Quand on pense aux ours polaires, on pense généralement à la glace.
Depuis des siècles, les ours polaires se sont adaptés à un réchauffement particulier du climat, se produisant chaque année, à partir de la fin juin. Cela s’appelle l’été.
Demandez au photographe canadien Martin Gregus, 26 ans, et il vous expliquera comment les ours polaires passent leur saison morte sans glace sur la terre ferme. Lui et son père, tous deux photographes et cinéastes de Vancouver, se sont rendus plus d’une vingtaine de fois dans l’Arctique pour des expéditions de documentation sur les ours pendant l’été, lorsque la glace est rare et que les ours sont nombreux sur la terre ferme.
« Ce que les gens ne réalisent pas, c’est que d’énormes parties de l’Arctique sont en fait comme de la ‘crème glacée’ en été, ça y ressemble beaucoup », explique Martin Gregus à Epoch Times. « Et ça y ressemble depuis des centaines, voire des milliers d’années. »
En 2015, lors d’un remue‑méninges pour un documentaire, il leur est venu à l’esprit d’essayer quelque chose de nouveau. « Que font ces ours polaires en été ? » s’est interrogé Martin. « Personne ne l’a couvert. » De cette idée, a émergé le lancement de leur première aventure dans le Nord.
Pendant la pandémie, en juillet et août 2021, Martin s’est mis en « quarantaine » dans le nord du Manitoba, le long de la côte de la baie d’Hudson. Ils ont séjourné à Churchill – pas exactement l’Arctique, mais tout de même à près de 1300 km du cercle polaire – et a passé 33 jours à vivre sur un bateau échoué.
Dès le premier campement, ils ont été plongés dans un paysage surréaliste. Il y avait des mamans ours et des oursons partout. Les hommes se sont parfois retrouvés entourés d’une douzaine d’entre eux. Certains matins, le duo se réveillait littéralement au son de la respiration des ours polaires devant leur fenêtre. « Dès que la glace fond, tous les ours viennent sur le rivage », explique Martin. « Ils interagissent vraiment. Ils jouent… Elles sont de bonnes mères, qui apprennent à leurs enfants comment se nourrir et tout ça. »
Dans une telle proximité, les animaux se sentent à l’aise avec les hommes, se mêlant à eux jusqu’à 20 mètres, tout en offrant de nombreuses occasions de prendre des photos. Martin a repéré une maman ours qu’il espérait voir s’allonger sur un carré de fleurs d’épilobe pour allaiter son petit – un cliché rare en effet ! Puis c’est arrivé. « Alors je suis sorti et j’ai rampé jusqu’aux fleurs pour m’approcher le plus possible. Je ne devrais pas dire ‘ramper’ [car je] communique avec les ours pour qu’ils sachent que je suis là, je ne veux pas les surprendre. Puis j’ai réussi à obtenir cette seule photo que j’attendais depuis quatre jours. »
Il faut de la patience. Il faut développer un rapport avec ces énormes mammifères. Mais c’est payant. « C’est une question de temps. C’est un jeu d’attente. La raison pour laquelle je pense que nos photos sont si importantes et pourquoi elles ont l’air d’être ce qu’elles sont, c’est parce que nous passons littéralement beaucoup de temps avec ces animaux, de sorte qu’ils sont extrêmement calmes autour de nous et, de la même manière, nous sommes autour d’eux. »
« On construit vraiment cette relation avec ces ours et on commence en quelque sorte à les considérer comme des amis, presque comme si on en savait tellement sur chacun d’entre eux que c’en est magnifique. » Les hommes en sont venus à reconnaître chaque ours non seulement par ses caractéristiques physiques, mais aussi par son comportement. Année après année, ils les regardent grandir.
