L’iridium, un cousin rare et cher du platine, a vu son prix tripler en l’espace de quatre mois, une hausse spectaculaire alimentée par l’écart entre une demande vigoureuse et des quantités disponibles au compte-goutte.
L’iridium est un métal grisâtre, sous-produit du platine, utilisé surtout dans l’industrie, particulièrement dans l’électronique et la chimie.
6 à 8 tonnes d’iridium
L’Afrique du Sud « fournit 80% des 6 à 8 tonnes d’iridium sorties de terre chaque année », explique à l’AFP Vincent Donnen, cofondateur du fonds dédié aux métaux rares CDMR et enseignant à l’Ecole des Mines de Nancy.
S’il est difficile à produire, l’iridium ne fait pas pour autant partie de la catégorie des « terres rares », cet ensemble de 17 métaux fournis à 95% par la Chine et essentiels à une série de produits technologiques.
L’iridium est « particulièrement adapté à certaines applications industrielles (…) en raison de son point de fusion élevé, de sa dureté et de sa résistance à la corrosion », explique John Plassard, analyste chez Mirabaud.
De quoi le rendre particulièrement précieux dans la téléphonie mobile, dont la demande à court terme est attendue en forte hausse à mesure que les réseaux 5G se déploient, ainsi que dans l’énergie, notamment pour les piles à hydrogène.
L’iridium est également performant pour assurer la désinfection de l’eau embarquée par les navires dans leurs ballasts.
Accusée de transporter par ce moyen nombre d’espèces invasives à travers la planète, la marine marchande a depuis septembre 2019 et un traité de l’Organisation maritime internationale (OMI) obligation de traiter ses eaux de ballasts, une disposition qui a dopé la demande d’iridium.
Il entre également dans la composition des étalons du mètre et du kilogramme conservés précieusement depuis 1889 au bureau international des poids et mesures (BIPM) à Sèvres, près de Paris.
Pour une once troy d’iridium, soit 31,1 grammes, il fallait débourser pas moins de 6.000 dollars jeudi, selon le cours publié chaque jour par le groupe britannique d’ingénierie Johnson Matthey.
Dépendance de son approvisionnement
Si son prix a plus que triplé en quatre mois, c’est notamment en raison de la dépendance de son approvisionnement à une seule zone d’extraction, expliquent plusieurs experts.
Les perturbations liées à des problèmes techniques au sein du groupe minier sud-africain Anglo American Platinum l’an dernier n’y sont pas non plus étrangères, de même que les mesures de restrictions de déplacement des personnes dans le pays du fait de la pandémie de Covid-19.
Par ailleurs, la désaffection des consommateurs pour les véhicules diesel, d’autant plus après le scandale Volkswagen, a entraîné lors de la décennie précédente une forte baisse des prix du platine, utilisé pour réduire les émissions polluantes.
Ce phénomène n’a donc pas encouragé son extraction, dont dépend l’iridium, qui n’a pas de mine en propre.
Enfin « le marché de l’iridium, le plus petit des platinoïdes, est peu liquide », souligne le raffineur allemand Heraeus, « son prix est donc susceptible de grimper en flèche s’il n’y a pas de vendeur ».
5.000 dollars l’once
Le cours a d’ailleurs déjà dépassé le maximum attendu par le groupe dans ses prévisions annuelles, qui était de 5.000 dollars l’once.
L’iridium affiche la plus spectaculaire envolée mais beaucoup d’autres métaux ont également vu leurs cours grimper cette année, tirés par une reprise forte de la demande, notamment en Chine, et des perturbations de l’offre, stigmates de la pandémie de Covid-19.
C’est le cas du cuivre qui a pris 16% depuis le début de l’année et de l’aluminium (+12% sur le London Metal Exchange). Même s’il reste à un niveau de prix élevé, l’or fait grise mine et abandonne près de 10% de sa valeur depuis le 1er janvier, la valeur refuge traditionnelle étant délaissée à l’heure où la reprise parait à l’horizon.
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