C’est un plan à 35 milliards d’euros : SNCF Réseau a entrepris d’informatiser et de rationaliser ses très nombreux aiguillages, pour créer de véritables tours de contrôle des voies ferrées. Mais la transformation est lente, faute de crédits suffisants pour le moment.
« On a des postes de 1930 ou 1940 avec des grands leviers, clac ! » Décrivait encore mardi le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou. « C’est le Far West ! » « Voilà, c’est ça le réseau français, aussi. Ce n’est pas possible, on ne peut pas rester comme ça », plaidait-il. SNCF Réseau s’active pourtant depuis 2010 à moderniser ses appareils de voie. Peu à peu.
C’ « est extrêmement lent », reconnaît volontiers Alain Quinet, responsable de la stratégie du gestionnaire public des voies ferrées. « Aujourd’hui, sur le réseau structurant on a 1500 postes d’aiguillage. Une partie est informatisée et une partie ne l’est pas encore. L’idée, c’est de regrouper ça dans une vingtaine de grands centres », expose-t-il à l’AFP.
11 centres de contrôle régionaux
Ces nouveaux centres s’appellent commandes centralisées du réseau, ou CCR, avec des variantes baptisées CCU (centres de commandement unifié) en Île-de-France. Concrètement, les postes d’aiguillage modernisés sont télécommandés depuis ces tours de contrôle régionales, actuellement au nombre de 11 à des stades de déploiement plus ou moins avancés: Bordeaux, Dijon, Lille, Lyon, Pagny-sur-Moselle, Pantin, Rennes, Saint-Denis, Strasbourg, Toulouse, Vigneux-sur-Seine…
On crée à chaque fois un centre opérationnel de gestion des circulations, ou COGC, une salle de contrôle qui permet d’agir plus rapidement en cas de circulation perturbée, et de mieux informer les voyageurs. « En général, on en profite aussi pour simplifier les plans de voie, supprimer des aiguillages inutiles, peu utilisés ou trop complexes, et essayer d’avoir des voies sans cisaillements » pour que les trains ne se coupent pas la voie, décrit M. Quinet. « Ce qui exige à la fois beaucoup d’investissements et de travail. »
À Dijon, la CCR s’est installée dans un joli bâtiment moderne au bord du canal de Bourgogne. À l’étage, une vaste salle ovale commande les aiguillages d’une partie du réseau de Bourgogne-Franche-Comté. Les agents surveillent le plan des voies représenté sur de grands écrans. L’ « opérateur doit s’assurer que l’ordre des trains est bien celui qui est attendu par le poste d’aiguillage », et éventuellement intervient pour modifier la programmation, décrit Thierry Boulay, responsable adjoint de l’établissement.
Une bonne moitié de la salle est encore inoccupée, en l’attente de pupitres pour de nouveaux tronçons appelés à être « mistralisés », c’est-à-dire reliés à Mistral, l’outil de commande informatisée du réseau. De fait, il reste pas mal de travail… quand bien même Bourgogne-Franche-Comté « est une région qui a de l’avance » sur d’autres, selon le nouveau directeur des territoires de SNCF Réseau, Jérôme Grand.
La CCR de Dijon contrôle une bonne partie de la ligne historique du PLM (Paris-Lyon-Marseille) dans la région, de même que la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône, mais de nombreux tronçons sont encore « en cours de déploiement », « en études » ou prévus pour plus tard.
Un lent déploiement à la mesure des moyens
« Jusqu’à présent, on a dépensé 2,3 milliards d’euros pour les CCR » au niveau national, note Alain Quinet. « On le fait dans le cadre de notre budget de rénovation, et donc ça se déploie très lentement en fonction des moyens, avec environ 400 millions par an », précise-t-il.
SNCF Réseau, qui manque cruellement d’argent pour rénover les voies ferrées, attend beaucoup des 100 milliards d’euros pour le rail promis par la Première ministre Élisabeth Borne d’ici à 2040. Une partie doit aller à la modernisation du réseau, dont le programme des CCR.
« Au rythme où on le fait actuellement, on aurait fini en 2070. » Avec ces crédits supplémentaires, « en 2040 ou 2050, on aura fait un gros bout », espère M. Farandou. Il restera aussi à s’occuper des quelque 700 postes d’aiguillage des petites lignes, qui ne sont pas compris dans le programme. Et à recaser les aiguilleurs qui devront changer de poste pour cause de modernisation.
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