Les Taïwanais ont voté samedi pour désigner leur futur dirigeant, au cours d’une élection présidentielle cruciale pour l’avenir des relations avec Pékin qui revendique cette île de quelque 23 millions d’habitants.
Les bureaux de vote ont fermé peu après 16H00 locales (08H00 GMT) et les résultats sont attendus dans la soirée.
En poste depuis 2016, la présidente Tsai Ing-wen, brigue un second mandat, face à son principal adversaire, Han Kuo-yu.
Ces deux candidats ont deux visions divergentes de l’avenir de l’île et de ses relations avec Pékin, son plus grand partenaire commercial.
« Rendre la démocratie taïwanaise plus forte »
Mme Tsai, qui a voté dans la matinée et affiche une certaine distance avec l’autoritarisme de Pékin, a indiqué à la presse espérer que les Taïwanais accomplissent leur devoir de citoyen afin de « rendre la démocratie taïwanaise plus forte ».
Pour sa part, M. Han, favorable lui à un réchauffement des relations, s’est refusé à tout commentaire après son passage dans un bureau de vote installé dans un temple à Kaohsiung, la seconde plus grande ville de Taïwan dont il est maire.
Un outsider conservateur est également en compétition: James Soong, 77 ans, issu des rangs du KMT et président d’un mouvement favorable à Pékin, le Parti du peuple d’abord.
La Chine considère Taïwan comme une de ses provinces et a juré d’en reprendre un jour le contrôle, par la force si nécessaire.
L’élection présidentielle à #Taiwan, ce samedi, se déroule sur fond de tensions avec la #Chine continentale. Contre toute attente l’actuelle présidente, Tsai Ing-Wen, est favorite du scrutin.
L’éclairage sur cette « résurrection » politique avec notre journaliste @BFallevoz pic.twitter.com/KQnfnbuQRj
— FRANCE 24 Français (@France24_fr) January 10, 2020
La présidente Tsai Ing-wen, garante des valeurs démocratiques
Au pouvoir depuis 2016, la présidente Tsai Ing-wen, candidate à sa réélection, se présente comme la garante des valeurs démocratiques face à l’autoritarisme du pouvoir communiste de Xi Jinping.
Tout comme sa formation politique, le Parti démocratique progressiste (PDP), qui milite traditionnellement pour l’indépendance, Mme Tsai rejette le principe de l’unité de l’île et du continent au sein d’une même Chine.
Cette position a provoqué l’ire de Pékin qui depuis son arrivée à la présidence de Taïwan n’a cessé de durcir le ton.
Pressions économiques de Pékin
La Chine a ainsi rompu toutes les communications officielles avec son gouvernement tout en intensifiant les pressions économiques et les exercices militaires.
Son principal adversaire, Han Kuo-yu, argue au contraire que de meilleures relations avec Pékin pourrait apporter des bénéfices à Taïwan sur le plan économique.
Voting stations are open across Taiwan for the #TaiwanElection this morning but it’s all rather relaxed – no massive queues where I am at Fuxing elementary school in Taipei pic.twitter.com/f2GERrcSak
— Erin Hale (@erinhale) January 11, 2020
Depuis dix jours, la publication de sondages est interdite à Taïwan. Mais jusque-là, Mme Tsai semblait bénéficier d’une confortable avance sur son adversaire.
Il y a un an cependant, peu de personnes auraient parié sur un tel scénario.
A l’époque, Tsai Ing-wen est à la peine dans les sondages et le Kuomintang (KMT, opposition) réalise une percée aux élections locales.
Han Kuo-yu, nouveau venu sur la scène politique
Un nouveau venu sur la scène politique, Han Kuo-yu, aujourd’hui principal adversaire de Mme Tsai et membre du KMT, remporte la mairie de Kaohsiung, historiquement un fief du DPP.
Il a ensuite été désigné candidat à la présidentielle de son parti. Mais l’élan autour de sa candidature a commencé à faiblir, ses détracteurs pointant notamment son manque d’expérience et ses relations trop chaleureuses avec Pékin.
La campagne électorale s’est aussi jouée sur fond d’autoritarisme du pouvoir communiste sur l’autre rive du détroit de Taïwan.
L’an dernier, le président chinois Xi Jinping a prononcé un discours particulièrement belliqueux au cours duquel il qualifié l’assimilation de Taïwan à la mère patrie d’« inévitable ».
Une peur sur laquelle Mme Tsai a capitalisé.
Taïwan est un pays indépendant et n’appartient à personne
« Nous avons besoin d’une présidente qui puisse défendre la liberté et la démocratie », a affirmé à l’AFP Vicky Hsiao, femme au foyer de 37 ans, qui a voté pour Tsai Ing-wen.
« Taïwan est un pays indépendant et n’appartient à personne », a assuré la jeune femme en référence à Pékin qui rappelle à l’envi que l’île fait partie de son territoire.
A l’inverse, M. Kuo, un vendeur de légumes de 60 ans, a confié avoir voté pour Han Kuo-yu « parce qu’après quatre ans au pouvoir, Tsai Ing-wen et son gouvernement ont de mauvais résultats sur le plan économique et les relations avec Pékin ».
Taïwan, qui a sa monnaie, son drapeau, son armée, sa diplomatie et son gouvernement est de facto séparée politiquement de la Chine depuis sept décennies. L’île n’est toutefois considérée comme pays indépendant que par une poignée de capitales dont le nombre a fondu ces dernières années.
Les électeurs ont également suivi avec inquiétude le refus de Pékin d’accéder aux demandes des manifestants pro-démocratie à Hong Kong et la politique répressive de la Chine à l’égard des musulmans ouïghours dans la province du Xinjiang, frontalière de plusieurs pays d’Asie centrale.
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