Dernière réforme sociale du quinquennat, le Contrat d’engagement jeune (CEJ) entre en vigueur ce mardi 1er mars avec l’ambition de ramener vers la formation et l’emploi 400.000 jeunes par an, peu qualifiés et souvent hors radar des institutions.
Selon l’Insee, le taux des 15-29 ans « ni en emploi, ni en études, ni en formation » (Neet en anglais) était de 12,2% au 4e trimestre 2021, soit près de 1,5 million.
Certes, avec la reprise et le plan « un jeune, une solution », ce chiffre a retrouvé son niveau d’avant crise.
Une formule révisée pour l’accompagnement de jeunes hors circuit
« Mais la part des Neet en France reste plus élevée que dans beaucoup de pays européens », a récemment rappelé Elisabeth Borne lors d’une rencontre sur le sujet au ministère du Travail. « Malgré la reprise, certains jeunes ne parviendront pas seuls à accéder à l’emploi et ont besoin d’un accompagnement. On ne peut pas continuer à donner à ces jeunes le sentiment qu’ils n’ont pas leur place », selon la ministre.
D’une durée de six mois à un an et ciblé sur les 16-25 ans, le CEJ prend le relais de la Garantie jeunes, lancée en 2013, dont il reprend la philosophie mais de manière plus ambitieuse.
Comme avec la Garantie jeunes, le bénéficiaire pourra toucher une allocation mensuelle maximale de 500 euros s’il respecte ses obligations.
Si la Garantie jeunes a permis, selon une étude de la Dares, une hausse de 10 points du taux d’emploi de ses bénéficiaires, la Cour des comptes a déploré « un degré d’intensité » de l’accompagnement qui « tend à baisser » après un premier mois d’ateliers collectifs en Mission locale.
Une formation de de 15 à 20 heures par semaine sur 6 mois
Le CEJ prévoit lui un accompagnement de 15 à 20 heures par semaine de bout en bout, sous l’égide d’un conseiller référent.
« L’intensité est un paramètre clé. On ne lâche pas la main du jeune, le conseiller va prescrire, vérifier, mesurer les progrès », explique Jean-Benoit Dujol, directeur du projet au ministère.
Pour réduire le risque de décrochage, une application renforcera le lien entre le jeune et le conseiller qui pourra ainsi suivre la réalisation des actions. Le jeune aura accès à l’ensemble des services (offres d’emploi, de contrats d’alternance, de service civique, d’immersion professionnelle, etc).
La réussite du CEJ à la charge des Missions Locales et de Pôle emploi
Mais la clé de la réussite dépendra de la capacité des Missions locales et nouveauté, des agences Pôle emploi, à proposer des ateliers utiles au jeune.
A la Mission locale de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), « on s’est posé trois jours pour réfléchir et définir un socle d’ateliers de 10 semaines pour travailler en profondeur la confiance en soi et le projet professionnel », explique la responsable, Radia Mahfouf.
A l’agence Pôle emploi d’Istres (Bouches-du-Rhône), la conseillère Corinne Signes a identifié « tout ce qu’on pouvait proposer en interne ou en partenariat : savoir-être, valorisation de son image, immersion en entreprise, recherche d’emploi, aides au logement, à la santé… »
La mise en place du CEJ sera une « petite révolution » à Pôle emploi qui n’a jamais réalisé « un accompagnement aussi intensif avec un conseiller pour 30 jeunes », selon son directeur général Jean Bassères.
1660 conseillers pour accompagner 50.000 jeunes tous les 6 mois
Grâce à 1660 conseillers, l’objectif sera d’accompagner 50.000 jeunes sur 6 mois, soit 100.000 par an. Du côté des Missions locales, leur président Stéphane Valli prévoit « 40.000 à 60.000 » contrats signés dès mars.
« C’est un droit ouvert, il n’y pas de quotas. On fait confiance au conseiller pour apprécier si le CEJ est adapté au jeune devant lui », assure Elisabeth Borne.
Cependant, la difficulté sera d’aller chercher ces jeunes en rupture et méfiants envers les institutions. Selon la Dares, 37% des Neet étaient en 2018 sans contact avec le service public de l’emploi ou tout autre organisme d’insertion.
Pour Cécile Wateau, cadre du groupe d’entreprises d’insertion Vitamine T, « il faut beaucoup de bienveillance et aller leur parler deux, trois, dix fois pour qu’ils vous fassent confiance ».
Mais, pour que le jeune évite les ruptures de parcours, les acteurs doivent travailler ensemble. « A Lille, un conseiller Mission local va être à 50% dans nos locaux, ça va être un accélérateur de particules« , se réjouit Mme Wateau.
Cela suppose une intégration, à ce stade encore balbutiant, des systèmes d’information pour partager les informations sur les jeunes, notamment de la part de l’Éducation nationale, qui peine à transmettre en temps réel ses listes de décrocheurs.
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