La vidéo de l’attaque au couteau à Annecy jeudi matin s’est propagée sur Twitter en quelques heures, soulevant une nouvelle fois la question de la modération de contenu sur les réseaux sociaux.
« La modération de contenu est une solution qui traite un symptôme plutôt qu’une cause. Donc il faut toujours savoir que la modération sera fonctionnellement imparfaite », explique Leïla Mörch, professeure associée chez Avancity, experte en gouvernance de l’internet et modération des contenus.
Pour endiguer réellement la propagation de contenus inappropriés, il faudrait s’attaquer directement au « business model des réseaux sociaux », « l’étape la plus compliquée », estime-t-elle.
Le plus d’interactions et de réactions
En effet, « les algorithmes sont conçus pour favoriser la diffusion extrêmement rapide du contenu », rappelle Leïla Mörch. « Ce qu’ils mettent en avant, ce sont les contenus qui créent le plus d’interactions et le plus de réactions. C’est là où on a fondamentalement un problème ». Ce « système de propagation » fonctionne « aussi bien pour des vidéos de chats » que pour des contenus comme la vidéo de l’attaque d’Annecy, dont des images montrant l’assaillant s’en prendre à des enfants dans une aire de jeu se sont propagées sur Twitter quelques heures après le drame.
Sur les comptes français du réseau social, les publications de la vidéo, dont la diffusion est interdite selon la législation française, ont été supprimées au fil de la journée. Mais, au lendemain de l’attaque, les images continuent de circuler par le biais de comptes étrangers.
Internet et les impossibles frontières
« La question est : comment fait-on en sorte que, si ça circule à l’étranger, ça n’arrive pas à revenir en France ? C’est quasiment impossible », expose Leïla Mörch. « C’est extrêmement compliqué de re-frontièriser l’Internet. Les seuls qui y arrivent sont les régimes autoritaires ou les régimes semi-autoritaires ».
Pour Justine Atlan, présidente de l’association e-Enfance, spécialiste de la modération des contenus haineux sur les réseaux sociaux, « l’universalité d’internet » est devenue « une vraie difficulté ». « Les plateformes obéissent théoriquement au régime légal de là où se situent les comptes. Les comptes français doivent répondre à la loi française mais, par exemple, les comptes américains de Twitter subissent la loi américaine ». « Ça supposerait que ce que l’américain publie ne soit visible qu’en Amérique », poursuit-elle.
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