Tout ce à quoi le peuple ouïghour est confronté aujourd’hui en Chine sera la réalité du monde entier si le Parti communiste chinois n’est pas stoppé, a déclaré une militante ouïghoure américaine.
Rushan Abbas, qui vit aux États-Unis depuis 1989 et a la nationalité américaine, milite contre les politiques génocidaires qui visent son peuple depuis des décennies, la minorité musulmane des Ouïghours de la province occidentale du Xinjiang, en Chine.
Ancienne directrice du développement des entreprises, Mme Abbas a quitté son emploi pour défendre son peuple dans le monde entier, et pour dénoncer le génocide perpétré par le Parti communiste chinois (PCC) à l’encontre de la communauté ouïghoure.
En 2017, on a appris qu’un million d’Ouïghours et autres populations turciques étaient détenus dans des camps de concentration au Xinjiang, dit Mme Abbas. Des membres de sa famille ont disparu, dit-elle : ses beaux-parents et leurs quatre enfants, leurs conjoints, ainsi que 14 de leurs nièces et neveux.
Parce qu’elle a dénoncé ces enlèvements sur YouTube, sa sœur, Gulshan Abbas, et sa tante ont disparu le jour même.
« J’ai compris que le gouvernement chinois avait fait cela pour me faire taire », déclare-t-elle.
« Je me sens coupable lorsque je pense à ma sœur en prison, mais en même temps, si je ne peux pas juste penser à moi ou à ma famille, il y a quelque chose qui est extrêmement important pour nous tous. C’est la liberté et la démocratie dans le monde ».
C’est à cause de cette liberté que Mme Abbas a quitté son pays et émigré aux États-Unis.
« L’avenir du monde libre que nous connaissons, et que la plupart d’entre nous considèrent comme acquis, est en danger. »
Les femmes ouïghoures sont notamment amenées à être stérilisées ou à avorter de force, et environ un million d’enfants ont été retirés à leur famille. D’autres femmes sont poussées par le PCC à épouser des Chinois. « Où sont les féministes ?, » déplore-t-elle. « Où sont les personnes censées défendre les droits des enfants ? »
« Lorsque ceux qui commettent ces crimes ont l’argent et le pouvoir, alors tout le monde se tait », dénonce-t-elle.
Les hommes politiques ou les célébrités qui choisissent de détourner le regard, estime-t-elle, ne perdent pas seulement leur liberté d’expression, ils renoncent à l’avenir du monde libre, et les hommes politiques renoncent à la souveraineté de leur pays.
S’il n’est pas mis fin aux activités du PCC dès maintenant, ce sont les enfants et les petits-enfants de ces personnes qui auront à faire face à une tyrannie planétaire.
Politique d’apaisement
« J’ai été extrêmement déçue lorsque j’ai vu que le statut de ‘nation la plus favorisée’ avait été accordé à la Chine », dit-elle, en référence à l’époque où les États-Unis avaient admis la Chine au sein de l’Organisation mondiale du commerce, en 2001.
A cause de cette décision, le PCC a obtenu l’argent et l’influence dont il avait besoin pour devenir l’une des plus grandes dictatures du monde.
Toutes sortes de privilèges ont été accordés au PCC à cette époque, dit Mme Abbas, qui a tenté d’approcher les responsables militaires par l’intermédiaire de ses contacts au sein du gouvernement et leur a demandé de ne pas faire confiance au PCC.
À l’époque, elle a essayé de convaincre les gens qu’en donnant au PCC ce qu’il voulait, celui-ci n’allait jamais permettre à la société chinoise de s’ouvrir, de jouir d’une plus grande liberté ou d’être plus respectueuse des différentes religions. Selon elle, le PCC veut que les membres de la société se soumettent entièrement au parti communiste.
Le PCC ne considère pas les Ouïghours comme des personnes normales, dit-elle, car c’est la mentalité du parti communiste. Les personnes qui ont des antécédents religieux, des langues différentes, des cultures et des modes de vie différents de la culture du parti ne sont pas considérées comme normales.
Avec cette idéologie tordue du parti implantée dans ses sbires, l’ancien ambassadeur du PCC aux États-Unis, Cui Tiankai, a ouvertement déclaré à propos des Ouïghours en 2018 que « nous essayons de rééduquer la plupart d’entre eux, de les transformer en personnes normales (qui) peuvent retourner à une vie normale. »
Mme Abbas estime que les politiques d’apaisement, les récompenses, le fait que les États-Unis n’aient pas demandé que le PCC s’explique quand il a été prouvé que des internements massifs avaient eu lieu après la persécution du Falun Gong en Chine, etc, tout cela a conduit à ce que les mêmes tactiques soient utilisées à l’encontre de la population ouïghoure.
