On pourrait couvrir de honte Jacob Frey, le maire de Minneapolis, pour ne pas avoir promis d’arrêter de financer la police de cette ville. « Rentre chez toi, Jacob. Rentre chez toi ! » scandait la foule alors qu’il partait, la tête baissée. On pourrait dire que c’était le début de la version américaine de la Grande Révolution culturelle prolétarienne chinoise.
Mais on aurait tort.
L’humiliation de Frey – la foule a promis de le renvoyer de son poste de maire en le faisant pratiquement défiler avec un bonnet d’âne de la révolution culturelle – a été plutôt l’apothéose que le début de la version américaine de la Révolution culturelle.
Cette révolution a commencé il y a des décennies sur les campus universitaires et dans les médias. Aujourd’hui, elle s’empare des rues.
Ce sont surtout nos écoles qui en sont les instigatrices. Dans bien trop de cas, elles se sont progressivement transformées en institutions ressemblant à des camps d’endoctrinement. Et il en est ainsi de la maternelle à l’obtention d’un doctorat, des universités les plus prestigieuses aux écoles élémentaires.
La diversité des opinions est aujourd’hui une chose du passé, les réunions de professeurs se transforment en nos propres versions des « séances de lutte » maoïstes, les enseignants ferment tout d’abord leur bouche s’ils ne sont pas d’accord, puis pratiquent ce qui équivaut à « l’autocritique » pour préserver leur emploi ou, tout simplement, pour avoir un peu de paix.
Les étudiants ont bien compris le message – ils rédigent leurs essais et révisent leur discours en classe de manière à ne pas offenser le corps enseignant, l’administration et les autres étudiants « politiquement corrects » qui les entourent.
Il est vrai que ce qui est « politiquement correct » change souvent de jour en jour – mais, quoi qu’il en soit, on doit s’y conformer. Vous devez faire partie du programme ou vous êtes viré. Même les mathématiques de base sont maintenant attaquées.
Si nos enfants sont éduqués de cette façon depuis des années, il n’est pas étonnant qu’à l’âge adulte ou proche adulte ils sortent dans la rue pour ridiculiser sans pitié un maire ultra-libéral et « progressiste » – ceci pour avoir pensé qu’on a besoin de la police – une opinion qui était complètement normale la semaine dernière.
Nos médias sont bien sûr les produits du même système éducatif et ils ont depuis longtemps été dressés pour approuver et amplifier ces mêmes comportements et opinions. Les départements de communication et de journalisme de nos universités sont devenus synonymes de la pensée de groupe, formant les étudiants à être des propagandistes du nouveau futur glorieux.
(Au moment de l’écriture de ces lignes, je viens d’apprendre que James Bennet, le rédacteur en chef de la page éditoriale du New York Times, a démissionné couvert de honte pour avoir eu la témérité de publier un article du sénateur républicain Tom Cotton – n’est-ce pas du déjà vu sous la Révolution culturelle ?).
Les effets de notre système éducatif sont la cause première de ce que nous avons vu à Minneapolis et dans tous les États-Unis. Les guerriers de la justice sociale formés dans les collèges et les campus universitaires sont descendus dans la rue, ils les ont même envahies en essayant de mettre en application les mêmes baratins d’extrême gauche qu’ils font dans leurs écoles.
Et ils y parviennent bien.
Alors, où cela va-t-il nous amener ? La Révolution culturelle a endommagé l’économie chinoise tandis que, selon Wikipédia, « des dizaines de millions de personnes ont été persécutées, avec un nombre estimé de morts allant de centaines de milliers à 20 millions ».
Bien sûr, ce n’est pas aussi « grave » que la précédente aventure de Mao – le Grand Bond en avant – au cours duquel on estime que de 18 à 45 millions de personnes sont mortes. Cela a fait du Grand Timonier le plus grand tueur de masse de tous les temps, surpassant Staline et Hitler.
Il est peu probable qu’un pareil effet catastrophique se produise en Amérique, mais il sera de toute façon bien désastreux. Cependant, la pensée collective a également d’autres conséquences qui ont été mises en lumière par les écrivains britanniques Aldous Huxley, auteur du roman Le Meilleur des mondes et George Orwell, auteur de La Ferme des animaux et 1984, en étant la voie vers une forme moderne de fascisme.
Inscrire, selon la décision de la municipalité et de la maire démocrate de Washington, « Black Lives Matter » (Les vies noires comptent) en lettres géantes sur la route devant la Maison-Blanche et rebaptiser une place au même nom, n’est-ce pas un slogan sorti tout droit de La Ferme des animaux d’Orwell – « Black Lives Matter good. All Lives Matter bad » (Les vies noires comptent – c’est bon. Toutes les vies comptent – c’est mauvais) ?
Ceux qui l’ont fait reconnaissent la simple vérité. Alors que pour Mao la question de l’appartenance à une telle ou telle classe sociale servait de levier qui assurait son contrôle; en Amérique, c’est presque toujours une question de race.
Cette situation peut, en fin de compte, être la plus périlleuse de toutes. Vous pouvez être reclassé du « bourgeois » en « prolétaire » en changeant votre travail et votre statut financier, mais le racisme est une accusation beaucoup plus mortelle, car il est impossible de prouver que vous n’êtes pas raciste. Toutes sortes de personnes en ont été accusées sans preuves. C’est une accusation qui n’a pratiquement pas de limites.
Regardez ce qui est arrivé au malheureux M. Frey. Aujourd’hui, il est également devenu « raciste », bien qu’il ait pleuré sur le cercueil de George Floyd mort entre les mains de la police.
L’Amérique est au bord d’un précipice. Néanmoins, il y a des raisons d’être optimiste à long terme. Les choses finissent souvent par revenir à la normale. La Révolution culturelle ainsi que la Révolution française, qui lui était semblable dans sa période sanglante de Robespierre, sont finalement devenues inefficaces dans leurs excès. Elles ont échoué.
Malheureusement, il y a beaucoup de décombres à déblayer par la suite. Parfois pendant de longues années.
Parmi les débris que nous devons déblayer, le plus important est le parti pris dans nos systèmes éducatifs. Ce n’est qu’alors que nos jeunes seront de véritables citoyens instruits et qu’ils pourront réaliser les rêves de nos fondateurs en tant que personnes libres.
Roger L. Simon est le principal chroniqueur politique d’Epoch Times. Il est également romancier primé, scénariste sélectionné aux Oscars et cofondateur de PJ Media. Ses derniers livres s’intitulent I Know Best: How Moral Narcissism Is Destroying Our Republic, If It Hasn’t Already (personne ne le sait mieux que moi : comment le narcissisme moral est en train de détruire notre République, si ce n’est pas déjà fait) et The GOAT (la chèvre).
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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