Anti-rhume dangereux : pourtant en vente libre, ces médicaments « devraient être retirés du marché »

Par Epoch Times avec AFP
22 novembre 2024 08:56 Mis à jour: 22 novembre 2024 08:56

Largement considérés comme dangereux depuis des années, les principaux traitements anti-rhume sont toujours en vente libre. À l’approche de l’hiver, les autorités sanitaires françaises envisagent de mettre enfin fin à ce paradoxe.

« La délivrance de ces médicaments sans prescription médicale n’apparaît aujourd’hui plus adaptée », a estimé jeudi, dans un mail à l’AFP, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Elle dit envisager le « listage » de ces traitements, une mesure qui prendrait effet immédiatement et aboutirait dans les faits à ce qu’ils ne soient plus disponibles en vente libre en pharmacie.

Ces médicaments ont tous en commun de contenir la molécule pseudoéphédrine. Les principaux s’appellent Actifed Rhume, Dolirhume, Humex Rhume, Nurofen Rhume et Rhinadvil Rhume.

Disponibles sans ordonnance sous forme de comprimés, ces traitements – aussi vendus par spray nasal sur prescription – visent à décongestionner et désencombrer le nez. Ce sont donc les principaux médicaments utilisés contre le rhume. Mais ils font l’objet depuis plusieurs années de nombreuses critiques, à commencer par l’ANSM elle-même, car ils peuvent provoquer de graves effets secondaires comme des AVC et des infarctus.

La mesure envisagée par l’agence du médicament — relayée ces dernières semaines par des titres spécialisés comme le Quotidien du Pharmacien — est, à ce titre, le dernier épisode d’un long feuilleton qui l’a vu peu à peu durcir ses positions face à cette famille de traitements.

En 2023, elle avait pour la première fois déconseillé explicitement leur utilisation. Cette décision avait, pour un temps, fait décliner les ventes de traitements anti-rhume. Mais celles-ci rebondissent depuis septembre, une situation que l’ANSM juge particulièrement préoccupante « en amont de la saison hivernale » et son cortège de maladies.

« Des risques graves au regard de bénéfices modestes »

Pourquoi ne pas interdire purement et simplement ces médicaments ? Les autorités sanitaires françaises expliquent régulièrement avoir les mains liées par la réglementation européenne, qui soumet le retrait d’une autorisation à l’avis de l’Agence européenne du médicament (EMA). Or, celle-ci a estimé l’an dernier que les traitements anti-rhume concernés ne présentaient pas de risques suffisants pour les interdire, même si elle a imposé de nouvelles contre-indications.

Cet avis s’explique par le fait que les effets secondaires graves restent très rares. Ils sont quelques-uns à être signalés chaque année et, en France, aucun décès n’a été rapporté. Les autorités européennes et françaises sont donc en désaccord, les secondes estimant que le risque, même faible, est inacceptable au vu du caractère bénin de la maladie traitée : un simple rhume. « Un trop grand nombre de patients reste ainsi exposé à des risques graves au regard des bénéfices modestes de ces médicaments », juge l’ANSM.

Cette position va dans le sens des principales sociétés savantes françaises – ORL, médecins généralistes, pharmaciens – qui s’opposent toutes à l’usage de ces médicaments. Elle risque en revanche de froisser les pharmaciens, dont nombre de représentants estiment qu’une telle restriction réduit injustement l’éventail de médicaments à proposer à leurs clients enrhumés, dans un contexte marqué par une difficulté récurrente à obtenir des rendez-vous médicaux.

« Ça va devenir compliqué pour nous de répondre aux problèmes des patients, les gens n’auront plus de médecin et nous, on ne pourra plus rien conseiller », estime, dans le Quotidien du Pharmacien, Béatrice Clairaz-Mahiou, coprésidente de la Société francophone des sciences pharmaceutiques officinales (SFSPO).

Mais, pour d’autres observateurs, les autorités sanitaires ont, au contraire, été d’ores et déjà trop longues à réagir. « Les soignants ont mieux à faire que de passer du temps à déconseiller aux patients un médicament qui devrait être retiré du marché », estimait en début d’année la revue indépendante Prescrire, voyant dans la décision européenne une « occasion ratée de protéger les patients ».

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