Attentat « terroriste » ou acte isolé ? Les autorités tunisiennes enquêtent mercredi pour élucider les circonstances d’une attaque menée par un gendarme ayant tué trois de ses collègues et deux fidèles devant une synagogue sur l’île de Djerba, pendant le pèlerinage juif annuel, avant d’être abattu.
« L’enquête est en cours pour déterminer les responsabilités engagées dans cette attaque lâche », a indiqué le ministère tunisien des Affaires étrangères dans un communiqué. L’attaque a eu lieu en deux temps alors que des centaines de fidèles achevaient le pèlerinage juif annuel de la Ghriba mardi soir.
Selon les autorités, le gendarme a d’abord tué l’un des ses collègues par balle sur le port de Djerba et s’est emparé de son arme et ses munitions. Il s’est ensuite rendu aux abords de la synagogue, distante d’une quinzaine de kilomètres, où il a ouvert le feu sur les forces de l’ordre qui assuraient la sécurité du lieu, avant d’être abattu.
Des fidèles et des gendarmes parmi les victimes
Deux fidèles, un Tunisien et un Franco-tunisien ont été tués devant la synagogue par les tirs de l’assaillant, et quatre autres ont été blessés et évacués vers un hôpital, selon les autorités. Six gendarmes ont également été blessés. Deux d’entre eux ont succombé à leurs blessures, selon un nouveau bilan obtenu mercredi de source hospitalière.
Selon l’ancien ministre tunisien du Tourisme, René Trabelsi, une figure de la communauté juive tunisienne présent dans la synagogue au moment de l’attaque, les fidèles tués sont deux cousins : Aviel Haddad, un juif tunisien de 30 ans, et Benjamin Haddad, 42 ans, qui résidait en France. Dans une interview à la radio Mosaïque FM, il a indiqué que « sans l’intervention rapide des forces de sécurité, un carnage aurait eu lieu car des centaines de visiteurs se trouvaient sur les lieux ».
Témoignages sur place
« Vers 20 heures nous avons entendu des bruits de tirs de pistolet. La police a fermé toutes les portes et on ne pouvait pas sortir. On ne pouvait rien faire pendant plus de trois heures », a raconté à l’AFP l’un des fidèles qui se trouvaient dans la synagogue, Elyahu, un vieil homme venu d’Israël. « Certains priaient, d’autres pleuraient », a-t-il ajouté.
Également présente dans le lieu de culte, Raoudha Seibi, de l’Association tunisienne de Soutien des Minorités affirme avoir vécu « un vrai cauchemar ». « Je voyais les gens courir dans tous les sens. Je n’ai jamais cru que je vivrai une telle terreur, je suis sous le choc jusqu’à maintenant », dit-elle à l’AFP en larmes. »Les tirs étaient si proches ».
Un dispositif de sécurité a été déployé dans le périmètre de la synagogue, fermant toutes les routes y donnant accès, ont constaté mercredi dans la matinée des correspondants de l’AFP sur place. La synagogue de la Ghriba, la plus ancienne d’Afrique, avait déjà été visée en 2002 par un attentat-suicide au camion piégé qui avait fait 21 morts.
Réactions face à cette attaque antisémite
Cette attaque « nous bouleverse », a écrit le président français, Emmanuel Macron, dans un message publié sur Twitter. « Nous pensons avec douleur aux victimes, au peuple tunisien, nos amis. Nous sommes aux côtés de la famille de notre compatriote assassiné. Toujours, sans relâche, nous lutterons contre la haine antisémite », a-t-il ajouté.
Washington a également condamné l’attaque et salué « l’action rapide des forces de sécurité tunisiennes ». Rome a dénoncé « un lâche attentat contre la communauté juive tunisienne ».
Dénonçant une « attaque violente », le ministre israélien des Affaires étrangères, Eli Cohen, a affirmé que la victime Aviel Haddad détenait également la nationalité israélienne. « Cela prouve que le mal et la haine sont toujours là, nos cœurs et nos pensées sont avec les familles et la communauté », a-t-il ajouté dans un communiqué.
Reprise du tourisme, un secteur vital
Selon les organisateurs, plus de 5000 pèlerins, essentiellement venus de l’étranger, ont participé cette année au pèlerinage de la Ghriba, au cœur des traditions de la communauté juive tunisienne qui compte quelque 1500 personnes.
L’attaque survient au moment où le tourisme enregistre une forte reprise en Tunisie après un net ralentissement pendant la pandémie de Covid-19. Ce secteur vital pour l’économie avait été gravement affecté après les attentats de 2015 contre le musée du Bardo à Tunis et un hôtel de la station balnéaire de Sousse, ayant fait 60 morts dont 59 touristes étrangers.
La Tunisie traverse en outre une grave crise socio-économique qui a empiré depuis que le président Kais Saied s’est emparé des pleins pouvoirs en juillet 2021.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.