L’Europe a dévoilé mardi 47 projets pour exploiter ses terres rares et métaux stratégiques, comme le lithium indispensable aux batteries des voitures électriques, afin de réduire sa dépendance à la Chine et sécuriser son industrie.
Secouée par la pandémie de Covid puis par la guerre en Ukraine, l’Union européenne a appris dans la douleur qu’un recours excessif aux importations pour certaines matières premières critiques pouvait mettre à l’arrêt ses chaînes d’approvisionnement.
« Le lithium chinois ne peut pas devenir le gaz russe de demain », a averti mardi le commissaire européen à l’Industrie, Stéphane Séjourné, lors d’une conférence de presse à Bruxelles.
Today, we are 💯% dependent on third countries for the supply of certain raw materials that are key for our industry 💎
Chinese lithium cannot become the Russian gas of tomorrow.
We must extract, transform and recycle raw materials in Europe. pic.twitter.com/gRCaVkfiYW
— Stéphane Séjourné (@steph_sejourne) March 25, 2025
Il a dévoilé 47 projets prioritaires pour l’extraction, le traitement et le recyclage de terres rares et métaux stratégiques sur le sol européen.
Des procédure d’autorisation simplifiées vu l’urgence
Ces projets, qui incluent l’ouverture de mines de lithium, de cuivre, de nickel ou de tungstène dans l’UE, bénéficieront de procédures d’autorisation simplifiées et d’un soutien financier européen.
Avec la volonté d’aller vite, dans un contexte de tensions géopolitiques accrues depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche. « Il y a une dimension d’urgence qu’il n’y avait pas il y a trois ou quatre mois », a reconnu le responsable français.
Huit implantations en France
Les projets présentés mardi sont implantés dans 13 pays membres. Huit d’entre eux sont situés en France, dont deux projets d’extraction de lithium dans l’Allier (groupe Imerys) et en Alsace (Eramet).
« Pendant longtemps, les matières premières ont été l’angle mort de notre politique industrielle. Trop compliqué, trop cher, trop long à produire, l’Europe a préféré acheter quasi exclusivement, en dehors de ses frontières, la plupart des matières premières dont elle avait besoin », a expliqué Stéphane Séjourné, assurant que cette époque était révolue.
L’UE a adopté l’an dernier une législation pour sécuriser ses approvisionnements. L’objectif est de réduire la dépendance à la Chine pour des matières utilisées notamment dans la fabrication de batteries, d’éoliennes, ou de munitions.
« Il n’y a pas de décarbonation possible sans gallium pour construire les panneaux solaires, sans cuivre pour acheminer l’électricité. Pas d’industrie de défense sans les terres rares qui rentrent dans la composition de nos radars, nos sonars, nos systèmes de ciblage – et pour lesquelles nous dépendons à 100% de la matière raffinée chinoise », a énuméré le responsable français. « Pas d’industrie tout court, sans cuivre, sans aluminium ou sans le manganèse qui vient renforcer la structure de l’acier ».
Le plan européen se décline en plusieurs volets: extraire davantage de matières premières en Europe (mais aussi les transformer et les recycler), diversifier les fournisseurs étrangers, développer des achats en commun pour réduire les coûts et constituer des stocks stratégiques.
« Ouvrir de nouvelles mines en Europe »
Mais la priorité pour l’UE est d’abord d’exploiter ses propres ressources tout en respectant des normes environnementales strictes, alors que ces projets sont contestés par des militants écologistes.
« Soyons clairs : nous sommes dans l’obligation d’ouvrir de nouvelles mines en Europe », a martelé Stéphane Séjourné, affirmant que le Vieux continent pouvait par exemple devenir « totalement autonome en lithium » d’ici cinq ans.
Les projets sélectionnés comme stratégiques bénéficieront de permis accélérés. Le délai d’octroi des autorisations ne devra pas dépasser 27 mois pour les projets d’extraction et 15 mois pour les projets de traitement et de recyclage.
Jusqu’à deux milliards d’euros de financements seront disponibles sous forme de prêts, garanties et subventions, a promis Stéphane Séjourné. Il affirme cependant que leur simple labellisation permettra de les rendre économiquement viables.
Au total, la Commission européenne a reçu 170 candidatures de projets, dont 49 se situent hors du territoire de l’UE, y compris au Groenland et en Ukraine. Ces derniers pourront aussi prétendre au statut de projet stratégique européen. Les projets de pays tiers retenus seront annoncés « dans les prochaines semaines ».
Une liste de 17 matières premières stratégiques
La législation européenne établit une liste de 17 matières premières stratégiques comme le cobalt, le nickel et l’aluminium pour lesquelles elle fixe des objectifs chiffrés. Pour chacune d’elles, l’UE doit pouvoir d’ici à 2030 assurer sur son territoire au moins 10% des besoins d’extraction, 40% de la transformation et 25% du recyclage.
Et pour chacune d’elles, l’UE ne devra pas dépendre d’un pays tiers unique pour plus de 65% de ses besoins.
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