Le Dr Maximilian Krah, tête de liste de l‘AfD (Alternative pour l’Allemagne) pour les élections européennes, devra peut-être se séparer de son assistant Jian Guo (Jian G.), au moins temporairement, celui-ci ayant été arrêté le 22 avril 2024 à Dresde par des agents de l’office de la police criminelle du Land de Saxe, selon le journal Die Zeit.
Jian G., 43 ans, est soupçonné d’avoir espionné pour le compte des services secrets chinois. On lui reproche une « activité d’agent secret dans un cas particulièrement grave ». L’Office fédéral de la police criminelle a lancé une enquête.
M. Krah a annoncé qu’il licencierait immédiatement son collaborateur si les accusations s’avéraient vraies.
Des services d’espionnage pour la Chine ?
Selon le journal télévisé Tagesschau, le procureur fédéral allemand (GBA) pense que Jian G. a espionné des opposants chinois en exil en Allemagne et a transmis les informations au ministère chinois de la Sécurité d’État (MSS). Il aurait en outre fourni des informations importantes en provenance du Parlement européen, selon Die Zeit. D’après les informations du Spiegel, le GBA reproche au suspect d’avoir servi d’informateur « depuis janvier ». Mais il est possible qu’il travaille depuis bien plus longtemps « pour un service secret chinois ».
Réactions contrastées au sein de l’AfD
Un porte-parole de l’AfD a réagi peu après l’annonce des faits par une brève déclaration :
« Les informations concernant l’arrestation d’un collaborateur de M. Krah pour soupçon d’espionnage sont très inquiétantes. Comme nous ne disposons pour l’instant d’aucune autre information sur cette affaire, nous devons attendre la suite de l’enquête menée par le procureur général fédéral. Le parti fera tout ce qui est en son pouvoir pour aider à faire la lumière sur cette affaire ».
Au sein du parti, les appréciations semblent partagées. La députée européenne Dr. Sylvia Limmer (AfD) a critiqué M. Krah via X, l’accusant d’être un « problème », notamment en raison de sa position sur la Chine « ces cinq dernières années avec sa position déviante sur la Chine, la #Russie, les #États-Unis, #Israël, les #femmes et bien d’autres choses ». M. Krah doit probablement sa candidature à l’intercession des deux porte-parole fédéraux de l’AfD, Alice Weidel et Tino Chrupalla : la première est connue pour ses années passées en Chine, le deuxième pour sa « proximité, au moins verbale, avec la Russie ».
Tantôt pour, tantôt contre le PCC – double jeu ?
Selon le Tagesschau, Jian G. est un citoyen allemand d’origine chinoise. Il serait lui-même actif « depuis de nombreuses années » en tant que critique du Parti communiste chinois (PCC) « à l’étranger » et entretiendrait en conséquence des contacts dans le milieu de la dissidence.
Selon les informations du Zeit, il jouerait un double rôle : d’une part, il se serait engagé « dans plusieurs groupes exilés chinois », parfois même en tant que « secrétaire général ». Il aurait par exemple tenté d’obtenir les noms des partisans des activistes anonymes de la « feuille blanche ». D’autre part, Jian G. serait également apparu comme un « fervent partisan du président chinois Xi Jinping » et comme un partisan du rattachement de Taiwan à la Chine.
Il y a plus de dix ans, il aurait en outre proposé aux « autorités allemandes » de travailler pour elles en tant qu’ « informateur ». Mais selon le Tagesschau, les autorités y auraient renoncé le jugeant « peu fiable », et le soupçonnant d’être un agent double de la Chine.
Krah a recruté Jian G. en 2019 et le connaissait depuis des années
Selon les informations du Tagesschau, Jian G. était entré en Allemagne en 2002 en tant qu’étudiant pour suivre des études à Dresde. Il a ensuite travaillé comme homme d’affaires – selon les recherches du Spiegel, pour la « dépendance d’une entreprise solaire chinoise à Dresde » et pour une « entreprise de commerce de LED ». Le commerçant de LED aurait également proposé « une communication transculturelle entre l’Allemagne et la Chine ».
Lors de la création d’une entreprise, Jian G. aurait fait la connaissance de son supérieur actuel, Krah, dans sa fonction d’avocat de l’époque, selon le Tagesschau. Selon le Zeit, cela se serait passé il y a plus de dix ans. A l’époque, Jian G. possédait encore une carte de membre du SPD. L’appartenance de Jian G. au SPD aurait toutefois pris fin « entre-temps ». Il serait désormais membre de l’AfD. Jusqu’à présent, Jian G. a toujours refusé de répondre aux questions de la presse sur sa vie privée.
