Très actif lors des récentes mobilisations contre la réforme des retraites ou les « méga-bassines », le « black bloc« a pris de la visibilité ces dernières années en s’en prenant violemment aux forces de l’ordre et à des symboles du pouvoir ou du capitalisme.
Au singulier, l’expression désigne une pratique de contestation politique consistant à se regrouper dans les manifestations ou lors d’actions de désobéissance civile en un bloc uni, visible et mobile. Les « black blocs », qui émanent souvent de l’ultragauche, sont les participants eux-mêmes à cette méthode d’intervention.
« Le black bloc est moins un groupe identifié qu’un mode d’action qui agrège de multiples petits groupes pas forcément liés », note le sociologue Fabien Jobard, spécialiste du maintien de l’ordre.
« Ennemi insaisissable »
Le terme, créé par la police, est né à Berlin au début des années 1980, lorsque des militants de gauche s’habillaient en noir pour s’anonymiser et se constituer en « bloc » afin de protéger les squats de la gauche autonome. Le terme réapparaît à Seattle au moment du sommet de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) de 1999. En France, les premiers « blocs » auraient émergé lors de la contestation de la « loi Travail » en 2016. Depuis, ils ont été actifs aussi bien dans les défilés du 1er-Mai et de « gilets jaunes » que dans ceux contre la « loi Sécurité » en 2021. « C’est un ennemi insaisissable. C’est personne et tout le monde », explique à l’AFP Thierry Vincent, auteur du livre « Dans la tête des black blocs » (Ed. de l’Observatoire).
Grève du 28 mars à Bordeaux : premières tensions entre black blocs et policiers, ici rue Fernand-Philippart @denislherm pic.twitter.com/querg3WVZv
— Sud Ouest Bordeaux (@SO_Bordeaux) March 28, 2023
Par leur mode d’action coordonné en manifestation, ils se distinguent des casseurs, agissant de manière désorganisée ou individuellement. Le bloc, invisible en début de manifestation, se constitue de manière soudaine autour de « signes de ralliement », comme un drapeau d’équipe de foot, note Thierry Vincent. Les « BB » sont en général habillés en noir, masqués et constitués en petits groupes « affinitaires » de 10 à 20 personnes. Le « bloc » peut être devant ou proche de la tête de cortège syndicaliste, repassant derrière cette ligne en cas de charge policière, ou intervenir au moment de la dispersion d’une manifestation.
Ses cibles privilégiées sont les forces de l’ordre (tirs de projectiles, corps à corps) et les vitrines de banques, fast-food, agences immobilières… Ils peuvent s’en prendre aux journalistes, mais ne ciblent pas les passants et les autres manifestants. Ils entretiennent cependant des relations parfois conflictuelles avec les services d’ordre des syndicats, qui leur reprochent régulièrement de perturber les manifestations. Certains blacks blocs laissent dans leur sillage des messages politiques graffités.
Composition sociale panachée
D’une contestation à une autre la composition du black bloc, par définition, varie. « Il y a toute la palette : le ‘professionnel’ entre guillemets qui va faire ça à chaque fois, puis celui qui fait ça de temps en temps, puis celui qui n’a pas prévu de le faire mais il est énervé, celui qui ne sait pas qui s’habille en noir au cas où », selon Thierry Vincent.
Les blacks blocs n’ont pas d’idéologie unique ou d’affiliation commune à un parti ou un syndicat. Notablement, ils ne recrutent pas et ne font pas de prosélytisme. Ils peuvent, selon les appels, venir de plusieurs pays d’Europe pour une action de mobilisation.
Enseignants, professions libérales et surtout étudiants ou lycéens : historiquement, le « black bloc » français est plutôt jeune « urbain, niveau d’étude et capital culturel élevé, ce sont des militants », a constaté M. Vincent. À propos des black blocs, Gérald Darmanin a jugé qu’on pourrait les appeler les « black bourges », car ce sont « des enfants de bonne famille ». « Il y a des ‘black bourges’, ces jeunes qui les rejoignent en réaction à leur éducation, à leurs parents. Mais il y a aussi des cadres, des enseignants, des gens bien insérés » et « des jeunes exclus de la société », assure à l’AFP un syndicaliste anticapitaliste.
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