Le Venezuela sort progressivement de l’ombre mercredi, mais pas du chaos après six jours de panne électrique dont la population et l’économie nationale continuent de payer les conséquences, faisant craindre une crise encore plus profonde.
Caracas a retrouvé le courant ainsi que la plupart des Etats, selon le gouvernement, mais il était toujours intermittent et insuffisant dans l’ouest du pays. Le Venezuela continue de fonctionner au ralenti avec une nouvelle journée chômée mercredi sur ordre du gouvernement. La plupart des banques et des commerces sont restés fermés et les transports publics, déjà déficients en temps normal, suspendus.
La Chine a proposé son aide pour faire la lumière sur les raisons de cette panne, dont l’ampleur et la durée restent inédites dans ce pays pétrolier. Le président Nicolas Maduro y voit une attaque « cybernétique » fomentée par le ministère américain de la Défense et l’opposition. Une thèse techniquement possible, selon les experts, qui la jugent cependant improbable et rappellent le manque d’entretien des infrastructures du pays.
Loin de ces querelles d’experts, les Vénézuéliens se battent surtout pour trouver de l’eau, leur souci principal. De longues files se forment partout en ville devant les camions citernes affrétés par le gouvernement et les maires d’opposition dans la capitale, et il faut parfois attendre des heures pour remplir son bidon. Le réseau de distribution n’a pas été rétabli, et même à Caracas le rationnement s’impose.
« Pas d’eau, pas de lumière, pas de médicaments, pas d’argent liquide et pas de transports… Formidable », résume Victoria Milano, 40 ans. Son immeuble a retrouvé l’électricité, mais depuis elle vit dans la peur de la perdre de nouveau. La ministre chargée de l’Eau, Evelyen Vásquez, a fait valoir que rétablir le système est « complexe » et prendra encore du temps. « Nous avons relancé les pompes et nous progressons lentement ».
Alors que le pays connaissait déjà des pénuries alimentaires, la panne les aggrave: selon la Fédération nationale des éleveurs (Fedenaga), « tout ceci est en train d’affamer le pays ». Le Conseil national du Commerce et des Services (Consecomercio) a par ailleurs appelé les autorités à rétablir l’ordre après les pillages: quelques-uns ont été signalés à Caracas, mais c’est surtout à Maracaibo, la capitale pétrolière (ouest), que le principal centre commercial et « plus de 500 commerces » ont été pillés « en toute impunité ».
« Ils ont dévalisé les boulangeries, tout emporté, ont volé les sacs de farine et même les moules à pain », a raconté à l’AFP un habitant de la ville, Espinoza. La « destruction des commerces réduit les capacités d’approvisionnement en vivres et médicaments de la population. Nous exhortons l’Etat à prendre des mesures pour protéger les établissements commerciaux et à identifier les responsables » des troubles, a lancé le responsable du Consecomercio, Felipe Capolzzolo.
Ecoanálitica, institut d’analyse économique, évalue à ce stade les pertes « à 875 millions de dollars ». L’industrie est paralysée et « pour redresser le pays il faudrait faire appel à un soutien international et au secteur pétrolier », estime le directeur, Asdrúbal Oliveros. Mais ce secteur-clé de l’économie vénézuélienne est à l’arrêt: « A ce stade, on risque de perdre jusqu’à 700.000 barils par jour », signale-t-il.
La compagnie nationale pétrolière PDVSA qui assure 95% des revenus du pays fonctionnait déjà mal, minée par la corruption: elle avait déjà vu sa production tomber de 3,2 millions de barils en 2008 à près d’un million avant la panne. La méga-panne d’électricité a débuté jeudi après-midi dans 22 des 23 Etats de ce pays de 30 millions d’habitants, et a duré officiellement jusqu’à mardi soir, quand Maduro a annoncé « la victoire dans la guerre électrique ».
Pour le chef de l’opposition, Juan Guaido, qui s’est proclamé président par intérim le 23 janvier, c’est la négligence et la corruption du gouvernement qui sont responsables de ce fiasco.Les hôpitaux en particulier vivent une situation dramatique: M. Guaido affirme qu’au moins vingt personnes sont mortes depuis jeudi. L’ONG Codevida a signalé au moins quinze morts faute de dialyse. Des bilans démentis énergiquement par les autorités.
« Comment se peut-il qu’une maternité n’ait pas de générateur? On a dû utiliser des mèches trempées dans le kérosène », s’insurge Milano, qui travaille dans un hôpital de Caracas. M. Maduro a ordonné la distribution à prix subventionnés de 50.000 citernes d’eau restées stockées et appelé la population à se munir de bougies, de lampes et de radios.
Il a annoncé la création d’une « commission d’enquête présidentielle » pour laquelle il entend solliciter « l’aide de l’ONU, de la Chine, de la Russie, de l’Iran, et de Cuba, pays qui ont une grande expérience des cyber-attaques ».
D.C avec AFP
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