De nombreux cabinets sont restés fermés vendredi selon les syndicats de médecins libéraux, qui ont reconduit jusqu’à lundi soir au moins leur mouvement de grève nationale avant de nouvelles négociations tarifaires et l’examen d’une loi controversée au Sénat.
Généralistes et spécialistes libéraux étaient appelés à tirer le rideau, annuler les consultations et déprogrammer toutes les opérations prévues, hors urgences vitales, pour « reporter » les patients vers l’hôpital public et démontrer « l’importance de la médecine libérale ». Environ les deux tiers des praticiens libéraux ont suivi le mouvement selon l’intersyndicale, une participation très variable en fonction des territoires.
« On a 60-70% de grévistes en moyenne. À Paris le mouvement n’est pas très suivi mais en province, énormément se sont arrêtés », a assuré à l’AFP Philippe Cuq, président du Bloc (syndicat de chirurgiens) et porte-parole d’une toute nouvelle « intersyndicale », qui réunit 12 organisations de professionnels ou futurs médecins. « Nous appelons à poursuivre le mouvement » jusqu’à une prochaine réunion de l’intersyndicale prévue lundi soir, a-t-il ajouté, en ajoutant que « tout le monde était satisfait par la mobilisation ». En revanche, « nous n’avons eu aucune nouvelle ni du ministère, ni de l’Assurance maladie », a-t-il regretté.
Plus tôt dans la journée, Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint de la principale organisation de généralistes MG France, avait estimé à 60% la part de grévistes, avec « les plus actifs en Rhône-Alpes, dans le Grand-Est ou le Nord ». « Ce qui est surtout historique c’est que tous les syndicats, sans exception, appellent à la grève », s’est-il réjoui.
Dans le Maine-et-Loire, Olivier Leroy, responsable d’un collectif intersyndical, a recensé « 400 grévistes sur 650 généralistes. Mais ici on est organisés ensemble depuis janvier, ce qui facilite les échanges, la prise de conscience collective » face à un « service de santé en perdition », a-t-il dit.
Frédéric Thibault, chirurgien urologue et président d’une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) dans le Val-de-Marne a constaté lui « une forte adhésion de principe » à la grève, mais une « faible mobilisation, principalement liée à la surcharge de travail et aux délais d’attente » que subissent les patients du département. Toutefois « cela peut partir très vite s’il n’y a pas de signe d’une réouverture des négociations tarifaires », a-t-il indiqué.
Certains médecins libéraux exerçant dans des cliniques privées ont été réquisitionnés par les préfectures pour continuer à assurer notamment les soins d’urgence, comme à l’hôpital privé Saint-Grégoire, en Ille-et-Vilaine.
Une profession « à bout de nerfs »
La grève est organisée par une intersyndicale nationale, portée notamment par les six syndicats représentatifs (Avenir Spé-Le Bloc, CSMF, MG France, FMF, SML, et UFML-S). Tous veulent défendre une profession « à bout de nerfs ». Les syndicats dénoncent un « mépris politique » de la médecine de proximité, qui dissuade les jeunes de s’installer et fait reculer la pratique libérale au profit du salariat.
Selon l’Ordre des médecins, l’effectif à statut exclusivement libéral a baissé de 11,8% depuis 2010, alors que l’effectif des médecins salariés a augmenté de 13,4%. Les grévistes réclamaient la reprise rapide des négociations tarifaires avec l’Assurance maladie, avec « de vrais moyens ». Le 1er novembre, entrera en vigueur une revalorisation de 1,50 euro de la consultation de base (soit 26,50 euros pour le généraliste), mais tout le monde, gouvernement compris, la reconnait insuffisante.
Gardes forcées
L’intersyndicale fustige aussi la proposition de loi Valletoux, sur « l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels », qui sera examinée fin octobre au Sénat. Les spécialistes en particulier redoutent que ce texte ne permette de les contraindre à faire des gardes, voire d’être contraints d’aller les assurer à l’hôpital public. Le budget de l’Assurance maladie prévu pour 2024 est enfin jugé « largement insuffisant » face à la crise que traverse le système de santé, entre vieillissement de la population et pénurie exponentielle de médecins.
« On ne peut pas demander aux gens de prendre des décisions sérieuses et importantes qui concernent la santé de gens et parfois de façon dramatique, ce qui demande du temps, de l’investissement, en nous payant un tarif ridicule », a jugé le Dr Patrick Serey, un généraliste gréviste de 62 ans, qui ne sait pas s’il rouvrira son cabinet mardi ou poursuivra la grève : « J’ai prévenu mes patients que cela dépendrait » de la réaction à la grève du ministre de la Santé et du directeur général de l’Assurance maladie, Thomas Fatôme, a-t-il indiqué.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.