« On ne veut pas non plus brader »… De plus en plus de propriétaires immobiliers peinent à vendre leur bien, conséquence d’un marché en berne.
À 66 ans, Fabricia Lasne et son mari cherchent un acquéreur pour leur maison de 200 mètres carrés près de Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée), qu’ils veulent quitter pour un logement plus petit et plus facile à entretenir.
L’annonce est en ligne depuis un an et ils n’ont reçu aucune offre.
« Les gens qui viennent visiter sont en majorité des personnes âgées. Ils trouvent la maison très belle, le jardin impeccable, mais c’est la superficie qui les dérange, pour l’entretien quotidien », raconte Fabricia. « Il y a des jours où le moral est bien bas ».
Même problème pour Odile et Jacques, un couple de retraités qui, depuis un an et demi, cherche à vendre sa grande maison familiale du Périgord pour se rapprocher de ses enfants, en région parisienne.
Là encore, des visites mais aucune offre pour cette propriété de 230 mètres carrés proposée à 519.000 euros, frais d’agence compris. « Si, une qui faisait une négociation à moins 70.000 euros. Donc on a dit non tout de suite ! », confie Odile, qui n’a pas souhaité donner son nom de famille.
« On ne veut pas non plus brader ce bien, et plutôt attendre quelques mois pour voir comment le marché va réagir », explique son époux, reconnaissant que « le marché n’est tout de même pas très florissant ».
Après des années de hausse continue, les prix de l’immobilier commencent à stagner, voire à baisser dans certaines zones, comme en région parisienne.
Barrières juridiques
La remontée des taux d’intérêt, conjuguée à la réglementation sur le taux d’usure, qui interdit aux banques de prêter au-delà d’un certain taux d’endettement, y est pour beaucoup, car elle exclut des acquéreurs du marché.
Conséquence : ces derniers négocient davantage avant de signer.
« Les délais et les négociations sont plus longs, les discussions portent sur beaucoup de détails et les vendeurs sont restés sur une estimation immobilière qui date un peu », explique à l’AFP Élodie Frémont, présidente de la commission statistiques immobilières des Notaires du Grand Paris.
« Entre le moment où le vendeur prend conscience que le prix est décalé par rapport au marché et celui où il l’ajuste, cela prend du temps », relève quant à lui le président de Century 21 France, Charles Marinakis.
Selon son réseau d’agences, en Île-de-France, les délais entre la publication d’une annonce et la signature d’un compromis de vente se sont allongés de deux jours pour les maisons et de six pour les appartements. Et nettement plus à Paris et sa petite couronne.
« Il y a de l’attentisme côté acquéreurs, et du coup ça se répercute sur les vendeurs », témoigne Romain Gonzalez, directeur d’une agence Guy Hoquet à Issy-les-Moulineaux.
« On a beau anticiper depuis août, en leur disant que ça va baisser, tant que ça n’est pas figé, écrit partout, ça ne baisse pas », dit-il.
« Pour les appartements avec défauts, les rez-de-chaussée qui donnent sur la rue, exposés au Nord… les délais s’allongent et les baisses de prix se font au fur et à mesure », affirme aussi Sandrine Lucas, directrice d’une agence Guy Hoquet à Suresnes.
« L’effet passoires thermiques »
À cela s’ajoute la réglementation sur les passoires thermiques, dont nombre de professionnels redoutent qu’elle fasse chuter le prix des biens concernés.
Depuis le 1er janvier, en métropole, les logements qui consomment plus de 450 kilowattheures par mètre carré par an sont tout bonnement interdits à la location. L’ensemble des biens étiquetés G pour leur performance énergétique doit suivre en 2025, avant les F en 2028 et les E en 2034.
« L’effet passoires thermiques, on l’a vu énormément sur les petites surfaces, studios, deux-pièces », plus souvent voués à la location, explique Mme Frémont. Tendance qu’elle a aussi constaté sur les maisons. « Les gens sont regardants sur l’économie énergétique », dit-elle.
Mais là aussi, les prix de biens ayant besoin de travaux tardent à baisser. « Les vendeurs, à date, ne sont pas encore disposés à défalquer ce coût du prix » de vente, constate Charles Marinakis.
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