ENTRETIEN – En novembre dernier, Claire Geronimi, 26 ans, a été victime d’un viol dans le hall de son immeuble à Paris. Un viol commis par un individu en situation irrégulière. Elle a accepté de revenir pour Epoch Times sur son histoire et comment elle tente de se reconstruire six mois après les faits. Elle dénonce également la non-exécution des OQTF.
Epoch Times – Comment les faits se sont déroulés ? Personne n’a pu venir vous aider à ce moment précis ?
Claire Geronimi – Les faits se sont déroulés le samedi 11 novembre dans l’après-midi. Je revenais de mes courses et au moment de taper le code de la porte d’entrée de mon immeuble, un homme a poussé la porte derrière moi et m’a suivi. J’ai marché trois mètres dans le hall, il m’a plaqué au sol et a commencé à m’étouffer pour m’empêcher de crier. J’ai tenté de me défendre pendant une quinzaine de minutes. Mais après, il a commencé à me menacer en me disant de me taire et qu’autrement, il allait me tuer.
J’ai arrêté de crier et à partir de là, il m’a dit que j’allais devoir faire ce qu’il disait. C’est là que j’ai compris qu’il voulait me violer. Et pour gagner du temps et ne pas mourir, j’ai fait ce qu’il m’a dit de faire. Trente minutes plus tard, une voisine est descendue, j’ai couru derrière elle et l’agresseur est parti. Mais la voisine m’a laissé toute seule parce qu’elle devait prendre un Uber. J’ai ensuite appelé la police. La police judiciaire et la brigade criminelle sont venues chez moi et ont regardé s’il n’y avait pas de traces d’ADN dans le hall etc.
La police m’a appris que l’individu était déjà en train d’être recherché parce qu’il avait violé une femme à côté de chez moi une heure plus tôt. On m’a également dit qu’il était un SDF sans papiers sous le coup de trois OQTF depuis 2021. Plus tard, grâce à des caméras, les policiers l’ont interpellé sur les Champs-Élysées.
Quelle est votre réaction quand vous apprenez que l’individu est sous le coup de plusieurs OQTF depuis trois ans ?
J’ai eu un peu froid dans le dos puisqu’on se dit que cet agresseur n’était pas censé être sur le territoire et que si l’OQTF avait été appliquée, il ne nous aurait pas agressées, la femme et moi. Aujourd’hui, je suis animée par un sentiment de révolte contre l’État. L’individu était soumis à trois OQTF depuis 2021 et son dernier séjour en prison remonte à février 2023.
Où en est la procédure judiciaire ? Savez-vous si l’individu a été expulsé et jugé dans son pays d’origine ? Sera-t-il jugé en France ?
Normalement, il va être jugé en France. Les procédures sont en cours. En janvier, j’ai rencontré la juge d’instruction qui m’a dit que le procès se tiendra d’ici deux à cinq ans. Il devrait être condamné à quinze ans de prison pour viol aggravé étant donné qu’il avait violé une autre femme avant moi et qu’il avait en sa possession des armes blanches, notamment un couteau.
Après avoir purgé sa peine, il devrait être expulsé, mais mon avocat m’a expliqué qu’il est possible qu’il soit renvoyé dans son pays sans qu’il n’y ait nécessairement de procès.
Vous avez déclaré à nos confrères du Journal du Dimanche : « Ma parole ne compte pas pour grand monde ». Certaines associations féministes vous ont tourné le dos ?
Exactement. Ma parole ne compte pas pour grand monde. J’ai souhaité médiatiser cette affaire parce que je voulais obtenir des réponses de la part du gouvernement. J’ai essayé de contacter Gérald Darmanin, mais aussi Bérangère Couillard (députée Renaissance, ndlr). Personne ne m’a répondu. J’ai trouvé cela irrespectueux parce que je suis l’une des premières victimes à avoir parlé à visage découvert pour porter un message fort, alerter les femmes et avoir des réponses sur le profil de l’agresseur.
Et effectivement, à l’exception du collectif Némésis, les féministes ne m’ont pas soutenu. J’ai essayé de contacter plusieurs associations féministes, notamment la Fondation des femmes, mais soit je n’ai pas eu de réponse, soit on me renvoyait vers d’autres numéros de téléphone.
Aujourd’hui, vous êtes toujours sous le choc et traumatisée par ce que vous avez vécu. Comment essayez-vous de vous reconstruire ?
J’essaye de me reconstruire en suivant une thérapie psychologique et psychiatrique. Tout ceci à mes frais bien sûr puisqu’il est aujourd’hui très difficile d’avoir un suivi psychologique de la part de la police. Il n’y a pas assez de psychologues disponibles dans la police pour pouvoir suivre toutes les victimes.
Je serai bien entendu remboursée après le procès, mais s’il a lieu dans cinq ans, je pourrais me retrouver sans ressources financières. Heureusement, je peux compter sur ma famille pour m’aider. J’essaye d’être le mieux entourée possible. Ma famille et mes amis m’aident beaucoup à me reconstruire. Et le fait d’en avoir parlé, de témoigner, c’est aussi très important.
Je suis également en train de m’engager. Je quitte mon entreprise pour créer mon association d’aides aux victimes de viols. Il s’agit d’accompagner les victimes d’un point de vue juridique, psychologique et administratif. Quand on traverse ce genre d’épreuves, on se sent très seule en tant que victime et pas du tout accompagnée, surtout par l’État. On ne sait pas du tout où aller. C’est très pesant psychologiquement. J’ai aussi remarqué, qu’au-delà d’être victime de son agresseur, on est victime de tout le reste.
Donc, pour moi, c’est vraiment l’engagement qui va m’aider à me reconstruire.
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