas de l’échelle, les prix de l’énergie et la compétitivité en matière de coûts sont considérés comme des handicaps.

Autre atout de la France selon Nicolas Lioliakis, associé chez Kearney et membre du groupe de réflexion Global Business Policy Council, la France affiche de bons résultats en matière réglementaire et fiscale, de stabilité politique, d’importance accordée à l’entrepreneuriat et au vivier éducatif. En outre, une étude du cabinet Kearney montre que la France tire son épingle du jeu en matière de transparence et d’absence de corruption, deux des critères prioritaires cités par les investisseurs interrogés.

Des effets difficiles à mesurer sur l’économie à court terme

La France met en avant depuis plusieurs années son statut de destination de choix pour les investissements étrangers mais les effets de cette attractivité sur l’économie mettent du temps à se concrétiser.

Ces résultats sont brandis comme le gage d’une politique économique efficace par le gouvernement qui entend réformer le marché du travail et la fiscalité des entreprises afin de les inciter à choisir la France plutôt qu’un autre pays. Les effets directs de cette politique sur l’économie sont toutefois encore difficilement mesurables à l’heure du ralentissement généralisé de la croissance en Europe.

« L’impact macroéconomique de ces projets peut mettre un peu de temps à se matérialiser », reconnaît-on à l’Élysée, précisant que « pour avoir un impact macroéconomique, il faut tenir la ligne pendant cinq, voire dix ans ».

Dans les faits, les entreprises à capitaux étrangers représentent « un petit nombre d’entreprises », remarque auprès de l’AFP Marc Lhermitte du cabinet EY : 17.500 étaient sous contrôle étranger en 2021 selon l’Insee, soit moins de 1% des entreprises en France. Mais les entreprises étrangères contribuaient aux exportations françaises à hauteur de 30% et employaient près de 12% des salariés en France en 2020, selon l’Insee.

Malgré son statut de champion en nombre de projets, la France souffre comme pour l’année précédente du nombre d’emplois créés en moyenne par projet, à 35 contre 49 en Allemagne, 61 au Royaume-Uni et 299 en Espagne, en tête du classement. L’une des raisons tient au fait que la France est surtout le lieu où les investisseurs réalisent des extensions de sites, davantage que des projets démarrant de zéro, relève EY : les deux tiers des projets annoncés en France sont des extensions, contre un quart seulement au Royaume-Uni et en Allemagne. Le Grand Londres tient par ailleurs tête à la région parisienne en matière de sièges sociaux.

Le baromètre d’EY survient un mois après celui du cabinet Kearney ayant montré que la France se plaçait en Europe derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne, selon une enquête menée auprès de 516 dirigeants d’entreprises dans 30 pays concernant leurs intentions d’investissements sur trois ans. Au niveau mondial, la France est le sixième pays du monde en matière d’attractivité pour les investisseurs étrangers. C’est la quatrième année de suite que la France se place sixième de ce baromètre, devancée cette année par les États-Unis (en tête du classement depuis douze ans), suivis par le Canada, la Chine (à la septième place l’an dernier), le Royaume-Uni (qui gagne une place) et l’Allemagne (qui perd une place).

La France subit par ailleurs une forte concurrence de ses voisins sur les gros projets industriels, à l’instar des annonces entre 2022 et 2023 des géants américain Intel et taïwanais TSMC de construire des usines de puces électroniques en Allemagne.

L’importance de rendre la France attractive

La plupart des annonces « sont des projets qui auraient vu le jour avec ou sans le sommet », tempère Sylvain Bersinger, économiste en chef au cabinet Asterès. « Le cœur de l’attractivité française » réside davantage selon lui dans le système éducatif, le cadre « juridique, fiscal, l’environnement d’innovation, le marché local ».

« Ça change beaucoup de choses d’être attractif, ça soutient une grosse partie de nos exportations et donne du carburant à fort volume sur l’innovation et la recherche et développement », relève Marc Lhermitte du cabinet EY.

L’accent est surtout mis sur les projets industriels, redevenus une priorité des États développés après la crise du Covid et l’invasion russe en Ukraine qui ont montré les limites de la désindustrialisation.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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