Martin a capturé la scène d’un ours polaire nageant tandis qu’une vague s’abat sur son corps. Cette photo lui a valu d’être nommé photographe de la vie sauvage de l’année à Londres en 2021. Ce sont les « Oscars » de la photographie animalière, pas mal ! « C’était une image très forte car, en fin de compte, sept ans ou six ans se sont résumés à environ deux minutes de prise de vue », a‑t‑il déclaré. Martin a connu la célébrité avant même d’être adolescent, en remportant une mention spéciale lors de ce concours, après avoir photographié des harfangs des neiges en 2008. Son père et lui se passionnent pour la photographie et la faune sauvage depuis qu’il a 8 ans, après avoir quitté la Slovaquie pour s’installer à Vancouver.
Le photographe a appris qu’il est possible de s’approcher très près d’un ours polaire. Il peut les lire, anticiper leur réaction et se sent généralement « en sécurité » parmi eux, bien que la sécurité soit « un terme relatif ». « La frontière est mince, il ne faut pas non plus que les ours perdent complètement leur peur de l’homme. S’il n’y a pas d’ours mâles dans les environs, c’est parce qu’ils sont chassés par les Inuits locaux et qu’ils ont été effrayés. Sentant cela, les femelles sont restées avec leurs petits. Elles creusent des tanières sous les cavités des arbres ou dans des endroits similaires, ou attendent simplement que la neige se forme autour d’elles. »
Martin Gregus décrit un moment effrayant en 2021, lorsque la proximité est devenue trop grande. « J’ai pu voir l’ourse surplomber la toundra et elle s’est mise à courir vers moi », explique‑t‑il, alors qu’en réalité, elle chassait une sterne. « L’adrénaline est montée, tout d’un coup il y avait un ours polaire qui courait droit vers moi. Dans mon esprit, je me disais : ‘Est‑ce que je m’enfuis ? Est‑ce que je prends des photos ? Je suis photographe, j’ai besoin de prendre des photos mais je dois aussi rester en sécurité.’ »
Les précautions sont justifiées. Absolument. Ils apportent un seau contenant un vaporisateur anti‑ours, une corne d’ours et des fusées éclairantes. Son assistant porte une arme à feu en cas d’urgence. « J’ai dit plusieurs fois à mon garde‑ours : ‘Je préfère que l’ours me mange plutôt que tu tires’, mais ils sont là pour la sécurité », dit Martin, ajoutant qu’il n’y a pas de meilleur moyen de dissuasion que de frapper deux pierres ensemble ou d’en lancer une vers un ours qui devient trop audacieux.
« Je m’approche toujours de chaque ours, même si je le connais et qu’il a l’air gentil et câlin, comme d’un animal qui peut me tuer », déclare‑t‑il, bien qu’il ne se soit jamais senti vraiment en danger. En les côtoyant, il apprend à les connaître et peut prédire ce qu’ils feront et comment ils se comporteront avec lui. « Parfois, je me sens plus en sécurité à côté d’un ours qu’au camp », admet‑il. « Parce que quand je suis autour d’un ours que je connais et que l’ours agit calmement autour de moi, cela me rend calme, mais quand cet ours est stressé, le stress est pour une raison et … l’ourse est généralement stressée parce qu’un autre ours s’approche. »
Il y a « beaucoup de sommeil » pendant les mois d’été, spécifie Martin. Les ours qui n’hibernent pas à proprement parler conservent leur énergie à la saison du soleil. Après avoir pris des kilos en hiver, les mères enceintes hibernent à l’automne. Puis, en février, elles se réveilleront et se fieront à nouveau à la glace et à la neige, marchant directement vers la mer, avec des oursons si elles en ont, pour profiter au maximum de la saison de chasse restante.
Au fur et à mesure que sa narration s’est développée au fil des ans et qu’il a commencé à travailler avec des producteurs de documentaires, l’avènement de la cinématographie par drone s’est révélé irrésistible pour le Vancouvérois. Aujourd’hui, ses prises de vue aériennes constituent la majeure partie de son gagne‑pain. Bien que la photographie ait toujours été au centre pour Martin, il s’embarque rarement sans capacité aérienne. Il essaie de trouver un équilibre « 50/50 », dit‑il, en ajoutant : « La photographie est toujours ma passion. »
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.