« La violence n’est jamais justifiée ni justifiable », a estimé Gabriel Attal mardi à propos des violences qui secouent depuis plusieurs jours la Nouvelle-Calédonie, où 82 personnes ont été interpellées, avant le vote des députés sur une révision constitutionnelle décriée par les indépendantistes. Le couvre-feu a été décrété pour la nuit de lundi à mardi et Gérald Darmanin a indiqué dépêcher « quatre escadrons de gendarmerie mobile supplémentaires » pour Nouméa.
Des magasins pillés, des maisons incendiées et des tirs sur les gendarmes : la violence s’est déchaînée dans la nuit de lundi à mardi en Nouvelle-Calédonie avant le vote à l’Assemblée nationale à Paris sur une révision constitutionnelle décriée par les indépendantistes.
« Rétablir l’ordre, le calme et la sérénité »
« La priorité, évidemment, pour nous, c’est de rétablir l’ordre, le calme et la sérénité », a ajouté le Premier ministre en marge d’un déplacement en Savoie. Gabriel Attal, pressé par trois de ses prédécesseurs de reprendre la main sur ce dossier piloté historiquement par Matignon, a aussi assuré qu’il « serait au rendez-vous (…) pour avancer dans le dialogue » dans ce dossier très sensible.
🇳🇨#NouvelleCalédonie : situation insurrectionnelle à #Nouméa alors que les indépendantistes se soulèvent contre le dégel du corps électoral.
Les écoles resteront fermées ce mardi, tout comme la plupart des commerces et entreprises. Un couvre-feu a été instauré.
📹@ncla1ere pic.twitter.com/tfknGPmcEb
— Maxime Trédan (@MaxTredan) May 13, 2024
Le représentant de l’État dans l’archipel français du Pacifique sud, Louis Le Franc, a décrété le couvre-feu pour la nuit de mardi à mercredi dans l’agglomération de Nouméa. Il a rapporté « des tirs tendus avec armes de gros calibre, des carabines de grande chasse, sur les gendarmes ». « On n’a pas de morts, il n’y a pas de blessés graves pour l’instant, il y aurait pu y en avoir », a déclaré le haut-commissaire de la République devant la presse en appelant au calme.
Selon lui, des habitants de Nouméa ont été sortis de leurs habitations avant que leurs « domiciles soient brûlés ». Les faits se sont déroulés « essentiellement sur les quartiers Nord avec des destructions de commerces, de pharmacies et de domiciles », a-t-il indiqué.
Le président indépendantiste du gouvernement du territoire, Louis Mapou, a lui aussi exhorté la population « au calme et à la raison ».
Gérald Darmanin dépêche des renforts de gendarmes pour Nouméa
À Paris, le ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer, Gérald Darmanin, a indiqué que 54 gendarmes et policiers avaient été blessés et qualifié ces violences d’«émeutes commises par des délinquants, parfois par des criminels ». Il a fait état de 82 interpellations ces deux derniers jours lors de ces violences. Il a indiqué l’envoi de renforts, « quatre escadrons de gendarmerie mobile supplémentaires qui partent ce matin pour Nouméa ».
#Nouméa, triste bilan après une nuit d’émeutes.
11 policiers et 35 gendarmes blessés.
Des tirs à l’arme lourde.
50 commerces et
200 véhicules incendiés, pillages.
Des délinquants de 18 à 25 ans essayent de semer le chaos en #NouvelleCalédonie
Envoie du RAID, GIGN et forces… pic.twitter.com/6eL51AplUS— Officiers et Commissaires de police (@PoliceSCSI) May 14, 2024
Les pompiers de Nouméa ont dit avoir reçu près de 1500 appels dans la nuit de lundi à mardi et être intervenus sur environ 200 feux.
Selon une organisation patronale, une trentaine de commerces, usines et entreprises ont été incendiés. « J’ai un sentiment de tristesse », confie à l’AFP Jean-Franck Jallet, propriétaire d’une entreprise de boucherie sauvée des flammes par les pompiers.
Les premières altercations entre manifestants et forces de l’ordre ont commencé dans la journée de lundi, en marge d’une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle examinée par les députés à l’Assemblée nationale, qui vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales en Nouvelle-Calédonie.
Deux camps s’opposent : celui des non-indépendantistes, favorables à la réforme, et celui des indépendantistes qui y voient au contraire un passage en force de l’État pour « minoriser encore plus le peuple autochtone kanak », qui représentait 41,2% de la population de l’île lors du recensement de 2019, contre 40,3% dix ans plus tôt.
Conformément à l’article 77 de la Constitution, le corps électoral de ce scrutin est en effet gelé : il se limite essentiellement aux électeurs inscrits sur les listes lors du référendum d’autodétermination de 1998 et à leurs descendants, excluant de facto les résidents arrivés après 1998 et de nombreux natifs.
Un électeur sur cinq est ainsi privé du droit de vote aux élections provinciales, cruciales dans ce territoire où les provinces exercent de nombreuses compétences transférées par l’Etat français. Pour le ministre de l’Intérieur, qui a porté cette réforme constitutionnelle, cette disposition « n’est plus conforme aux principes de la démocratie » et « mène à l’absurde ».
Dans la crainte d’un enlisement, des éléments du GIGN, l’unité d’intervention d’élite de la gendarmerie française, du RAID, son équivalent pour la police, quatre escadrons de gendarmes mobiles et deux sections de la CRS 8, une unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, ont été mobilisés.
Tout rassemblement a été interdit dans le grand Nouméa, de même que le port d’armes et la vente d’alcool dans l’ensemble de l’archipel, a indiqué le haut-commissariat, qui a invité les 270.000 habitants de Nouvelle-Calédonie à rester chez eux.
Le gouvernement calédonien a annoncé la fermeture des lycées et collèges jusqu’à nouvel ordre. L’aéroport international est fermé et la compagnie Aircalin a suspendu ses vols mardi.
Le ministre néo-zélandais des Affaires étrangères, Winston Peters, qui devait se rendre à Nouméa cette semaine, a reporté sa visite « pour permettre aux autorités de se concentrer entièrement sur la situation actuelle ».
Les autorités s’inquiètent particulièrement de la situation dans une usine incendiée située à l’entrée de Nouméa dans laquelle une trentaine d’émeutiers étaient retranchés mardi. « Nous leur demandons instamment de quitter les lieux, en raison du risque d’explosion imminent » de deux cuves d’hydrogène situées sur le site, a indiqué M. Le Franc.
Mardi, les rues de Nouméa et de sa banlieue étaient parsemées de carcasses de voitures incendiées et débris fumants de pneus et de palettes de bois, a constaté un correspondant de l’AFP sur place. Même si la situation semblait plus calme, de nombreuses barricades restaient actives.
Alors qu’un vote solennel était normalement prévu mardi après-midi, les débats à l’Assemblée nationale n’ont pas pu être menés à leur terme dans la nuit. Le nouveau calendrier sera acté mardi matin.
Après celle du Sénat, l’approbation de l’Assemblée est nécessaire pour faire cheminer ce texte, avant de réunir le Parlement en Congrès pour réviser la Constitution, à une date qui reste à fixer.
Prônant l’apaisement, le Président Emmanuel Macron a promis dimanche de ne pas convoquer le Congrès « dans la foulée » du vote de l’Assemblée, selon son entourage, pour « privilégier le dialogue ».
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