Les options de Téhéran sont nombreuses mais ne portent pas toutes les mêmes risques d’embrasement régional : les craintes se multiplient d’une réponse imminente de l’Iran à la récente frappe attribuée à Israël sur le consulat iranien dans la capitale syrienne.
La République islamique menace, Israël se tient prêt et peut compter sur le soutien appuyé de Washington, Chine et Russie se disent soucieuses de voir sombrer le Proche-Orient. Et Paris demande à ses ressortissants de ne pas se rendre dans la région.
Tension maximale dans un contexte où tout dérapage est possible
La tension est maximale, avec une multitude de scénarios possibles, sur fond de guerre entre Israël et le mouvement islamiste terroriste du Hamas.
Et le fait qu’aucun des acteurs impliqués n’ait intérêt à provoquer l’escalade ne protège pas d’une crise à grande échelle, explique à l’AFP David Khalfa, analyste pour la Fondation Jean Jaurès à Paris.
« Les erreurs de calcul sont tout à fait possibles. La dissuasion comporte un aspect éminemment psychologique », relève-t-il : « Les belligérants sont à la merci d’une erreur et d’un dérapage qui peut occasionner ensuite des conséquences en cascade. »
La frappe sur le consulat iranien à Damas le 1er avril a fait 16 morts parmi lesquels sept membres du corps des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de Téhéran par laquelle le régime pilote son rayonnement régional, selon une ONG.
L’Iran et la Syrie ont imputé l’attaque à Israël, qui n’a pas confirmé son implication mais reste considérée comme responsable, y compris par ses propres alliés.
Téhéran tenu pour responsable par Israël
La plus haute figure abattue ce jour-là est le général Mohammad Reza Zahedi, commandant d’une unité d’élite des Gardiens. « La frappe aérienne israélienne » signifiait à Téhéran « qu’il sera tenu pour responsable des actions du Hamas et d’autres alliés non-étatiques comme le Hezbollah libanais et les Houthis au Yémen », estime le Soufan Center à New York, spécialisé dans les questions de sécurité.
Depuis, les intentions de Téhéran relèvent de la conjecture, même si un consensus se dégage côté occidental sur la haute probabilité d’une frappe, que des médias américains ont directement évoqué cette semaine.
Washington a même envoyé en Israël un général pour « discuter des menaces sécuritaires actuelles dans la région », selon le Pentagone.
Car Téhéran dispose de l’arsenal nécessaire pour viser Israël, des infrastructures, des installations aéroportuaires ou des sites énergétiques, comme une plateforme gazière.
La posture des gouvernements américains et israéliens « suggère qu’ils s’attendent à ce que Téhéran utilise son arsenal de missiles de croisière et balistiques ainsi que des drones armés similaires à ceux que l’Iran a vendu en grandes quantités à la Russie », estime le Soufan Center.
Téhéran « face à un dilemme »
Mais l’opération ferait figure d’escalade majeure. Et Téhéran maintient depuis cette date une ambiguïté qui interroge.
« L’Iran menace toujours de répondre, tout en envoyant des messages régionaux et internationaux qu’il cherche une alternative politique à une réponse militaire », explique à l’AFP Eva Koulouriotis, experte indépendante du Moyen-Orient.
« Téhéran ne veut pas de guerre frontale avec Israël, au moins à ce stade » et ne peut se permettre une escalade, ajoute-t-elle, estimant que « cette impasse explique le délai de réponse ».
L’Iran se trouve « face à un dilemme », écrit pour sa part l’ancien diplomate français Michel Duclos, sur le site de l’Institut Montaigne. « Il n’est sans doute pas assez sûr de ses forces pour envisager d’un coeur léger une escalade avec Israël. Si toutefois il ne réplique pas, il risque de perdre une partie de sa crédibilité dans la région, dans les opinions comme auprès des groupes armés qui lui font allégeance ».
Ces groupes armés, en Irak, au Yémen, en Syrie et au Liban, qui forment « l’axe de la résistance » iranienne contre Israël, apparaissent donc plus que jamais en première ligne, avec une possible intensification de leurs opérations, selon Farzan Sabet, expert du Geneva Graduate Institute.
L’Iran pourrait leur demander d’augmenter le nombre d’attaques, et augmenter les livraisons d’armements modernes, pronostique-t-il sur X (ex-Twitter) : « L’option est plus facile à nier, avec un coût politique moindre et un faible risque de retour de flamme. »
Parmi les autres hypothèses figurent la frappe d’une représentation diplomatique israélienne à l’étranger, qui aurait l’inconvénient d’impliquer un pays tiers. Ou une « attaque terroriste contre des installations diplomatiques américaines dans ou hors de la région », mentionne aussi le Soufan Center.
Obliger l’Iran à sortir de la guerre de l’ombre
Les débats sont décrits comme intenses au sein du régime iranien. Le 1er avril, « Israël a voulu changer les règles du jeu en frappant la tête de la pieuvre, et non seulement ses tentacules, pour obliger l’Iran à sortir de la guerre de l’ombre et de la guerre d’usure par procuration », tranche David Khalfa. Aujourd’hui, « les Iraniens n’ont que des mauvais choix à leur disposition ».
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