Krah aurait embauché Jian G. en tant qu’assistant pour son bureau à Bruxelles, après avoir lui-même fait son entrée au Parlement européen pour l’AfD en 2019. Le politicien de l’AfD de Dresde aurait apprécié les qualités de Jian G. en tant que « spécialiste confirmé du commerce extérieur ». Jian G. devait l’aider « à entrer en contact avec l’attaché commercial chinois à Bruxelles », comme le rapporte Die Zeit. D’après les recherches du Spiegel, Krah serait partisan d’une « voie favorable à la Chine » au sein du parti.
D’après le Zeit, Krah et Jian G. auraient entrepris un voyage en Chine peu de temps après son embauche. Le Spiegel évoque une visite de Pékin et du géant des télécommunications Huawei en novembre 2019, à la suite de laquelle Krah aurait plaidé auprès du groupe parlementaire de l’AfD au Bundestag pour qu’il abandonne sa « position dure envers Huawei ».
La journaliste chinoise en exil Su Yutong, qui vit à Berlin, a posté sur X : Jian G. a toujours été actif dans le cercle des activistes chinois pour la démocratie en Allemagne. Il serait également en contact étroit avec des organisations tibétaines et aurait rendu visite au Dalaï Lama à son siège de Dharamsala.
Krah : ses contacts avec la Chine, la Russie et les États-Unis
Maximilian Krah, 47 ans, avait déjà établi des contacts avec la Chine et les États-Unis lorsqu’il était étudiant. Après des années d’appartenance à la CDU, ce père de huit enfants et catholique n’a rejoint l’AfD qu’en 2016, selon le parti. Il s’est rapidement engagé en tant que vice-président de la fédération régionale de l’AfD en Saxe, et en 2022, il est devenu membre du comité directeur fédéral.
En automne 2019, Krah a rejoint Bruxelles en tant que député européen. Selon son portrait de député, Krah est actuellement membre de quatre commissions parlementaires de l’UE, dont celles des relations avec les États-Unis et du commerce international. Dans cette dernière, il est également question des affaires de l’Union européenne avec la Chine. Krah occupe également des postes de vice-président dans cinq commissions. Selon des informations du Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), Krah est également vice-président de l’association informelle EU-China Friendship Group. Il entretiendrait en outre des contacts étroits avec la Russie.
Malgré toutes les critiques sur ses relations avec la Russie, la Chine, les États-Unis et malgré ses attitudes que beaucoup jugent contestables, Krah avait été élu fin juillet 2023 à Magdebourg tête de liste de l’AfD pour les élections parlementaires européennes de 2024. L’AfD milite pour une nouvelle confédération européenne à la place de l’UE, pour une « Europe des patries ».
L’Office fédéral de protection de la constitution avait classé l’AfD comme « cas suspect d’extrême droite » en mars 2021. Le tribunal administratif de Cologne avait confirmé cette classification en mars 2022. L’AfD a fait appel. La procédure devant le tribunal administratif supérieur de Münster n’est pas encore terminée.
Il y a quelques jours, Krah avait provoqué une curiosité : pendant six heures et demie, ce politicien « de droite » selon ses propres termes, avait répondu aux questions des deux journalistes Tilo Jung (« Jung & Naiv ») et Hans Jessen. Par la suite, de nombreux opposants à l’AfD ont reconnu dans les colonnes de commentaires des réseaux sociaux avoir mal évalué Krah auparavant. Entre-temps, plus de 570.000 personnes ont cliqué sur l’interview (vidéo sur YouTube).
Le cas Bystron
Il y a quelques semaines, Petr Bystron, un autre politicien de l’AfD, qui apparaît sur la liste des candidats à l’UE du parti juste après le tête de liste Krah, a fait la une des journaux. Selon des recherches menées conjointement par Der Spiegel et un réseau de rédacteurs tchèques, ce Tchèque de 51 ans avait été soupçonné d’avoir accepté des pots-de-vin de source russe. Les rédactions n’ont toutefois pas encore pu fournir de preuves de ces accusations.
Au contraire, selon les informations du journaliste Alexander Wallasch, Ladislav Šticha, un porte-parole des services secrets tchèques (BIS), a reconnu mi-avril 2024 que le nom de Bystron n’avait jamais été mentionné dans les enregistrements des services secrets. Auparavant, le chef des services secrets allemands avait également déclaré à la commission de l’intérieur qu’il ne connaissait pas d’enregistrements dans lesquels il était question de Bystron. Les enquêteurs du Spiegel s’étaient pourtant appuyés sur de tels enregistrements.
Les accusations sans fondement portées contre Bystron ont fait l’objet d’une séance d’actualité au Bundestag le 11 avril 2024. Bystron avait alors parlé d’une « campagne de diffamation ».
Le nouveau Parlement européen sera élu entre le 6 et le 9 juin 2024. En Allemagne, les bureaux de vote n’ouvriront que le dimanche 9 juin.
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