« Même aujourd’hui, avec toutes les informations que l’on a, les fuites de documents du gouvernement chinois qui confirment les politiques génocidaires, et les témoignages des victimes, les anciennes victimes des camps qui témoignent de ce qui se passe à l’intérieur de ces camps, des crématoriums continuent d’être construits à côté des camps, alors même que ces pratiques funéraires n’existent pas dans notre culture », dénonce Mme Abbas.
« Le prélèvement d’organes. Cela a commencé avec les pratiquants de Falun Gong, mais c’est maintenant très courant sur les Ouïghours. Des vidéo vantent les mérites d’organes ‘halal’ auprès des pays à majorité musulmane, dans les pays arabophones, par exemple. Tout cela se produit, et pourtant nous continuons à apaiser le PCC, qui est un régime génocidaire ».
Nul ne peut prétendre ne pas savoir
À l’ère de l’information, personne ne peut prétendre ne pas savoir ce qui se passe, dit-elle, comparant la situation actuelle à ce que certains disaient après le génocide juif pendant la Seconde Guerre mondiale.
Les Nations unies ont fini par publier une version édulcorée de tout ce dont elle a parlé. Ce rapport confirme les détentions massives, le travail forcé, la stérilisation forcée, les enlèvements d’enfants, la torture et les mauvais traitements infligés par le PCC.
Lorsque tous ces crimes seront inscrits dans les livres d’histoire, « ils ne pourront plus faire semblant de ne pas savoir », dit-elle.
Ce que le PCC fait aux Ouïghours, aux pratiquants du Falun Gong, aux Mongols du Sud ou aux habitants de Hong Kong, tout cela sort des frontières de la Chine.
Le PCC étend ses persécutions jusqu’au Canada, aux États-Unis et à l’Europe, et harcèle les citoyens occidentaux d’origine chinoise ou ouïghoure. Il a même instauré son système policier dans d’autres parties du monde.
« Comment faire confiance à un pays comme la Chine, s’il fait ce genre de choses à ses propres citoyens ? »
Elle explique la nature réelle du « piège diplomatique » que le PCC mène dans le monde entier, et parle de l’initiative « la Ceinture et la Route », qui a permis au PCC d’exercer un effet de levier sur les gouvernements de nombreux pays.
En ce sens, cette invasion et infiltration du monde par le PCC se fait avec des « visages souriants » et des « valises pleines d’argent » et cela n’apparaît pas aux gens de façon aussi évidente que, par exemple, l’invasion armée de l’Ukraine par la Russie, dit-elle.
Elle explique que la Chine devient suffisamment puissante pour faire pression sur le monde.
Prise en otage des Ouïghours de la diaspora
Le PCC peut faire pression sur les Ouïghours qui vivent à l’étranger en menaçant les membres de leur famille restés au pays, car tous les Ouïghours vivant à l’étranger ont encore de la famille au Xinjiang, dit-elle.
Il en résulte que les Chinois disent à leurs proches vivant à l’étranger de ne pas parler du génocide, de ne rien dire.
Dans certains cas, les membres du consulat du PCC appellent directement les Ouïghours vivant à l’étranger et leur disent de ne rien dire s’ils veulent revoir leurs parents en bonne santé.
« Les gens ont peur, ils sont inquiets », dit-elle, même si les membres de leur famille sont déjà en prison ou sont très âgés.
Elle donne l’exemple de son beau-père.
Elle a récemment été informée par des membres éloignés de sa famille que son beau-père était décédé en janvier dernier. La dernière fois que son mari a communiqué avec sa famille, c’était en 2017, dit-elle, ajoutant que le fait d’empêcher les gens de parler à leur famille, quand ceux-ci résident à l’étranger, est typique du type de persécution que le PCC exerce contre les Ouïghours, et que c’est ainsi que les familles ouïghoures vivent en Amérique, à l’ère de l’information.
Elle cite un autre exemple, celui d’une jeune femme, Mihray Erkin, qui étudiait au Japon pour obtenir un master en 2019. Le PCC a fait pression sur ses parents pour qu’ils la convainquent de rentrer chez elle. Elle est rentrée, et a été arrêtée par le PCC et détenue.
Quelques mois plus tard, il a été rapporté qu’elle était morte en détention.
L’avenir de l’Occident
« Un génocide n’est pas juste un événement isolé », dit-elle. « C’est toute une série d’événements qui se déroulent en dix étapes, qui vont de la classification à la discrimination, puis à l’extermination et à la négation du crime », dit-elle.
Le PCC commence par identifier un groupe, puis le diabolise en stigmatisant sa culture, son appartenance ethnique ou ses croyances. Il a ensuite recours à la désinformation et à la propagande pour susciter la haine de la société à l’égard de ce groupe. Les Ouïghours, par exemple, ont été qualifiés d’arriérés, de non civilisés et de criminels, « parce que tous les aspects normaux d’une religion sont criminalisés », dit-elle.
Mais la désinformation ne se limite pas aux frontières du PCC.
Mme Abbas est elle-même attaquée quotidiennement sur les réseaux sociaux et les médias traditionnels contrôlés par le PCC. Lorsqu’elle a redoublé d’efforts, a décidé de montrer la photo de sa sœur et a manifesté devant l’ambassade de Chine, l’ONU et le Parlement européen, un journal du PCC a publié un article sur elle, dans lequel il était dit qu’elle avait volé la photo de quelqu’un d’autre, et prétendait que cette personne était sa sœur. Quelques jours plus tard, le porte-parole du ministère chinois des affaires étrangères publiait le nom de sa sœur parmi une liste d’inculpations.
« Il s’agit de la même stratégie contre tous les groupes marginalisés », dit-elle, citant les exemples de la persécution du Falun Gong, des Tibétains et des habitants de Hong Kong.
« Toute la région a perdu la liberté et la démocratie », dit-elle à propos de Hong Kong. « Tout d’un coup, Hong Kong est devenu une partie de cette dictature. »
Si les gens ne s’expriment pas et n’essaient pas de demander des comptes à la Chine pour mettre fin à ces atrocités, les crimes se poursuivront et s’étendront au monde entier, dit-elle.
« Il suffit de regarder le peuple ouïghour aujourd’hui pour imaginer ce que sera l’avenir du monde, car ce que nous vivons aujourd’hui, tout ce à quoi le peuple ouïghour est confronté aujourd’hui, sera la réalité du monde entier demain », dit-elle. « Si nous ne nous exprimons pas maintenant, la seule voix qui nous restera sera celle du regret. »
L’oppression prend de l’ampleur à l’étranger
Mme Abbas confie qu’elle se demande parfois si elle se trouve dans un pays occidental ou en Chine.
Elle raconte qu’elle a été invitée à l’université de Columbia pour participer à une table ronde avec un Hongkongais et un activiste de Tiananmen, mais qu’à son arrivée, elle a appris que la table ronde avait été annulée. La raison en était probablement qu’une association d’étudiants chinois avait protesté, dit-elle.
« J’ai eu l’impression d’être à l’université de Pékin. »
Les universités ne sont pas les seules à agir de la sorte. Les médias choisissent régulièrement de ne pas couvrir des sujets importants sur les atrocités commises en Chine.
Dans l’un de ces reportages, Mme Abbas explique que 13 tonnes de cheveux humains ont été importées du Xinjiang vers l’Amérique et saisies à la frontière.
« Combien de personnes cela représente-t-il ? Lorsqu’une telle chose se produit, elle devrait faire l’objet d’un flash d’information dans tous les grands médias. Tous les journalistes devraient en parler », dit-elle.
Mais l’histoire n’a été couverte par personne d’autre, déplore-t-elle.
Elle explique que le PCC dispose de plans quinquennaux, décennaux et même centennaux pour atteindre ses objectifs, mais que les pays occidentaux n’ont même pas de politique claire pour traiter avec la Chine.
Elle ajoute que la Chine mène déjà une guerre contre l’Occident, et qu’apaiser le régime ne permettra pas de l’éviter.
Elle cite une petite phrase du PCC selon lequel le siècle dernier a été le siècle de l’humiliation pour la Chine et que ce siècle sera le siècle des représailles.
« Il ne s’agit pas de représailles contre les Ouïghours, les Tibétains, les Hongkongais, les adeptes du Falun Gong ou les Mongols du Sud. « Il s’agit de représailles contre l’Occident, de représailles contre la démocratie. Quand allons-nous nous réveiller et voir la réalité ? »
Elle conclut sur une note plus positive, estimant que « [ceux qui dénoncent ces crimes] font toute la différence », car tout le monde a désormais entendu parler du fait que le PCC est une dictature et qu’il mène des politiques génocidaires.
« Les militants ouïghours, les anciennes victimes des camps, les journalistes comme vous, nous faisons toute la différence », dit-elle.
« J’ai quitté ma patrie en 1989. J’ai quitté mes parents, mes amis, ma maison », dit-elle. « Je suis venue aux États-Unis parce que je cherchais la liberté et la démocratie. … Je ne cesserai jamais de me battre [pour] protéger cette liberté et cette démocratie et pour lutter contre le PCC ».
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